Crépol : le choc des visions
Le drame a été récupéré jusqu’à la moelle par une extrême droite française débridée dans son désir de guerre de civilisations. Pour Clémentine Autain, il y est surtout question de virilisme, de mépris de classe et de racisme rampant. « C’est donc sur l’égalité et non l’identité qu’il faut porter le fer. »
La fête s’est terminée par un mort. L’acte meurtrier est tragique, le symbole effrayant, et notre empathie totale à l’égard des proches de Thomas. La dénonciation de ce meurtre est heureusement unanime, comme l’exigence de vérité et de sanctions. Ce qui fait débat, c’est la lecture de cet événement : elle dépend de notre rapport au réel et de notre vision politique.
Sans attendre la moindre précision quant aux circonstances du drame, l’extrême droite a multiplié les mensonges et approximations sur ce qu’il s’est réellement passé ce samedi 18 novembre. Elle a surtout appliqué sa grille de lecture : le « choc des civilisations ». Sa réponse éternelle ? La haine de l’autre. Ad nauseam. Pour Marine Le Pen, on a assisté « à une attaque organisée, émanant d’un certain nombre de banlieues criminogènes dans lesquelles se trouvent des ‘milices’ armées qui opèrent des razzias ». Pour Marion Maréchal-Le Pen, c’est « le racisme anti-blancs » qui « frappe jusque dans nos campagnes ». Pour Éric Zemmour, nous sommes face à des « francocides ». La chaîne CNews ou le journal Valeurs actuelles se sont déchaînés pour imposer leur obsession de voir les arabo-musulmans comme des barbares. Et comme d’habitude, Gérald Darmanin leur a couru après, en évoquant « des gens qui viennent d’ailleurs et ont voulu forcer l’entrée de cette fête et des coups de couteau sont partis. Ça s’appelle l’ensauvagement » . Depuis, ce sont les milices fascistes qui, galvanisées, ont emboîté le pas en défilant dans les rues de France aux cris de « islam hors d’Europe » ou en écrivant sur les murs « mort aux arabes ». Sur leur boucle interne, ces nervis appellent à « frapper du bougnoule ». C’est peu dire que la réplique n’est pas à la hauteur, avec une Macronie qui a mis ses pantoufles.
La réponse politique sérieuse et pacificatrice, c’est l’égalité. Chère à la gauche, elle est une réponse infiniment plus juste et efficace que l’identité, cheval de Troie de l’extrême droite. Face aux bruits des bottes, il y a urgence à la défendre avec ardeur.
Quand l’extrême droite sème un tel climat de guerre civile, nous devons affirmer une tout autre grille de lecture, capable de prendre le mal à la racine et de pacifier. N’en déplaise à Manuel Valls et à tous les réactionnaires : comprendre, ce n’est pas excuser, ce n’est pas faire preuve d’indulgence au regard des crimes commis, c’est se donner les moyens de faire reculer les rapports de dominations et les humiliations qui génèrent de la violence. Car les raisons de la mort de Thomas se trouvent à la croisée du virilisme, du mépris de classe et du racisme rampant. C’est donc sur l’égalité et non l’identité qu’il faut porter le fer.
Sur toutes les ondes, la question de l’identité des neuf agresseurs est en jeu. Il est assez sidérant que personne ne semble avoir remarqué, ou en tout cas commenté, un premier fait évident : cette scène est totalement masculine. Ce sont uniquement des hommes qui s’agressent. Les violences entre bandes de jeunes sont typiquement virilistes. Au démarrage de l’altercation, un jeune homme aurait tiré les cheveux d’un autre en le qualifiant de « tchikita ». Ce terme argotique marseillais, titre de la chanson qui passait à ce moment-là dans le bal, décrit une « femme parfaite » ou « sexy ». Nous pouvons imaginer que ces mots sont immédiatement prononcés comme, et pris comme, une insulte. La sociologie le renseigne depuis longtemps : la culture viriliste est un support identitaire des hommes des milieux populaires – même s’ils n’en ont vraiment pas le monopole ! Elle fonctionne comme un refuge, une identité que l’on surinvestit parce qu’elle est valorisante là où l’appartenance de classe et/ou la couleur de peau génèrent, pour des raisons sociales et culturelles, une image de soi dévalorisée. Après ces mots sans doute ressentis comme une remise en cause de la virilité, la situation dégénère : les rugbymans ont leurs poings, les autres ont leurs lames de couteau.
