Qui aura la peau de François Bayrou ?

Les emmerdes volent en escadrille de toute part et le premier ministre ne rompt pas. C’est à se demander s’il ne serait pas touché par la grâce.
Évoquons d’emblée le « scandale » du conclave sur les retraites. Pour s’installer dans son nouveau poste de premier ministre, François Bayrou avait lâché une concession en direction de la gauche : la réforme des retraites est rouverte à la négociation. Un « conclave » est convoqué. Ces réunions entre partenaires sociaux devaient se faire « sans tabou ni totem » sur la base d’un audit confié à la cour des comptes. Bien vite, dans un courrier adressé aux syndicats, François Bayrou dresse une première ligne rouge : le retour à l’équilibre financier en 2030. Force ouvrière claque la porte le lendemain. L’âge légal du départ possible à la retraite fait encore partie de la négociation. Le 16 mars, nouvelle limite : pas touche à l’âge légal de départ. La CGT menace de quitter la table.
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François Bayrou serait un homme de droite. « Qui aurait pu prédire ? » ironise Marine Tondelier – cette même secrétaire nationale des Écologistes qui pourtant se félicitait « des petits pas qui sont faits » en janvier ? En vérité, au-delà même de la sensible question des retraites, le maire de Pau enchaîne les bonnes raisons de le censurer.
N’est-ce pas lui qui laisse le couple Darmanin-Retailleau jouer les surenchères de propositions extrémistes et se prendre l’un et l’autre pour le ministre des affaires étrangères ? Ils ont tellement de latitude qu’ils peuvent l’humilier de menaces de démission – çà et là ! Mais n’est-ce pas lui-même qui aggrave la crise diplomatique avec l’Algérie ? N’est-ce pas lui qui flirte avec l’extrême droite en reprenant ses mots – « submersion migratoire » –, faisant fi des données de l’Insee ?
François Bayrou avait entamé sa mission à Matignon par une polémique : un déplacement à Pau en plein ouragan sur Mayotte. Celui qui vit par le couac périra-t-il par le couac ?
Vive le socle commun !
Reprenons. François Bayrou n’a pas de majorité à l’Assemblée – tout comme Michel Barnier –, mais il agit comme s’il l’avait oublié. Enfin aux affaires, après une vie de conquète du pouvoir, il se croit frappé par la grâce. Le premier ministre peut même se payer le luxe de mépriser les socialistes – ceux-là même qui n’ont pas voté la censure –, comme s’il possédait une quelconque marge de manœuvre. Son « camp » n’existe pas. Édouard Philippe avance ses pions et raille « une France engluée dans un immobilisme dangereux ». Laurent Wauquiez, en guerre avec Bruno Retailleau pour la présidence des LR, fait de son mieux pour affaiblir le gouvernement : « Nous avons reçu le programme législatif, il n’y a rien ».
Et c’est vrai, quelle est la réalité du socle commun ? Aucun accord, aucun pacte, aucun projet. Malgré tout ça, François Bayrou a survécu à six motions de censure, dans un dilettantisme ahurissant.
On se moque de Michel Barnier, le premier ministre qui n’aura tenu que trois mois et huit jours à Matignon. François Bayrou en est à trois mois et cinq jours…
Le scandale Bétharram devrait être la goutte d’eau d’immondices qui fait déborder le vase. Mais là encore, toujours rien…
Alors pourquoi ? Pourquoi diable Bayrou n’a toujours pas sauté ? Parce que les socialistes lui ont sauvé la peau ? C’est vite oublier que le sauvetage vient avant tout du Rassemblement national. La tête à Bayrou, ça n’intéresse pas Marine Le Pen, laquelle attend des élections – présidentielle ou, à défaut, législatives –, pour remporter la mise. Et surtout, le PS l’avait martelé : leur non-vote de la censure découlait principalement de leur défiance à l’égard d’une dissolution de l’Assemblée nationale voire d’une démission du président de la République. Ils n’étaient pas prêts et redoutaient la victoire du RN. Un risque qu’ils n’ont pas voulu prendre. Ça s’entend.
Comme on n’a pas trouvé UNE VRAIE bonne raison de sauver le soldat Bayrou, on vous livre des hypothèses. François Bayrou est toujours premier ministre car :
- Pau est proche de Lourdes et donc, miracle !
- Macron a épuisé tout son stock de paratonnerre…
- c’est pas encore l’été et l’Assemblée ne peut pas encore être re(dissoute)
- les socialistes ne sont pas prêts, leur congrès n’a pas eu lieu.
On attend vos suggestions.
On se moque de Michel Barnier, le premier ministre qui n’aura pas eu le temps de faire quoi que ce soit, mais le bougre a tenu trois mois et huit jours à Matignon. François Bayrou en est à trois mois et cinq jours…