Mathieu Molard : « Loïk Le Priol a été formé pour être un tueur »

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Samedi dernier à Paris, l’ancien rugbyman Federico Martin Arumburu a été assassiné de plusieurs balles dans le dos. Le principal suspect, Loïk Le Priol, a été interpellé en Hongrie alors qu’il tentait de fuir. Le rédacteur en chef de Streetpress, Mathieu Molard, est l’invité de la Midinale pour nous parler de l’itinéraire et des réseaux de ce militant d’extrême droite.

UNE MIDINALE À VOIR…

 

…ET À LIRE


Sur Loïk Le Priol
« Loïk Le Priol est un mec qui est militant d’extrême droite depuis de nombreuses années. Depuis dix ans, voire depuis sa naissance parce qu’il vient d’une famille d’extrême droite. Son père a été militant d’un groupuscule fasciste. »
« Loïk Le Priol s’est engagé très jeune dans l’armée. Il se retrouve dans une unité d’élite ou il est formé, formé à être un tueur. »
« Il a été envoyé en opération extérieure en Afrique notamment où il a été accusé d’avoir frappé et étranglé une prostituée. L’armée française a payé pour le tirer d’affaire et il a échappé à une condamnation. Et il ne sera pas renvoyé de l’armée pour ça. »
« Il a été renvoyé de l’armée après avoir été mis en cause dans une affaire sordide, extrêmement violente, une affaire de torture entre militants d’extrême droite. »
« Loïk Le Priol, Romain Bouvier [celui là même qui était avec Le Priol lors de l’assassinat de Federico Martin Aramburu] avec d’autres se sont rendus au domicile d’un de leur pote membre du GUD, pour le torturer. Les vidéos révélées par Mediapart sont extrêmement violentes. Elles sont insoutenables (…). Cette affaire date de 2015 et il n’a toujours pas été jugé pour ça. »

Sur les violences d’extrême droite
« L’extrême droite n’est pas surveillée de la même manière. Les attentats islamistes ont fait des centaines de morts et il peut paraître logique que les moyens déployés soient un peu différents. Il n’empêche que pendant des années, l’extrême droite radicale a été sous estimée par les services de renseignement. »
« Laurent Nunez, à la tête de la lutte contre le terrorisme dans les services du renseignement, a commencé à tirer la sonnette d’alarme s’agissant de l’extrême droite. »
« Ça fait deux ans que Laurent Nunez commence à dire que les services de renseignements assurent que ça commence à être chaud et commencent à avoir peur. On est loin du fantasme gauchiste. »
« Les services de renseignement ont démantelé plusieurs projets d’attentas réels. C’est là qu’ils prennent conscience qu’ils sont en retard sur la surveillance. Ils essaient de rattraper ce retard mais il y a encore du chemin. »
« Depuis quelques mois, il y a des interpellations après avoir mis des moyens récemment. »

Sur les organisations d’extrême droite
« On ne tombe pas au GUD par hasard. C’est quelques dizaines de membres même si le GUD s’est auto-dissout il y a quelques années. »
« Il y a une légende autour du GUD qui se surnomme les rats noirs (…). Donc quand on va au GUD, on sait qu’on y va pour la castagne autour d’un imaginaire néo-fasciste. »
« Il y a d’autres groupuscules d’extrême droite qui vont attirer des militants qui sont moins radicaux dès le départ et que le GUD va contribuer à radicaliser. »

Sur la cohérence du projet des groupuscules d’extrême droite
« Il y a des lignes de force qui évoluent dans le temps. Aujourd’hui en France, la ligne de force principale, c’est l’islamophobie et le fantasme du grand remplacement : c’est devenu la matrice de l’extrême droite dans quasiment toutes les chapelles. »
« Il y a quelques décennies, c’était l’antisémitisme qui était la matrice la plus prégnante. »
« Il y a des intellectuels qui théorisent l’extrême droite : Renaud Camus, Dominique Venner, Alain de Benoist… Ils sont très influents parce qu’ils influencent ces groupuscules mais aussi Eric Zemmour, Marine Le Pen, Marion Maréchal. »

Sur la surface médiatique du meurtre de Federico Martin Aramburu
« Le sujet est traité mais de façon très secondaire parce qu’il y a une dépolitisation du sujet car certaines rédactions considèrent que c’est un fait divers. Oui, ça l’est mais ce n’est pas ça qui empêche, de façon régulière, de faire monter un fait divers en une. »
« Il y a un itinéraire politique des deux principaux mis en cause qui les inscrit très clairement à l’extrême droite et qui traduit un processus de radicalisation vers la violence extrême qui, quand il s’applique à d’autres univers politiques, est pris en compte. »
« Je ne considère pas que c’est un attentat parce qu’il n’y a pas de volonté politique préméditée. Mais il y a une dimension politique parce que ce sont des militants d’extrême droite et que l’on peut considérer que l’idéologie dans laquelle ils baignent à contribuer à les amener là où ils sont, c’est-à-dire violents et haineux. »

Sur les liens de responsabilité entre les cadres de l’extrême droite et les violences
« Pour moi, ils ont une responsabilité – même si elle n’est pas directe dans cet assassinat-là. »
« Dans Streetpress, toutes les semaines, on raconte des agressions qui ont une dimension politique indéniable par des militants d’extrême droite : des coups de couteau à Lyon, les passages à tabac à Valence, en Bretagne, à Paris ou à Nice. »
« Les gens dont on parle ont des canaux de revendication de leur violence : qui a-t-il de plus politique que de commettre de la violence et, sur un canal qu’ils savent public, où ils savent très bien que les journalistes sont (c’est pourquoi ils floutent leur photo par exemple), de revendiquer leurs actions ? »
« Les gens qui véhiculent des discours de haine, qui soufflent sur les braises et qui arment idéologiquement ces gens-là, contribuent très clairement à la montée de la violence. »
« Si, depuis un an, on a une montée de la violence politique dans les rues, c’est parce que les discours racistes d’Eric Zemmour sont en boucle à la télévision. »

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