On ne déteste pas toujours les lundis

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Ce lundi est tout à fait étrange : il flotte comme un moment suspendu avant le gros temps. Pourtant ce qui va se passer dans l’hémicycle est déjà connu ; la seule incertitude porte sur l’ampleur du désaveu que va subir le premier ministre et qui conduira inéluctablement à la chute du gouvernement : mais ce lundi sera un jour de bascule.

Il ne s’agit pas d’un épisode de plus dans l’affaissement du pouvoir d’Emmanuel Macron. La différence, cette fois, est la conjonction entre l’impasse politique et les vives attentes et inquiétudes d’un peuple qui semble vouloir se faire entendre. On le croyait assommé par l’échec de la bataille contre les retraites, il a resurgi en juin et juillet 2024 en envoyant la Macronie dans les cordes. On le croyait désabusé et il a signé en masse, spontanément, la pétition pour refuser de tout sacrifier aux betteraviers. François Bayrou a eu beau asséner les pires prédictions pour le pays, têtu, ce peuple n’a pas voulu que deux jours de bonheur et de liberté lui soient retirés après avoir perdu deux années de retraite heureuse. Cet été, le rapport des sénateurs en a ajouté une couche : ainsi donc, 211 milliards sont déversés aux entreprises sans exigences quand le RSA ou les indemnités chômage sont liés à des efforts vérifiés avec scrupule. Le peuple se donne rendez-vous à lui-même, mercredi 10 et jeudi 18. Nul ne sait ni l’ampleur ni vraiment ce qu’il va se passer : cela aussi est le signe d’une profonde nouveauté d’où tout peut sortir.


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Car il y a de l’insupportable dans cette situation si incroyablement inégalitaire et inquiétante. Et il y a de l’attente non pour de pauvres arrangements mais pour une autre politique. Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen l’ont bien perçu et, ce week-end, ils ont tonné et livré deux discours de candidat à la fonction présidentielle. 

Mordante, Marine le Pen a rappelé que François Bayrou avait voté tous les budgets depuis huit ans.  Il a cru acheter l’abstention des députés RN parce que, elle, Marine Le Pen, était inéligible ? Mais non, assurait-elle, elle ne mange pas de ce pain-là. Et elle annonce vouloir encore et toujours ses quatre mesures d’extrême droite : contre les aides aux étrangers, contre les agences de l’État, contre la fraude – pas question ici de l’optimisation fiscale, cette fraude légale en col blanc –, contre la contribution au budget européen. Forte d’intentions de vote très élevées, elle propose un débouché politique à la colère : son élection. Et elle demande donc le départ au plus vite de celui qui est la cause de la situation : le président.

À la braderie de Lille, devant un sobre fond de scène bleu-blanc-rouge, Jean-Luc Mélenchon a retrouvé ses accents de révolutionnaire français. Il a puisé dans l’histoire du pays les précédents qui donnent de la force et de la fierté avant la bagarre. Il a rassuré : non, la dette n’est pas un cataclysme, ne vous laissez pas impressionner. Moins précis que Marine Le Pen, il n’a pas détaillé un programme mais affirmé un projet : tout changer. Tous les mots n’étaient pas là : on n’entendit pas ce qu’il voulait faire avec cette Europe avilie. Mais ceux qui furent prononcés sonnaient juste, quand il affirmait que l’heure n’était pas au compte d’apothicaire, un milliard placé ici, un milliard déplacé là. Il a parlé de la France, du bonheur et du vivant. Mais il y avait un trou béant dans son discours : la politique. On fait comment pour écrire cette autre page ? Il a agoni et moqué ses partenaires, hier encore si chéris. Alors, lui et les insoumis, seuls, vont régler la question ? Qui peut le croire ?

On est prévenu : il faudra et il y aura un débouché politique à ce moment de rejet et de colère. Si la gauche n’est pas au rendez-vous… le RN, lui, est prêt.

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