Philippe Labro RIP

L’écrivain Philippe Labro vient de décéder. Arnaud Viviant lui rend hommage – alors même qu’il avait perdu son numéro de téléphone, comme un con.
lUn matin, il y a quelques années, j’étais au lit en train de travailler, enfin je crois, quand le téléphone a sonné. Un 06 inconnu s’est affiché. Naïvement, j’ai cru que c’était un/une nouvelle analysant, qui voulait entamer un travail. C’était Philippe Labro. Qui voulait me remercier d’avoir rappelé au Masque et la plume qu’il faisait partie, avec William Styron et Clément Rosset (le remarquable Route de nuit, publié par Sollers à l’Infini) des écrivains qui ont écrit l’un des plus beaux livres sur la dépression : Tomber sept fois, se relever huit (Gallimard). Trois livres importants en ce qu’ils décrivent la dépression, non pas comme une maladie (ils ne se déclarent pas « malades mentaux ») mais comme un mal.
Nous nous ne connaissions pas, Labro et moi. Sans spoiler, c’est la première et dernière fois que nous allions nous parler. J’étais flatté. Nous avons discuté un moment, il avait cette voix exceptionnelle, mielleuse au bon sens du terme, comme si chacun de ses mots contenaient du sucre. Comme je devais me plaindre un peu, à mon habitude, il m’avait raconté cette histoire. Lui le dépressif qui réussissait dans tous les domaines (journalisme, littérature, chansons, cinéma, quoi qu’on en pense) s’était retrouvé un jour sans boulot. Il s’était alors mis à écrire un livre pour les enfants « Les cornichons au chocolat », tout un programme anal bien compris, qui connut un énorme succès. Il l’avait publié sous le pseudonyme de Stéphanie. Quand il a raccroché, j’ai enregistré son numéro. Puis je l’ai perdu comme un con. Je ne vivais pas encore dans un nuage…
La semaine dernière, j’ai envoyé un mail à son attachée de presse chez Gallimard pour lui demander de dire à Labro que j’aimerais lui parler à propos du bouquin que je suis en train d’écrire, et de lui donner mon 06. Elle me répondit promptement qu’elle allait le faire mais qu’il était souffrant. Et puis voilà. Le talent de Labro, qui a longtemps été d’être le plus américain des Français, le passeur d’une culture américaine en France, au temps où ces deux pays entretenaient un lien particulier qui n’est pas complètement défait, mais bon, qui ne tient précisément encore que sur la culture, a très vite été repéré. Notamment par Gérard Lebovici de l’agence Artmédia qui le prit sous son aile, le fera travailler sur des scénarios avant qu’il ne les réalise lui-même avec grand succès. Ce mail, cela faisait des mois que je me disais de l’envoyer. Et puis voilà.