Ariège : la guerre des gauches ?

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Après l’élection législative partielle de l’Ariège ce dimanche, le second tour opposera le 2 avril la candidate de la Nupes Bénédicte Taurine à la socialiste dissidente Martine Froger. Analyse de Roger Martelli.

L’élection de la première circonscription de l’Ariège de ce dimanche 26 mars a déjoué les pronostics. On attendait un duel Nupes-RN, on aura un second tour opposant la députée de la Nupes, Bénédicte Taurine, à la candidate PS dissidente Martine Froger, soutenue par la présidente de la région Occitanie Carole Delga.

 

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En juin 2022, une poignée de voix avait écarté du second tour le candidat du RN, Jean-Marc Garnier. Arguant d’une confusion de bulletin en sa défaveur, il avait déposé un recours et obtenu satisfaction. Alors qu’elle avait largement battu la candidate macroniste au second tour (55%), Bénédicte Taurine a dû retourner devant les électeurs.

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Avec une participation d’un peu moins de 40%, la députée Nupes se tasse légèrement (un peu moins de 2%) et son adversaire macroniste du second tour s’effondre (d’un peu plus de 9%). Les bénéficiaires de ces reculs sont le candidat du RN (gain de près de 5%) et, de façon spectaculaire, la candidate du PS ariégeois (une hausse de plus de 8%). Au jeu des chassés-croisés, la gauche (Nupes, PS dissident, LO) gagne un peu plus de 7%, l’extrême droite (RN, Reconquête) monte de 4%. Il est à noter que les progressions de la dissidente socialiste et du candidat RN sont particulièrement fortes dans les communes les plus peuplées. Dans les sept communes où le nombre des inscrits dépasse les 1000, Jean-Marc Garnier progresse de 7% et Martine Froger de 10%.

En toute logique, on pouvait penser que s’appliquerait la vieille règle républicaine, selon laquelle les candidatures de gauche se désistent au second tour en faveur de celle qui est en tête au premier. C’est la position qu’adopte le communiqué officiel du Parti socialiste, qui aurait préféré un rassemblement à gauche dès le premier tour : « Les duels à gauche ne peuvent être arbitrés par la droite et l’extrême droite ».

Elle est contestée par Carole Delga, Bernard Cazeneuve, Anne Hidalgo ou encore Nicolas Mayer-Rossignol, le rival d’Olivier Faure au récent congrès du PS : « Nous, socialistes, soutenons la candidate socialiste. Sérieux, clarté, refus du populisme, élue de terrain : voilà ses valeurs. Voilà nos valeurs ».

On aura donc face-à-face, dimanche prochain, la députée en place – soutenue par toutes les composantes nationales de la Nupes – et une socialiste dissidente – soutenue par ses instances locales, par la présidente de région, par le parti présidentiel Renaissance et par les opposants à Olivier Faure à la direction du PS. Une candidate de gauche soutenue par des partisans d’une politique gouvernementale de droite, voilà qui n’augure pas d’une absolue clarté dans ce second tour. On peut se réjouir que soit écarté le représentant local de l’extrême droite, mais pour promouvoir quelle politique et avec qui ?

Sondage et scrutin local : dans les deux cas, le mouvement social en cours ne profite pas à la Nupes.

La spécificité de l’Ariège, vieille terre de gauche restée à gauche, interdit de projeter le résultat de ce dimanche sur la France entière. Mais les hasards de la conjoncture font que le scrutin ariégeois résonne en partie avec le sondage Ifop paru le jour-même. Celui-ci laissait en effet entrevoir la possibilité d’un léger tassement de la Nupes, d’un recul prononcé du regroupement macroniste et d’une percée du RN, dans une proportion voisine de celle de son candidat ariégeois.

Sondage et scrutin local : dans les deux cas, le mouvement social en cours ne profite pas à la Nupes. Le sondage met en avant la dynamique de l’extrême droite ; l’élection y ajoute l’hypothèse d’une alternative ambigüe, où les frontières de la gauche et de la droite sont redoutablement floues. La Nupes reste le lieu du nécessaire rassemblement. L’heure est plus que jamais, toutefois, aux adaptations qui lui assureront à la fois sa pérennité et une dynamique potentiellement majoritaire.

 

Roger Martelli

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