Législatives : pourquoi les jeunes ne votent pas ?

69% des 18-25 ans ce sont abstenus dimanche dernier. La NUPES y voit un réservoir de voix qui pourrait la rendre majoritaire.

« Je veux juste dire aux jeunes qu’il faudrait quand même qu’ils se mêlent un peu de leurs affaires, parce que c’est pas la peine de venir râler sur Parcoursup si après c’est pas pour voter pour ceux qui veulent l’abolir », a déclaré Jean-Luc Mélenchon devant les journalistes ce lundi 14 juin. Même son de cloche du côté de Sandrine Rousseau : « Dites, les 18/25 ans, soyons honnêtes, c’est un peu pour vous qu’on fait de la politique, là, et qu’on veut changer le monde. Alors, on compte sur vous… »

 

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Notons tout d’abord qu’il n’est pas certain que ce genre d’arguments soit susceptible de faire mouche pour mobiliser les jeunes : avoir, à leur égard, un rapport infantilisant et essentialiser une population comme si celle-ci devait nécessairement répondre aux appels électoraux de la gauche, pourraient même avoir l’effet inverse. Si la NUPES veut mobiliser le vote des jeunes, c’est parce qu’il constitue pour eux un important réservoir de voix. Quand ils votent, les 18-25 ans le font à 42% pour eux ! On comprend donc que les voir s’abstenir à 70% peut s’avérer rageant… Alors que les plus de 60 ans, eux, votent en majorité pour Emmanuel Macron et s’abstiennent nettement moins.

Pour résoudre ce paradoxe de la forte abstention, on peut avancer quelques propositions. D’abord, la déconsidération de toute une génération n’aide pas : elle peut être force de proposition autant que de contradiction. Et c’est même là l’une de ses forces : même si, au vu des tendances électorales, la gauche semble être la représentante naturelle des 18-35 ans, faire valoir leur droit de ne pas leur faire confiance, tout programme ambitieux qu’ils proposent, est une dimension que la NUPES devrait intégrer.

Allocation d’autonomie, augmentation des indemnités de stage, instauration d’emplois publics « jeunes » : c’est ce que plaident souvent tous les candidats NUPES quand on leur demande ce qu’ils prévoient pour la jeunesse. En réalité, c’est sûrement la manière dont les jeunes deviennent citoyens qu’il faut repenser. Pour participer à la vie politique – voter en premier lieu –, les propositions ne suffisent pas. Ce sont les compétences, le niveau d’informations et aussi, toujours le même problème, la place que l’on laisse aux citoyens pour s’exprimer, qui détermineront la motivation des citoyens à voter ou non.

En sociologie électorale, la question de la non participation est un classique. Daniel Gaxie et Pierre Bourdieu ont largement participé à étudier ce phénomène : selon eux, certaines catégories sociales se refusent le droit à la participation politique. À cause des effets des dominations sociales, les femmes, les ouvriers, les peu diplômés et les jeunes vont moins participer que d’autres à la vie politique. Le rôle du représentant politique n’est donc pas de dénoncer, du haut de sa position de domination sur le reste de la société, des citoyens que ne feraient pas le nécessaire pour voter mais il est au contraire primordial de leur donner la parole et de comprendre par quels procédés ils et elles pourraient être amenés à donner leur voix.

Quoiqu’il se passe dimanche, l’interrogation première doit être comment les citoyens, et donc les jeunes, vont participer à la démocratie dans les cinq années à venir. Dans notre Midinale du mardi 14 juin, Danielle Simonnet donne le la : « Le plus dur ce n’est pas de prendre le pouvoir mais de faire en sorte que le peuple l’exerce. »

 

Clément Gros

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