Ukraine : sur des bases pourries, les négociations s’engagent enfin

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Le président ukrainien est sommé d’accepter avant Thanksgiving le « plan de paix » des Américains. Ses alliés européens, faibles et veules, ne sont pas de la plus grande aide.

Restons prudents mais il semble qu’une fenêtre de négociation sur l’Ukraine s’ouvre. Il le faut absolument. La guerre s’éternise et devient de plus en plus coûteuse, notamment en vies humaines. Évidemment, la poursuite de la guerre n’apportera aucune solution stable aux questions posées : celles des frontières, celles de la sécurité à long terme de l’Ukraine, de la Russie, des pays européens, celles de la reconstruction et de l’avenir de l’Ukraine.


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Ce round de négociations s’est engagé, comme chacun le sait, sur la base d’une proposition de « plan de paix » élaboré par l’administration américaine. Depuis dimanche, Ukrainiens et Européens tentent de l’amender. Lâches ou faux culs, ils n’osent parler de contre-propositions mais évoquent « des améliorations » ou « des compléments » au plan américain.

On regrette amèrement qu’une telle initiative ne soit pas venue des Européens. Les nombreuses rencontres autour du président Volodymyr Zelensky ont permis d’affirmer la solidarité européenne, d’armer et de promettre de nouvelles armes aux Ukrainiens. Mais pas d’éclairer les questions pour trouver un chemin de paix. Étrangement, il semble qu’aujourd’hui cela devienne possible. Que de temps perdu ! Quel désastreux bilan politique : laisser Trump-le-fascistoïde s’installer en faiseur de paix… Atterrant ! Totalement velléitaires sur Gaza, veules dans les négociations commerciales et dans leurs échanges avec Donald Trump, les Européens sont mis à l’écart sur un sujet qui les concerne absolument.

Il ne saurait être question d’ici de faire le tri entre le bon grain et l’ivraie des propositions contenues dans les deux plans (le plan américain et le contre-plan européen). Elles sont en débat et sont soumises à l’appréciation des parties. L’avis que chacun s’en fera en tiendra bien sûr compte. Relevons que la question de la sécurité de l’Ukraine et de la Russie sont mis à l’agenda sans qu’elle passe pour l’une (l’Ukraine) par l’adhésion à l’Otan et pour l’autre (la Russie) par une neutralité de l’Ukraine poussée jusqu’à interdire son adhésion à l’UE. Le point 3 de la proposition américaine est décisif : « Il est attendu que la Russie n’envahisse pas les pays voisins et que l’Otan ne s’étende pas davantage ».

Bien des points restent en débat. Le texte américain parle d’élections en Ukraine dans les 100 jours et propose une amnistie générale, y compris pour les crimes de guerre dont Poutine est accusé. La levée des sanctions contre la Russie et sa réintégration dans le G8 sont mentionnées. Et surtout, quel avenir pour les territoires ukrainiens revendiqués voire annexés par la Russie ?

On relèvera aussi qu’il n’est nullement fait mention d’autres instances que celles des pays engagés dans cette discussion. L’Onu ou l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) ne sont même pas cités. Le point 27 précise même, comme pour Gaza : « Cet accord sera juridiquement contraignant. Sa mise en œuvre sera contrôlée et garantie par le Conseil de paix, présidé par le président Donald J. Trump ». Oulala.

Significativement, il est prévu qu’« un dialogue sera mené entre la Russie et l’Otan, sous la médiation des États-Unis », comme si les États-Unis étaient neutres, ne faisaient plus partie de l’Otan. Ce point est relevé avec inquiétude par François Hollande dans l’entretien qu’il accorde au Monde. Il est vrai qu’il s’agit là d’une substantielle évolution internationale dont il faut tirer les conséquences.

Enfin, le niveau de rapinerie de l’administration Trump laisse sans voix : « Cent milliards de dollars d’actifs russes gelés seront investis dans les projets menés par les États-Unis pour reconstruire et investir en Ukraine, les États-Unis recevant 50% des bénéfices de l’initiative ». C’est du génie validé par les Européens !

Bien des points restent en débat : quelle dimensionnement de l’armée Ukrainienne, limitée à 600 000 ou 800 000 ? Le texte américain parle d’élections générales en Ukraine dans les 100 jours et propose une amnistie générale, y compris pour les crimes de guerre dont Vladimir Poutine est accusé. La levée des sanctions contre la Russie et sa réintégration dans le G8 sont mentionnées. Et surtout, quel avenir pour les territoires ukrainiens revendiqués voire annexés par la Russie ? C’est l’objet du point 22 : « La Crimée, Lougansk et Donetsk seront reconnues comme des régions russes de facto, y compris par les États-Unis. Kherson et Zaporijjia seront gelées le long de la ligne de contact […] La Russie renoncera aux autres territoires qu’elle contrôle en dehors des cinq régions. Les forces ukrainiennes se retireront de la partie de la région de Donetsk qu’elles contrôlent actuellement, qui sera ensuite utilisée pour créer une zone tampon ». Cette « zone tampon démilitarisée » et neutre serait « internationalement reconnue comme territoire appartenant à la Fédération de Russie », mais les forces russes ne pourraient y entrer. C’est évidemment une remise en cause nette des frontières ukrainiennes internationalement reconnues. C’est l’ouverture de la boîte de Pandore et la promesse de futurs conflits de par le monde. Ce sera le point le plus âprement négocié.

La paix n’est peut être pas pour demain. Mais c’est déjà un progrès d’identifier les enjeux de négociations.

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