Une reconnaissance et si peu d’espoir 

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La reconnaissance de leur État comme un État souverain et autonome est un combat pour les Palestiniens depuis 77 ans. Des années de lutte solitaire. Lundi, à la tribune de l’Onu, la France suivie par 17 autres pays dont le Royaume-Uni vont enfin franchir le pas.

« Cette annonce à New York ne changera rien. Elle n’apportera aucune sécurité aux habitants de Gaza ni même de Cisjordanie Occupée. Nous faisons face à l’arrogance d’Israël. Elle est d’une ampleur que le monde n’a jamais connue. » La réponse de Mohamed est immédiate lorsqu’on lui demande par WhatsApp ce qu’il pense de cette Assemblée générale des Nations unies, co-présidée par la France et l’Arabie saoudite. Le Palestinien est piégé dans la bande de Gaza avec sa femme et ses trois enfants. Chaque jour est un combat pour survivre au cœur d’un génocide. Il peine de plus en plus à trouver de quoi nourrir sa famille. Mohamed ne choisit pas le mot « arrogance » au hasard. Il est aujourd’hui très utilisé, y compris par les opposants à Benyamin Netanyahou, pour désigner l’attitude des nationalistes, des suprémacistes israéliens qui s’autorisent à piétiner le droit international.


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« Il doit y avoir des mesures plus fortes comme la prise de sanctions financières contre Israël », ajoute le Gazaoui. Pour lui, la France devrait également rappeler à Paris son ambassadeur en Israël pour dénoncer les massacres quotidiens. « Nous voulons juste être en paix et en sécurité. Personne ne mérite de vivre ce que nous affrontons aujourd’hui « , écrit encore Mohamed. Un énième appel à l’aide d’un père de famille qui a tout perdu. En juillet dernier, le directeur de la rédaction du quotidien palestinien Al-Quds parlait pourtant de cette reconnaissance de l’État de Palestine comme d’une « lumière » qui transperce « les colonnes de fumée obscurcissant l’horizon ». Une lueur d’espoir au milieu de la guerre à laquelle s’accroche également Malak qui vit dans l’enclave. La Palestinienne a dû se déplacer une nouvelle fois au début du mois de septembre. Ces affaires et celle de ses enfants s’entassent désormais dans des sacs qu’elle ne prend même plus la peine d’ouvrir. « C’est très important symboliquement qu’un pays comme la France reconnaisse notre État. Cela envoie un message fort », confie d’une voix douce la mère de famille dans une note vocale. « C’est une étape de plus pour notre cause. J’ai conscience que cette reconnaissance ne va pas arrêter les bombardements mais cette décision peut accroître la pression sur Israël pour exiger la fin des massacres. Bien sûr elle aurait dû arriver plus tôt mais il vaut mieux tard que jamais ! Chaque geste politique en faveur de la justice pour la Palestine peut préparer un avenir différent pour nous. »

Ce rendez-vous diplomatique – et très médiatique – de lundi à New York a aussi pour but de redonner du poids à la « solution à deux États ». Une solution qui regagne du terrain après avoir été en partie enterrée depuis les accords d’Oslo en 1993. Mais là encore il ne s’agit que de diplomatie pour de nombreux Palestiniens. « La solution à deux États est depuis longtemps un mirage politique utilisé pour retarder la justice tandis qu’Israël poursuit ses crimes sur le terrain », assure Shams, juriste à Ramallah. « Gaza est réduite en ruines, les Palestiniens sont exterminés, affamés, et la Cisjordanie Occupée est morcelée par des colonies qui s’étendent chaque jour. Le gouvernement de Macron parle de deux États tout en continuant d’armer Israël et de maintenir des liens étroits avec ceux qui commettent un génocide. » Depuis plusieurs mois, dans une presque totale indifférence, la Cisjordanie occupée doit faire face également à ce que Mohamed de Gaza appelle l’arrogance israélienne. Depuis le 7 octobre 2023, plus rien ne semble pouvoir freiner le processus de colonisation de ce territoire déjà sous occupation. Près de 3,2 millions de Palestiniens y habitent. L’armée israélienne multiplie les incursions et la destruction de villages, de quartiers. Les colons ultra-orthodoxes volent les terres, les maisons des familles d’éleveurs, d’agriculteurs pour installer partout ce qu’on appelle des « avant- postes ». Une politique de grignotage du territoire palestinien totalement assumée par le gouvernement de Benyamin Netanyahou. « Ce n’est pas seulement trop tard, cela risque d’être un acte vide de sens », poursuit Shams. « Sans mise en œuvre de ces droits et sans mesures concrètes pour arrêter les crimes d’Israël, cette initiative n’est rien d’autre qu’une tentative de redorer l’image de Macron pendant que les Palestiniens continuent d’être massacrés et déplacés sous le regard de toute la communauté internationale. »

Ballotés de pays en pays, entassés dans des camps, privés de droits dans les pays d’accueil, les réfugiés Palestiniens attendent aussi cette reconnaissance depuis longtemps. À la création de l’État d’Israël, au moins 700 000 personnes ont été contraints à un exode forcé. « Qu’on ne s’y trompe pas, nous reconnaître ne suffit pas », lance Samir, réfugié du camp de Sabra au Liban. « Les nations arabes qui l’ont fait ne sont pas venues au secours de la Palestine. Nous sommes habitués à survivre depuis la naissance dans l’indifférence générale. » Le droit au retour des familles palestiniennes sur leur terre a été reconnu par l’Onu depuis 1948. Il n’a jamais été appliqué. 77 ans plus tard, c’est à l’Onu qu’Emmanuel Macron va reconnaître l’État palestinien.

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