Netanyahou n’a pas sa place à la télévision mais en prison
Le Premier ministre israélien a livré une interview à la chaîne d’info en continue LCI, ce 30 mai. Pour défendre l’indéfendable.
L’histoire retiendra qu’une chaine de télévision française a offert son antenne à un criminel, Benyamin Netanyahou, pour défendre l’indéfendable. LCI semble fier de son coup médiatique, un entretien avec le premier ministre israélien, alors même que le procureur général de la Cour pénale internationale a demandé l’émission d’un mandat d’arrêt contre lui pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité. Quitte à donner la nausée à toutes celles et ceux qui ont conscience de la réalité à Gaza.
« Je ne veux pas tuer des Palestiniens, je veux tuer des terroristes », est-il venu prétendre, comme si nous n’avions pas vu les images des civils, des enfants, des innocents abattus aveuglément à Rafah et ailleurs. Grand seigneur, le premier ministre israélien a déclaré offrir des médicaments et de la nourriture plus qu’il n’en faut : « 3200 calories par personne, c’est 1000 de plus que ce qui est requis au quotidien ». Comme si nous étions sourds aux alertes inlassables des ONG sur un peuple palestinien affamé depuis des mois et des hôpitaux bombardés.
Ce qu’est venu faire Netanyahou sur LCI, c’est surtout un prêche de guerre civilisationnelle visant à légitimer ses crimes. Car toute sa rhétorique tend à amalgamer Palestiniens et terroristes, à gommer l’histoire de la colonisation israélienne et à empêcher la reconnaissance de l’État de Palestine. « Si vous leur donnez maintenant un État ce sera la meilleure récompense possible au terrorisme », a-t-il asséné. « Notre victoire, c’est la victoire d’Israël contre l’antisémitisme, c’est la victoire de la civilisation Judéo-Chrétienne contre la barbarie, c’est la victoire de la France », a-il poursuivi. Et clou du sinistre spectacle : « Rafah, c’est l’équivalent du débarquement de Normandie avant l’attaque contre l’Allemagne ».
Arrêter les massacres
Aussi horrible fut-elle, l’attaque du 7 octobre ne peut absoudre la violence meurtrière de Netanyahou. La libération des otages, revendication que je fais mienne, ne saurait servir de prétexte au massacre des Palestiniens. Notre regard sur le Hamas et sur le développement d’un islamisme politique hautement réactionnaire dans cette région doit être lucide. Le Hamas s’est greffé sur la colère d’un peuple opprimé, aux droits et à la dignité niés, pour porter un projet d’encadrement religieux et se doter d’une branche armée qui commet des actes terroristes. Mais l’effroyable tuerie des Israéliens du 7 octobre ne peut en aucune manière donner raison au massacre de tout un peuple. Un peuple qui souffre depuis trop longtemps de la colonisation, du blocus, des humiliations. Un peuple qui subit la complicité internationale à l’égard du gouvernement israélien et l’incapacité à faire respecter le droit.
Aujourd’hui, c’est toute la violence de l’extrême droite israélienne qui se révèle au grand jour. Et elle est assumée par l’état-major militaire et les responsables politiques au pouvoir. Car la frappe de dimanche, comme la fusillade au Checkpoint de Rafah lundi, la poursuite des bombardements heure par heure, sans interruption, ne sont pas une étape particulière d’une guerre conventionnelle. Elles sont l’illustration de la folie meurtrière contre le peuple palestinien qui anime Benjamin Netanyahou et ses affidés. Elles sont aussi le signe d’un profond mépris pour le droit international, et à travers celui-ci, de tout mécanisme de coopération supranationale.
Le droit international comme bouclier
Bombardements délibérés de populations civiles, famine organisée du fait du blocus total de la bande de Gaza, destruction méthodique de toute infrastructure… En décembre dernier, l’Afrique du Sud a engagé une procédure contre Israël pour non-respect de la « Convention pour la prévention et la répression du crime de Génocide », considéré depuis la Shoah fort légitimement comme l’acte criminel suprême, annihilant toute humanité. L’ONU a mis en garde contre le risque génocidaire à l’encontre des Palestiniens. Nous touchons là à des « normes impératives » du droit international, c’est-à-dire s’imposant à l’ensemble des États, peu importe qu’ils aient signé les conventions en vigueur ou non. Voilà ce que l’humanité peut produire de meilleur : un engagement à vocation universelle, celui de ne plus jamais laisser de population, après les Arméniens, les juifs d’Europe et les Tutsis, se faire massacrer dans le silence et la nuit.