Ce que nous devons aussi saisir, c’est la confrontation entre deux mondes, deux univers sociaux et territoriaux. Au lycée, les jeunes de ces banlieues et campagnes populaires se côtoient, puis ils se séparent. Les uns ont, pour beaucoup d’entre eux, des profils issus de l’immigration, les autres sont majoritairement blancs. Une triple césure est à l’œuvre : de catégorie sociale (même si elles sont proches), d’origine, de territoire. Les jeunes du quartier de la Monnaie de Romans-sur-Isère savent qu’ils ne sont pas toujours les bienvenus dans ces fêtes de village. Mais ils s’y rendent quand même, parce qu’ils veulent avoir accès à cet univers socialement un peu supérieur au leur, et aux filles qui se trouvent dans ces bals. Si bien décrite par Benoît Coquard1, la sociabilité des jeunes des campagnes populaires repose en partie sur une volonté de se différencier du réel ou du fantasme des jeunes de banlieues – avoir son pavillon et ne pas loger dans une barre, vivre de son travail et non des minima sociaux… Cette coupure entre des jeunes qui, en réalité, ont tant d’intérêts communs est chaque jour alimentée par les inégalités sociales et territoriales produites par les choix politiques de la concurrence généralisée et de la baisse de la dépense publique, et par les discours d’extrême droite qui alimentent les clivages, divisent le monde populaire avec leur racisme.
La réponse politique sérieuse et pacificatrice, c’est de combattre les stéréotypes sexistes, racistes, de classe. C’est de sortir des idées-reçues sur les mondes populaires des banlieues et des campagnes. C’est de chercher à relier les différentes jeunesses au lieu de les opposer, en donnant à voir un avenir commun, en créant les occasions de sociabilité et de coopération. L’égalité, chère à la gauche, est une réponse infiniment plus juste et efficace que l’identité, cheval de Troie de l’extrême droite. Face aux bruits des bottes, il y a urgence à la défendre avec ardeur.
- Benoît Coquard, Ceux qui restent, La Découverte, 2019. ↩︎
Un principe et deux valeurs peuvent faire réponse à la montée folle de la violence. Le principe est celui de laïcité, totalement galvaudé par la droite populiste et l’extrême droite qui ne considèrent dans ce principe que les racines chrétiennes, sans tolérance et sans respect pour les non-croyants et les autres religions. Les deux valeurs qui sont à promouvoir sont l’égalité ( sexe, droits, salaires….) et la fraternité qui se traduit par la modération et la paix, c’est à dire le contraire des discours de haine. Cette fraternité commence également par le choix des mots et le respect des personnes.
Je trouve que C.Autain a sur les classes populaires un point de vue méprisant, clichés bourgeois .
Vivement que les personnes issues de cette classe populaire accèdent au pouvoir , bien sûr avec pour ambition l’émancipation de tous indépendamment des origines.
Il ne faut pas inverser les rôles. Qui est raciste ? Qui professe la haine de l’autre ? ‘On va casser du Blanc’ était le mobile de la bande qui a opéré une décente à Crépol et tué Thomas. Il a été assassiné parce qu’il était blanc.
Telle est la réalité, qui vient heurter un schéma établi de longue date par la gauche et l’extrême-gauche : le raciste est toujours blanc. Ce qui s’en écarte est tabou. Il est temps de le briser.
Que les partis politiques réagissent à des faits de société, fussent-ils à la base des faits divers, est normal. Ils sont dans leur rôle. Les partis de gauche ne s’en privent pas, et ils ont raison. Ils ont tort en revanche de dénier aux partis de droite de réagir eux aussi. C’est de la récupération, s’indignent-ils ! N’y aurait-il que la gauche et l’extrême-gauche pour rendre compte de la réalité des faits, réfléchir aux mesures à prendre pour en empêcher le retour s’ils sont tragiques et veiller à la santé morale de la société ?
Bah oui.
