Le PS, un Lazare aux pieds d’argile

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Le mandat de François Hollande, l’irruption d’Emmanuel Macron et leurs errements politiques avaient rendu les socialistes quasi marginaux. La nupes et surtout les élections législatives de juillet ont, semble-t-il, remis les socialistes au centre du jeu. Comment, tel Lazar, le PS est-il revenu d’au-delà des morts ?

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1,74% : c’est le score de la candidate du Parti socialiste, Anne Hidalgo, à l’élection présidentielle de 2022. Ce parti qui a offert à la France deux présidents de la Cinquième République et qui se voulait, il y a 20 ans, une « maison commune » pour toute la gauche, n’avait plus (ou presque) voix au chapitre dans les grands débats nationaux. Parti seul, ou presque, du PS il y a 15 ans, Jean-Luc Mélenchon tenait sa revanche politique. A la tête désormais d’une organisation présidentialiste particulièrement efficace, il a construit un programme jugé crédible et porté par des voix percutantes. A l’issue des scrutins de 2022, le match pouvait paraitre définitivement plié. Loin de là, en fait.

À l’issue de l’élection législative anticipée de 2024, les socialiste se retrouvent au coude à coude avec les insoumis à l’Assemblée nationale : 66 députés, juste derrière les insoumis qui sont au nombre de 71. Après le purgatoire de la période Nupes, les voilà de retour dans la gauche. Les socialistes peuvent affirmer que le Nouveau Front populaire, c’est aussi eux. Quand bien même le programme commun du NFP est largement celui des insoumis. Quand bien même que François Hollande, député PS-NFP, affirme que le programme n’engage que ceux qui le lisent. Alors, le NFP, il est à qui ?

Les luttes parfois incompréhensibles qui opposent le PS et LFI portent en fait sur l’identité du NFP et en vérité sur la définition de la gauche. Pourtant, ce n’est pas tant le retour de l’opposition entre une gauche réformiste et une gauche révolutionnaire qui est à l’œuvre mais plutôt un antagonisme stratégique. LFI reprend sa chevauchée qu’elle pense ascendante: pour (re)conquérir la confiance des catégories populaires et des jeunes, de « la nouvelle France », il faut montrer sans faiblir ni transiger que l’on se tient de leur côté. Quoi qu’il en coute de solitude ou d’incompréhension du reste de la « classe politique », voire de la société. Et pour se faire entendre d’eux, ne pas hésiter à outrer ou cliver. De l’autre, le PS qui n’a toujours pas de « logiciel » alternatif, ni avec LFI ni avec le hollandisme, entend reprendre langue avec l’électorat de gauche déboussolé parfois ulcéré par LFI, avec les syndicalistes rompus à la négociation et aux compromis, avec le monde associatif, celui des territoires qui « fait avec ».

Que proposent les socialistes ?

Comme au judo, le PS veut faire de sa faiblesse un force. Il veut faire de son passage au purgatoire, de son retour obligé à davantage de modestie, l’occasion de laver les erreurs du passé, et reprendre le chemin de la « resposablité ». Il se rend aux réunions avec les gouvernements Barnier puis Bayrou. Il prend soin d’y associer écologistes et communistes. Enjeux : continuer d’apparaître comme unitaire et pallier un déficit de fond par le présence des deux autres, qui portent dans leur nom même, des directions claires. Dans une certaine mesure, les socialistes devenaient la maison commune de la gauche – hors LFI, une sorte de maison qui ne serait composée que de murs et que les communistes et les écologistes auraient remplis avec leurs meubles. Un tel édifice peut-il tenir ?

Car, au fond, c’est là que le bât blesse : que proposent les socialistes ? Une méthode, celle qui consiste à s’afficher comme des pragmatiques. Mais au-delà ? Ils restent embourbés dans le bilan non soldé de Hollande. La preuve par la contre-réforme des retraites d’Emmanuel Macron de 2023. Certes, les socialistes y étaient fermement opposés et ils ont été de toutes les luttes. Mais que disent-ils de la réforme Touraine qui augmenta le nombre d’annuités à 43 ? Le point de compromis entre socialistes et le reste de la gauche fut la pudeur et la discrétion : seulement le refus de la réforme Macron. Le reste, c’est à dire un projet pour les retraites, qui va de son financement à la transformation du travail, est mis sous le boisseau. Ce flou permit les mobilisations populaires. Ce n’est pas rien. Et l’attribution d’un label de gauche au parti de Marisol Tourraine (par ailleurs devenu – comme tant d’autres socialistes- soutien d’Emmanuel Macron). Les socialistes pensent en avoir tiré de premiers bénéfices en juin 2024, lors des élections européennes où ils parvinrent à faire converger sur le nom de Raphaël Glucksman une partie de leur électorat naguère perdu et déboussolé par LFI avec une partie de l’électorat macroniste en capilotade. Est-ce la base d’une relance ? C’est en tout cas une respiration, une pause dans l’effondrement. Mais où sont les nouvelles fondations du parti à la rose ?

Certes, la gauche est profondément diverse. Il faut laisser les insoumis être des insoumis, les communistes être des communistes, les écologistes être des écologistes et les socialistes être des socialistes. Le problème, c’est qu’on ne voit pas bien ce qu’être socialiste veut dire. Il y a l’histoire et un certain rapport au pouvoir, local comme national. Mais le rapport à la pratique et au pouvoir ne suffit pas à définir un projet, surtout en période de grand vent d’ouest comme aujourd’hui. « Faire mieux » est une nécessité si on veut avoir voix au chapitre, à gauche comme en France. Pour cela, il faut travailler en profondeur. LFI a créé son institut de recherche. Le PS délègue ce travail intellectuel à la fondation Jean Jaures et à Terra Nova. On peut ironiser sur l’augmentation annuelle du nombre de propositions du programme de LFI… mais ils font ce travail de mise à jour pour suivre les évolutions et les dynamiques de la société. Et le PS ? Pour l’instant, il cabotte et navigue à la godille. Un petit coup à gauche, un petit coup à droite.

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