Mais l’Occident a été incapable, au lendemain du 7 octobre, de tenir la seule position juste : libération des otages enlevés par le Hamas ET cessez-le-feu immédiat, se réfugiant dans un « soutien inconditionnel » aveugle et qui a contribué à nous couper encore davantage de la société internationale.
La procédure engagée par l’Afrique du Sud en est au stade des « exceptions préliminaires », c’est-à-dire qu’il n’a pas encore été statué sur le fond de savoir si l’État d’Israël est en train de commettre « un génocide ». Cependant, la Cour de justice internationale a estimé que le risque était d’ores et déjà tellement élevé qu’il fallait prendre d’importantes mesures pour garantir qu’il n’y ait pas de génocide. Malheureusement, rien n’y a fait, la suite est connue : l’armée israélienne a persisté dans la barbarie, à tel point que la Cour Internationale de Justice demande désormais un arrêt immédiat de l’offensive. À son tour, le procureur de la Cour Pénale Internationale a fait part du caractère inadmissible de la situation en demandant que soient émis des mandats d’arrêts à l’encontre des dirigeants du Hamas et de Netanyahou.
Le droit international, qui se fonde sur la coopération entre États souverains plutôt que sur une logique de coercition, est bafoué par les autorités israéliennes. Face à cette situation, c’est de courage politique dont nous avons besoin.
La France à rebours de l’histoire
Avant-hier, l’Espagne, la Norvège et l’Irlande ont reconnu de manière coordonnée l’existence de l’Etat de Palestine, reconnu désormais par près de 150 États. Manquent à l’appel les principales nations occidentales.
Longtemps la France été considérée comme ayant un leadership sur la question, et plusieurs pays européens attendaient une initiative forte de notre part pour enfourcher le pas. Voilà une nouvelle conséquence de l’incurie diplomatique d’Emmanuel Macron qui démonétise chaque jour un peu plus notre crédibilité sur la scène internationale.
Au lieu de reconnaître l’État de Palestine et de cesser de vendre des armes à Israël, la macronie choisit la sanction maximale – 15 jours d’exclusion – contre mon collègue Sébastien Delogu, qui a osé brandir le drapeau palestinien au sein de l’Assemblée pour briser la novlangue gouvernementale. Mais quelle honte ! En Italie, pays gouverné par l’extrême droite, une trentaine de député.es progressiste faisaient le même geste sans en être inquiétés. Décidément, le débat politique et démocratique en France est dans un état déplorable.
À rebours du sens de l’histoire, Macron tente comme d’habitude de se rattraper aux branches, et il le fait mal comme d’habitude. Sa dernière trouvaille : demander à l’autorité palestinienne des « réformes » avant de bien vouloir considérer sa reconnaissance officielle. Comme s’il était en position d’exiger quoi que ce soit à l’égard d’un peuple qui joue sa survie. Après sa gestion désastreuse de la crise en Nouvelle-Calédonie, il endosse à nouveau le costume néocolonial du dirigeant occidental faible avec les forts et forts avec les faibles. Alors que le monde vit une période de désoccidentalisation, que les pays du Sud ne veulent plus du système dont nous avons tant abusé, il démontre s’il en était besoin qu’il ne comprend rien au moment.
Il est temps, plus que temps de rompre avec la position erronée qui a cours en France depuis Sarkozy et de renouer avec une politique ayant pour boussole le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. L’urgence, c’est d’affirmer avec force que le droit international prévaut et que la France doit exécuter les mandats d’arrêts de la CPI s’ils sont promulgués, reconnaitre immédiatement l’Etat de Palestine, et s’engager sans relâche pour la paix au Proche-Orient qui implique la justice. C’est la seule voie qui peut garantir la sécurité et la dignité des peuple palestiniens et israéliens.
Tout est dit. Rien à ajouter. Merci Clémentine pour cette analyse claire et lucide.