Pourquoi empêcher les partis de droite d’appeler à la violence et de monter les français les uns contre les autres ?
C’est tellement cool les ratonnades.
Eh bien non.
Ne dites pas n’importe quoi. Les partis de droite et d’extrême-droite n’ont pas appelé à la violence ni tenté de monter les français les uns contre les autres. Ils n’ont pas appelé à faire des ratonnades et n’en ont pas l’intention. C’est plutôt LFI, en désignant les français blancs contre des êtres pervers, racistes, étrangers au vrai peuple car indignes d’en faire partie, qui sème les ferments de la discorde. Après la haine de classe, la haine de race lui sert de substitut. Quel progrès ! Heureusement que toute la gauche n’est pas comme cela. N’est pas comme vous.
Réfléchissez avant de haïr, et non l’inverse comme vous faites. Cela vous évitera déjà de perdre des occasions de vous taire.
Allez. Trouvez moi une parole prononcée par un membre de LFI qui « désigne les français blancs comme des êtres pervers et racistes ».
Mélenchon, hier sur X : ‘Ruth Elkrief. Manipulatrice. Si on n’injurie pas les musulmans, cette fanatique s’indigne. Quelle honte ! Bravo Manuel Bompard pour la réplique. Elkrief réduit toute la vie politique à son mépris des musulmans.’
Ça vous va ? Le ministre de l’Intérieur a dû mettre Ruth Elkrief sous protection policière.
Erratum. Comme au lieu de contre.
Les dernières révélations du Parisien et de BFM montrent que ce n’est pas aussi simpl(ist)e que cela at que des deux côtés, les relents racistes de classe étaient bien présents. Mais c’est tellement mieux quand la réalité correspond aux fantasmes de l’extrême-droite.
Un génocide est en cours en Palestine
Il est donc urgent de faire encore une fois une manifestation contre l’antisémitisme.
Je vous suggère de revenir à la définition du mot « génocide » avant de l’utiliser.
N’oublions pas qu’il existe entre 800 et 1200 fichés S d’extrême droite dans les tiroirs du ministère de l’intérieur. Les médias n’en parlent pratiquement pas. Si ils sont fichés S, c’est sans doute parce qu’ils sont ultra gentils et ultra fraternels….
A Gaza, après le massacre inqualifiable du Hamas fanatisée par les fondamentalistes islamistes, la « réplique » de l’armée et du gouvernement d’extrême droite de Netanyahu s’est d’abord fondée sur une vengeance immédiate et implacable. Aujourd’hui après une trêve humanitaire d’une semaine, il s’agit d’autre chose. Après avoir obligé les Gazaouis à se réfugier massivement au Sud, l’armée israélienne bombarde massivement le Sud, sans foi et sans loi, pour liquider les plus possibles de palestiniens sans distinction. Hier, le gouvernement israélien a voté une rallonge budgétaire pour les colons de Cisjordanie au mépris de toutes les résolutions de l’ONU. D’une situation d’apartheid ( actes inhumains dans l’intention de dominer un groupe humain différent) , l’armée israélienne est passée à une situation d’envahisseur de terres qui ne lui appartient pas.
En somme, Netanyahu et son armée utilisent à Gaza les mêmes méthodes que Poutine et son armée en Ukraine : invasion, bombardements massifs, mort de civils, d’enfants et de femmes. Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, appelle à un « cessez le feu car la population est au milieu d’une catastrophe monumentale sous les yeux du monde ». Qui peut encore justifier ces guerres ?
Toujours est-il que c’est un parti d’extrême-gauche, LFI, qui a refusé de qualifier le Hamas d’organisation terroriste. Tandis qu’un autre parti d’extrême-gauche lui-aussi, le PCF, le faisait. Il est un peu facile de faire des amalgames. Insinuer que islamisme = extrême-droite est un raisonnement expéditif et sommaire, tout comme terrorisme = extrême-gauche. Il faut savoir à qui et à quoi imputer des responsabilités.
