Illibéralisme partout, démocratie nulle part

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Partout dans le monde, en Serbie, en Turquie, en Israël et en France, les droites conservatrices s’engagent dans un mouvement de contestation des règles qui régissent notre vivre-ensemble. Et ça braise.

Ces derniers jours, Israël a connu parmi ses plus grandes mobilisations. À l’été 2023, la société israélienne était déjà descendue en masse pour s’opposer à la limitation des pouvoirs de la Cour suprême. Benyamin Netanyahou remet ce projet sur la table, doublé de décisions particulièrement choquantes. Les Israéliens soupçonnent le limogeage de Ronen Bar, chef du Shin Bet, le service de sécurité intérieure, d’être motivé par le seul maintien au pouvoir du corrompu premier ministre. Le vote de défiance du gouvernement à l’encontre de Gali Baharev-Miara, procureure générale du pays, qui s’oppose à l’effectivité de ce limogeage tant que les recours ne sont pas épuisés, est une pièce de plus dans le dossier des pratiques autoritaires du gouvernement d’alliance Likoud-extrême droite. Ce pays dérouté, inquiet, divisé sur la guerre à Gaza et aux Palestiniens, se rebelle pour défendre son État de droit. 


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Plus au nord, en Turquie, depuis l’arrestation spectaculaire du maire d’Istanbul mercredi dernier, chaque soir des centaines de milliers de Turcs se rassemblent pour s’opposer à ce qu’ils vivent comme une atteinte inacceptable à la démocratie. Ce week-end, près de 15 millions d’entre eux ont participé à une primaire du parti du maire pour lui apporter un soutien symbolique : il est désormais le candidat à la présidentielle de son parti. Le mouvement fait tâche d’huile et désormais c’est dans toute la Turquie que se tiennent ces rassemblements qui tournent à la contestation globale du régime de l’AKP.

En Serbie, voilà des semaines que les étudiants ont entrepris de sillonner leur pays pour s’opposer à la corruption de leur gouvernants. Leurs marches sont ponctuées de puissants rassemblements pour le retour à l’État de droit.

Malgré la guerre, les grandes difficultés de la vie quotidienne et les incertitudes du monde, ces peuples veulent préserver des droits politiques et refusent l’autoritarisme et la corruption des gouvernants.

En osant présenter des textes dont ils savent qu’ils contreviennent à la constitution, les ministres d’Emmanuel Macron participent à la fragilisation de l’État de droit en délégitimant le Conseil constitutionnel et en l’exposant aux accusations de pouvoir des juges contre la démocratie.

Pendant ce temps, les oligarques américains s’installent et mettent en pièce des fondements de leur démocratie. La constitution américaine, leur trophée sacré, est attaquée et malmenée par un président qui se croit au-dessus d’elle au nom de son élection. La bataille sera rude avec les juges fédéraux et dans les États. Bernie Sanders a entrepris une vaste tournée dans les États américains pour contester d’une même voix l’oligarchie et les attaques contre la constitution et le droit.

Ici, en France, c’est devenu un concours Lépine pour déterminer qui sera le plus « illibéral » parmi les putatifs candidats présidentiels de droite. En visite chez les jeunes LR, Bruno Retailleau a confirmé ce qu’il énonçait dès son entrée au gouvernement, en septembre : « L’État de droit, ça n’est pas intangible ni sacré. […] La source de l’État de droit, c’est la démocratie, c’est le peuple souverain ». Soucieux de ne pas le laisser gambader seul sur les terres où se termine l’esprit démocratique, Laurent Wauquiez a renchéri. Tous deux réduisent la démocratie au vote et s’en prennent au pouvoir des juges. Pas question pour les deux candidats à la présidence de LR de laisser Édouard Philippe nager seul dans ces eaux troubles. Le maire du Havre, chouchou des sondages, n’a-t-il pas repris le week-end précédent les bonnes idées de Marine Le Pen prônant une modification de la constitution par référendum ? Gabriel Attal, qui ne veut pas qu’on l’oublie, propose lui aussi son référendum populiste pour défiscaliser le travail. Tous se prévalent du peuple qu’ils réduisent à dire oui ou non à une question dont ils gardent la formulation.

Ces attaques veulent s’affranchir de ce principe essentiel : soumettre la décision politique au droit. En osant présenter des textes dont ils savent qu’ils contreviennent à la constitution, les ministres d’Emmanuel Macron participent à la fragilisation de l’État de droit en délégitimant le Conseil constitutionnel et en l’exposant aux accusations de pouvoir des juges contre la démocratie.

La loi, y compris la constitution, se modifie. Mais au terme d’une délibération. L’apparence d’un surcroît de démocratie parce que directe avec le référendum n’y change rien : ce que pratiquent et proposent les différentes couleurs de droite est un affaissement de notre démocratie et non une vivification dont elle a besoin. Ces politiques et propositions illibérales réunissent les formations de droite à travers le monde. C’est un des enjeux du grand affrontement mondial.

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