Dès le 7 octobre la France Insoumise nous a permis de comprendre le piège dans lequel les défenseurs du camp occidental voulait nous faire tomber et qui nous expliquaient qu’il s’agissait d’un conflit de civilisation, du bien contre le mal, de musulmans contre des juifs, de terroristes contre une démocratie attaquée. Il n’y aura pas de fin à ce conflit tant qu’on ne reconnaîtra pas à un peuple le droit d’avoir un État. Oui il faut reconnaître l’État de Palestine et il est urgent de trouver une solution politique à ce conflit pour faire cesser immédiatement ce massacre. Macron n’a rien compris et il déshonore la France par son mutisme et son incompétence, tout comme il n’a rien compris à la situation des kanaks en Nouvelle-Calédonie, qui ont dans leur conscience collective la marque indélébile des violences coloniales.
Oui tout est dit. Merci Clémentine pour cet article éclairant sur la situation en Palestine et ses enjeux. Macron et son gouvernement ne sont pas à la hauteur.
Je ne pense pas que Macron et sa clique n’aient rien compris, ou qu’ils ne soient pas à la hauteur. Ils sont, tout simplement, des petits (à tous les sens du mot « petit » !) VRP du système libéral/capitaliste. Ils sont mandatés par les décideurs de ce système, maintenu en survie artificielle, pour tenter de le prolonger. A ce niveau, c’est de l’acharnement thérapeutique.
Ils sont largement aidés dans cette tache par les milieux financiers et médiatiques. Avec, si besoin, en dernier recours (souvent même en premier recours !), les milieux répressifs à leur botte.
Le ‘système libéral/capitaliste’ est selon vous à l’agonie, serait même mort si des thérapeutes ne s’acharnaient pas à le maintenir artificiellement en survie. S’inscrit-il dans une alternative, face à un opposé constitué d’au moins un Etat ? Si oui, quel est-il ? Si non, tous les Etats dans le monde vivent selon ce système, et il est alors difficile de parler d’agonie, à moins de promettre à l’humanité une fin prochaine.
Le système soviétique, aussi, paraissait solide et immortel, avec ses défilés de chars, etc… quelque temps encore avant sa chute ! Personne n’aurait parié sur une telle fin. Et si rapide!
Bien sur, la mort du capitalisme n’est pas pour demain matin, hélas. Mais, parfois, les changements peuvent s’accélérer, sans que personne ne puisse rien voir venir.
Je sens comme une pointe d’inquiétude, à l’idée d’être privé de ce magnifique système, auquel vous semblez tellement attaché….
Rassurez vous: on va encore se le trimballer, ce boulet, pendant un temps. Et, si les Peuples ne le détruisent pas, il s’autodétruira par ses outrances.
Le risque étant qu’il entraine la planète entière dans sa chute, comme vous l’évoquez. Ce qui n’a rien d’impossible.
Je suis attaché à la démocratie, au régime parlementaire. Le capitalisme n’est pas un régime politique. Je ne dirais ni qu’il est magnifique, ni que j’y suis attaché. Au demurant vous ne répondez pas à la question de son remplacement. Vous devriez pourtant vous l’être posée si vous conjecturez sa fin.
« Face à cette situation, c’est de courage politique QUE nous avons besoin. »
Hé oui, mais malheureusement, de courage « en » Politique, Macron n’en a pas! Il n’a de courage que pour réprimer et opprimer les plus faibles de son pays (retraites, chômage…); il n’a donc tiré aucune leçon de la soi-disant « guerre du bien contre le mal » d’il y a 20 ans déjà et qui a amené le Monde ds un état de guerre permanente!…
C’est la nausée, l’écœurement permanent; heureusement que quelques uns et unes sont clairvoyants, dont Mme Tricot et Mme Autain, (awake, rien que pour énerver les droitistes!) merci!
Oui à démocratie, à condition de respecter l’étymologie du mot. Dans la plupart des démocraties occidentales avec régime parlementaire, la voix populaire est toujours ignorée voire bafouée. Premier exemple, les États Unis, la course à l’investiture est en réalité une course au fric soutenue par les milliardaires, aucune chance d’être élu pour un candidat sans ce soutien. Du coup, on en arrive à élire des présidents populistes, dangereux et qui n’ont rien à faire des revendications sociales ( exemple, le bouffon Trump). Second exemple, présentée comme la plus grande démocratie du monde, et qui voit arriver à sa tête un premier ministre autocrate, raciste, islamophobe…De fait, dans la plupart des démocraties dites occidentales, quelque soit le régime politique, les élus sont très majoritairement des valets du pouvoir économique capitaliste. Ne parlons pas des républiques fondées sur des bases religieuses ( les rèpubliques islamiques ) ou celle dirigées par des partis quasi uniques, lesquels composent avec tout autant de corruption avec le capitalisme, en Russie et en Chine par exemple.
