« 100 jours de zbeul » : un Intervilles des casserolades pour contrer l’apaisement macronien

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« La Macronie ne sera jamais tranquille », un mot d’ordre qui fait sens dans nombre esprits français. Au point de lancer un concours à qui réservera le pire accueil de macronistes sur son territoire.

Négocier ? Ni l’Élysée, ni Matignon, ni le ministère du Travail n’ont mis en œuvre le moindre « dialogue social » avec les représentants syndicaux. Voter ? Les députés n’ont pas eu le loisir d’exprimer, par leur voix, celle des Français, l’exécutif préférant activer le 49.3 afin d’éviter de perdre. Manifester ? Au mieux, Emmanuel Macron s’en fout – « Ce sont toujours les mêmes, à quelques dizaines de milliers près, qui manifestent » –, au pire, il réprime. Comme il n’y a plus rien à faire, reste le geste. Comme il n’y a plus rien à dire, reste le bruit.

 

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Voilà comment les manifestants en sont venus à sortir leurs casseroles. L’outil peut paraître anodin ; la référence peut sembler malvenue ; il n’empêche que l’effet escompté est magistral : le monarque-républicain, gêné dans ses orifices auditifs, use des diverses lois antiterroristes pour… faire interdire les « dispositifs sonores portatifs » – ne faut-il pas être un esprit détraqué pour en venir à de telles définitions ? Le pouvoir assume peu ou prou. En public, Gérald Darmanin assure que « les casseroles ne sont pas interdites », que ce sont les gendarmes qui n’avaient pas bien compris l’arrêté préfectoral – d’ailleurs, sont désormais officiellement interdits les « dispositifs sonores amplificateurs de son »… Mais dans l’enceinte du tribunal administratif d’Orléans, l’on rapporte que la préfecture maintient qu’elle souhaite interdire les casseroles au motif qu’elles seraient… des armes par destination.

Le Karl Marx du 18 Brumaire de Louis Bonaparte, lequel énonçait que « tous les grands faits et les grands personnages de l’histoire universelle adviennent pour ainsi dire deux fois… la première fois comme tragédie, la seconde fois comme farce », ce même Karl Marx est aujourd’hui complètement dépassé par Emmanuel Macron !

Mais quoi qu’en pense le chef de l’État, taper sur une casserole à la française, c’est tout un sport, et ça a même un nom : l’Intervilles du zbeul[[Zbeul = bordel, désordre.]], mis en place par le syndicat Solidaires[[Big up également au compte Twitter @Interville2023.]].

Il y a un site (100joursdezbeul.fr), il y a des règles du jeu (elles sont ici) et il y a un classement par département (c’est ). Et puis c’est tout. L’idée est simple : perturber au maximum les déplacements des membres de la Macronie, du chahut à l’annulation de la visite en passant par la coupure d’électricité, et on compte les points, points bonifiés selon l’importance de la personnalité. Une compétition qui va de pair avec la carte des mobilisations d’Attac.

Et les scènes de « zbeul » se multiplient. En voici quelques exemples :

  • le 14 avril, la Première ministre Élisabeth Borne en Eure-et-Loir ;
  • le 17 avril, le ministre de la Santé François Braun en Gironde et le ministre de l’Industrie Roland Lescure dans la Loire ;
  • le 19 avril, le ministre de l’Écologie Christophe Béchu dans la Sarthe ;
  • le 21 avril, la ministre chargée des PME, du Commerce, de l’Artisanat et du Tourisme Olivia Grégoire en Loire-Atlantique ;
  • le 23 avril, le député Jean-Marc Zulesi, en Provence ;
  • le 24 avril, le ministre de l’Éducation Pap Ndiaye à Paris ;

Emmanuel Macron est, tout naturellement, la cible préférée des manifestants. Cela fait des semaines que chacune de ses sorties se déroule selon le même schéma : évacuation policière de la zone ; arrivée du Président ; un ou plusieurs manifestants réussissent malgré tout à s’approcher et s’expriment, parfois d’une façon véhémente ; répression, violences policières, poursuites judiciaires.

Notons tout de même que le bougre adapte sa défense match après match. Ainsi, ce 25 avril, en déplacement dans le Loir-et-Cher, le Président est venu avec son propre groupe électrogène.

Tout aussi naturellement, la Macronie goûte très peu à ces interférences – il faut dire que ça leur change de la déférence médiatique. Ainsi, le député Zulesi a fait savoir qu’il comptait porter plainte face à ce qu’il qualifie d’« acte anti-démocratique fort ».

De son côté, la ministre chargée des collectivités territoriales et de la ruralité, Dominique Faure, visiblement en mal de notoriété, s’est félicitée ce 25 avril d’en être « à [s]on 53ème déplacement, sans casserole pour l’instant ». Comme quoi, on peut jouer des deux côtés du cordon de CRS !

Selon le patron des sénateurs macronistes François Patriat, « les Français vont se lasser de ces manifestations ». On prend les paris ?

 

Loïc Le Clerc

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