Franchement je ne vois pas sur quelles bases on peut qualifier LFI et PCF de partis extrêmes. Ou alors il fait admettre que plus de 20% des électeurs français sont des fans de l’extrêmisme. L’extrémisme incite et pratique la violence politique. Dans ce cas, les partis politiques de la majorité présidentielle qui ont soutenu les pratiques policières lors de l’épisode des gilets jaunes sont des partis extrémistes : manifestants éborgnés, mutilés, gravement blessés et même quelques morts , au point que de nombreuses organisations humanitaires européennes et internationales ont condamné l’usage des armes détenues par la police française. Je n’ai pas souvenir que JLM ou Roussel aient appelé qui que ce soit à prendre les armes.
Non moins franchement, sur quelles bases peut-on soutenir que le RN est un parti extrémiste ? Il n’est pas possible d’affirmer que 30 % des français sont extrémistes et qu’il est donc juste de les exclure à jamais de l’espace politique, de leur interdire de gouverner même s’ils sont en mesure de former une coalition majoritaire au parlement. Le RN n’a jamais appelé personne à prendre les armes.
Mais regardez. Le PCF est un parti révolutionnaire, favorable à l’instauration à terme d’un régime socialiste, c’est-à-dire un régime de parti unique. Un régime fondé sur la violence, sur la suppression des libertés publiques. Vous fâcheriez un communiste en lui disant qu’il n’est plus révolutionnaire depuis le temps qu’il est obligé de vivre dans la démocratie bourgeoise, que pourtant il exècre. Tout révolutionnaire par définition est un extrémiste.
Toujours vos obsessions viscérales, mortifères et anti-dèmocratiques…Pour quelqu’un qui se gargarise de démocratie, l’exclusion du champ républicain, d’une quelconque organisation politique est la démonstration d’une idéologie passéiste qui fait le jeu de l’extrême droite. Il y a sans doute fort longtemps que vous n’avez pas lu le programme du PCF ou l’avenir en commun de LFI. Par contre pas un mot sur les fichés S de l’extrême droite ( classement officiel du ministère de l’intérieur) , pas un mot sur les dérives sectaires et racistes du RN et de la droite ciotiste, pas un mot sur les sinistres préfets de police français Papon et Lallement soutenus par la majorité présidentielle, pas un mot sur les conditions de détention en France ( tous détenus confondus), par exemple, pas un mot pour Georges Ibrahim Abdallah le plus vieux prisonnier politique du monde dans une prison française ( Lannemezan), depuis près de 40 ans, alors qu’il est libérable depuis 10 ans et que les ministres de l’intérieur français refusent son expulsion vers son pays d’origine, le Liban. De fait et dans les mots, vous vous excluez vous-même de la famille des vrais démocrates, vous appartenez au camp de ceux qui se couchent ou collaborent avec les pires ennemis d’une république libre, égale, fraternelle et laïque. Je vous plains, car vous devez beaucoup souffrir de vos troubles obsessionnels idéologiques. Votre décrochage sur les réalités politiques de notre temps est vertigineux. Néanmoins , je vous souhaite le bonjour.
Vous n’êtes pas médecin si je ne m’abuse et de toutes façons je ne suis pas malade de ne pas partager vos opinions. Aussi votre réaction est déplacée. Être opposé au socialisme n’est pas une maladie. Du moins en régime démocratique. C’en est une il est vrai dans le régime socialiste : un opposant souffre de troubles obsessionnels, il doit être soigné (au besoin de force), les gargarismes qu’il s’administre lui-même ne sont que des potions passéistes. Il répand la mort et n’a pas de cerveau, mais des viscères. Ces attaques sont sans objet.
La démocratie ne distingue pas dans le corps civique, les vrais démocrates des faux. Tous les citoyens ont les mêmes droits. Et c’est vous qui parlez d’égalité en commençant par faire une hiérarchie parmi eux ? Pour votre gouverne je vous apprends qu’il n’y en a pas.
Je n’ignore pas les manquements dont tous les gouvernements français se sont rendus responsables. Vous les citez, en vous indignant à juste titre. Je m’indigne autant que vous. Mais je n’ignore pas non plus les crimes des régimes socialistes. Que ces régimes aient aujourd’hui disparu en Europe ne disculpe pas, par la grâce de l’oubli, ceux qui les ont soutenus. Le devoir de mémoire n’est pas un trouble obsessionnel mais une exigence morale. Vous avez la confusion facile. Et la mémoire courte.