Coupe du monde au Qatar : pour la cérémonie d’ouverture, l’Occident sèche et la France envoie… Darmanin

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Une coupe du monde de football n’est pas qu’un événement sportif majeur, c’est aussi un haut-lieu de la diplomatie. Pour cette édition qatarie, les pays occidentaux ont préféré sécher la rentrée. Sauf la France, en la personne du ministre de l’Intérieur et des Outre-Mer.

Bon. Étant donné qu’« il ne faut pas politiser le sport » – dixit Emmanuel Macron –, c’est sans surprise que la France s’est rendue au Qatar, ce dimanche 20 novembre, pour assister à la cérémonie d’ouverture de la coupe du monde de football.

 

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Et qui a été choisi pour représenter la France ? Pas de président de la République – Macron a déjà dit qu’il ne se rendrait là-bas que si la France atteint les demi-finales de la compétition –, pas de ministre des Sports – Amélie Oudéa-Castéra « [s]e laisse encore un peu de flexibilité » et ne s’y rendrait qu’à partir des quarts de finale… Non, la France a choisi Gérald Darmanin. Une anomalie ?

Quel pays vont au Qatar ?

Assez logiquement, les pays voisins de l’émirat se sont plus déplacés que les pays d’Amérique latine. Le même schéma se retrouve d’ailleurs dans les précédentes éditions. Mais cette fois-ci, l’Occident s’est fait très très discret… Pour bien saisir l’ambiance géopolitique, il suffit de regarder la liste des invités d’honneur de la cérémonie d’ouverture de cette 22ème édition de la Coupe du monde de football :

Ils viennent en personne :

  • le président algérien Abdelmadjid Tebboune
  • le président égyptien Abdal Fattah Al-Sissi
  • le roi de Jordanie Abdallah II et son fils, le prince héritier Hussein ben Abdallah
  • le président libérien George Weah
  • le président palestinien Mahmoud Abbas
  • le président rwandais Paul Kagame
  • le prince héritier saoudien Mohammed Ben Salman
  • le président sénégalais Macky Sall
  • la président turc Recep Tayyip Erdogan
  • le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres

Ils envoient un représentant :

  • les Émirats arabes unis ont envoyé leur Premier ministre Mohammed ben Rachid Al Maktoum
  • l’Équateur a envoyé son vice-président Alfredo Borrero
  • l’Inde a envoyé son vice-président Jagdeep Dhankhar
  • le Kosovo a envoyé son ancienne Présidente Atifete Jahjaga
  • le Koweït a envoyé le prince héritier Mishal Al-Ahmad Al-Jaber Al-Sabah
  • le Liban a envoyé son Premier ministre Najib Mikati
  • Oman a envoyé son ministre des Sports (qui est aussi le prince héritier) Theyazin ben Haïtham
  • la Russie a envoyé son conseiller Igor Levitin
  • le Vénézuela a envoyé sa vice-présidente et ministre de l’Économie Delcy Rodriguez
  • les États-Unis envoie ce lundi le secrétaire d’État Antony Blinken

Ils n’y vont pas :

À titre de comparaison, la France s’était faite représenter par Nicolas Sarkozy à Moscou en 2018. Étaient également présentes des personnalités comme le président bolivien Evo Morales, l’ancien chancelier allemand Gerhard Schröder ou encore le président portugais Marcelo Rebelo de Sousa. En 2014, le président croate Ivo Josipović s’était rendu au Brésil et en 2010 Joe Biden, alors vice-président, était allé en Afrique du Sud.

Pourquoi Darmanin ?

Quand la France signe un gros contrat d’armement, par exemple, elle le fait habituellement en présence des ministres des Affaires étrangères, des Armées, voire de l’Économie. Mais envoyer l’Intérieur pour un événement sportif… Que les choses soient bien claires, représenter la France, n’importe qui peut le faire. Il suffit, comme Gérald Darmanin, d’y être envoyé « à la demande du président de la République ». Reste à savoir le message politique que cela renvoie.

« La ministre des Sports Amélie Oudéa-Castéra, qui occupe la 17ème place au rang protocolaire, ça ne faisait visiblement pas le poids. Donc on envoie un poids lourd du gouvernement : le numéro 3 Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, au prétexte qu’il ira visiter les 220 gendarmes et agents de la sécurité civile puisque la France a un accord de sécurité avec le Qatar », tente Alba Ventura comme explication dans son édito sur RTL.

Il est vrai que la France – outre sa participation active (et suspicieuse au regard de la justice) dans l’attribution du Mondial 2022 au Qatar – a pris sa part dans l’organisation de cette coupe du monde, et ce dans le secteur où elle excelle le plus : la sécurité. Place Beauvau, on se justifie de la sorte : « L’ambition française n’est pas de déployer des unités constituées en grand nombre mais d’apporter de l’expertise de haut niveau et de l’appui opérationnel spécialisé dans des domaines dits de « niche » couvrant le haut du spectre de la menace », lit-on dans Le Monde. Dans cet accord, l’émirat paye de sa poche les frais d’hébergement, de transport, et de nourriture, et prend même en charge la prime de déplacement qui sera versée aux agents français.

Pour la France, cette coupe du monde n’est donc premièrement pas un enjeu sportif, mais un test grandeur nature des JO 2024. Le dernier événement sportif majeur organisé à Paris – la finale de la Ligue des champions, au printemps dernier – avait tourné au fiasco tant l’autoritarisme policier avait primé sur tout le reste. C’est dire si nos forces de l’ordre ont besoin d’entraînement… Mais visiblement, cette stratégie sécuritaire rayonne bien dans un pays comme le Qatar.

 

Loïc Le Clerc

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