Macron, émissaire de paix ?

Macron, émissaire de paix

En trois jours, le Président français aura rencontré ses homologues israélien, palestinien, jordanien et égyptien. Mais si la France décide de jouer la carte de la raison, du dialogue et de la solution politique, il ne faut plus tarder, à commencer par cesser le feu.

Emmanuel Macron entend faire de la France une puissance médiatrice dans le conflit israélo-palestinien. L’intention remettrait la France dans le droit fil de la politique française amorcée au temps du général de Gaulle.

Ses propositions semblent respecter la règle de l’équilibre entre les deux adversaires : d’un côté, la perspective d’un État palestinien reconnu au même titre que celui d’Israël ; de l’autre côté, le renforcement de la lutte internationale contre les forces terroristes, dont le Hamas ; de part et d’autre, la nécessité de la protection des populations civiles. Sur le papier, la France ne soutient ni l’action terroriste du Hamas, ni la violence exercée sur la population gazaouie.

Dans les faits, l’équilibre s’avère douteux, en tout cas dans le court terme. Emmanuel Macron s’est gardé de demander l’arrêt des bombardements israéliens sur Gaza : il énonce donc le principe de la protection des populations civiles, mais admet la légitimité d’une pratique (le bombardement massif d’une zone d’urbanisation intense) qui la rend impossible. Une pratique, au demeurant, d’une grande inefficacité si l’objectif est d’anéantir le Hamas.

Macron propose de renforcer la lutte contre le terrorisme. Sur le long terme, on peut considérer que cet objectif est légitime, quel que soit le lieu où il se conduit, Syrie, Liban, Palestine ou ailleurs. Mais, dans l’immédiat, les massacres perpétrés par le Hamas ont remis eu premier plan ce qui avait été oublié : qu’il n’y a pas de solution pacifique au conflit interminable sans mise en place, sous garantie internationale, d’un partage territorial entre deux États. La lutte ouverte contre le Hamas sur le long terme et, à court terme, la poursuite voire l’extension des opérations contre Gaza est impossible à admettre, pour les Palestiniens et pour les opinions arabes. Cette approche méconnait que le Hamas s’est renforcé politiquement, ailleurs qu’en Occident. Cette lutte contre le Hamas prolonge un drame intolérable qui frappe massivement les civils entassés dans l’enclave de Gaza. Pour finir, cela revient à fragiliser Israël sur le plan régional et le pousse vers la spirale infernale de la vengeance, de l’extermination et de la bunkerisation.

Objectivement, la proposition d’Emmanuel Macron n’est pas un « soutien inconditionnel » aux faucons israéliens, qui ne peuvent se reconnaître dans la perspective de deux États. Mais cette perspective est lointaine et ne remet pas en cause la logique immédiate choisie par Netanyahou : la vengeance de masse, qui frappe indistinctement les civils et les combattants, les coupables et les innocents. Le Hamas « terrorise » pour écarter toute solution négociée ; le gouvernement Netanyahou « pacifie » pour éradiquer et coloniser. Jusqu’où va-t-on aller dans cette folie ?

Il n’y a pas de solution durable sans reconnaissance des droits égaux des peuples israélien et palestinien à vivre sur leur terre, dans le cadre de leur État. Mais il n’y a pas de processus pacifique qui puisse s’engager sans l’arrêt des bombardements et l’abandon des projets d’invasion de Gaza.

Aujourd’hui, la question n’est pas de savoir qui va gagner, mais d’éviter le pire. Ni la guerre des civilisations, ni la bataille des théocraties, ni la logique des jusqu’auboutismes ne peuvent être l’horizon de l’émancipation. De façon hâtive, mal construite, déséquilibrée, Emmanuel Macron a fait un pas en rappelant qu’il n’est de solution que politique et pacifique. La France est une puissance qui peut compter. Elle est au Conseil de sécurité que préside en ce moment Lula. Si, au lieu de s’enfermer dans de nouvelles guerres entre « camps » irréconciliables, la France décide de jouer la carte de la raison, du dialogue et de la solution politique, l’espoir peut renaître. Mais, dans ce cas, il ne faut plus tarder. Les forces existent pour aller dans le bon sens ; mais elles ne manquent pas non plus pour ajouter de l’horreur à la barbarie.

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