En France, et pour les leaders des listes européennes je note que plusieurs candidats ou candidates déclarent qu’ils veulent se débarrasser du grand capital (LO), sortir des accords de libre échange et taxer les superprofits ( LFI), taxer les superprofits des multinationales ( PS), remettre en cause les traités de libre -échange ( PCF), reprendre en main les entreprises du pétrole et du gaz (Ecolo). Il y a là, une base pour un rassemblement futur , à gauche.
Concernant les institutions, Arnaud Montebourg avait proposé de changer la constitution ( 6ième République ), l’idée a été reprise par JL Mélenchon…Il y avait là des pistes insuffisamment explorées, c’est dommage. N’oublions pas non plus, que François Hollande dans sa campagne avait déclaré que son ennemi était la finance… On connaît la suite !
Les Etats-Unis n’ont pas un régime parlementaire mais un régime présidentiel : il n’y a pas de premier ministre, pas de ministres non plus mais des secrétaires. Le chef de l’Etat, le Président des Etats-Unis, est en même temps le chef du gouvernement. Il ne peut dissoudre aucune des deux chambres du Congrès. La France a elle un régime parlementaire.
La Chine n’est pas une république mais une république populaire. République populaire signifie que le parti communiste est toujours au pouvoir, titulaire du rôle dirigeant de par la constitution. Être communiste, c’est défendre le principe d’un tel régime.
. Quel que soit le système, régime présidentiel, république islamique, république populaire, république parlementaire, ou royaume, il y a un dénominateur commun : le pouvoir économique dominé par les multinationales et la finance mondialisée . Ne pas voir cette constance ou feindre de ne pas la voir, est une lourde erreur politique. Hollande a dénoncé la finance mais n’a pris aucune mesure pour la combattre véritablement, Glucksman est sur la même ligne…Emmanuel Macron, Donald Trump, Joe Bidden, , Randedra Modi, Richie Sunak, Ali Khameni, Xi Jinping, Wladimir Poutine, Javier Milei, etc…exercent tous dans des régimes politiques différents, mais, soit ils vivent directement ou indirectement du capitalisme sous sa pression, soit ils s’en accommodent, soit ils le favorisent. Pour en revenir à la France, le jeu de Bolloré est particulièrement significatif : pas besoin de se présenter aux élections, il prend le pouvoir médiatique avec l’argent pour pouvoir, puis il place ses ami.e.s réactionnaires, conservateurs et racistes dans les rouages de la vie publique et politique, ils voteront les lois en fonction de ses intérêts. C’est ce système médiatico-écono-politique dont il faut se défaire, Sans ce changement possiblement « radical » ou » révolutionnaire » , le mot ne doit pas faire peur, la démocratie n’est qu’une démocratie de façade.
Et je note, que tous ces dirigeants, vont à leur office religieux, prient, prêtent serment sur les textes sacrés…pour mieux « plumer » celles et ceux qui croient à leurs belles paroles…Mais c’est encore un autre sujet !
Dans une démocratie qui ne soit pas de façade, qui aura le pouvoir ? Quel parti ? Que feront les autres partis qui ne l’auront pas ? Resteront-ils inertes ou essaieront-ils de l’avoir à leur tour ? Si quelqu’un est habilité à dire qu’il y a un parti meilleur que les autres, que le pouvoir doit lui être dévolu sans partage pour conduire le peuple vers des lendemains qui chantent et qu’il le gardera après qu’ils seront advenus, ce quelqu’un doit être un grand génie, un surhomme, voire un demi-dieu, peut-être même un dieu tout court. Ses adeptes, investis par Lui d’une mission révolutionnaire auront bien eu raison de croire Ses belles paroles, de prêter serment sur Ses textes sacrés et de les appliquer à la société tout entière.