Le gouvernement ressort la théorie du genre du caniveau
La droite parle à la droite : la théorie du genre n’existe pas, selon la ministre de l’éducation Anne Genetet, et c’est pour ça qu’elle ne laissera pas cette idéologie infiltrer l’école.
En septembre, lorsque Michel Barnier a mis sur pied son gouvernement, nous titrions « Pire tu meurs », notamment à cause de la présence au sein de son équipe, de plusieurs membres de la team Manif pour tous. Il fallait bien que ce choix de profils ait un jour des conséquences politiques. Ce jour est arrivé.
On savait Alexandre Portier, ministre LR délégué à la réussite scolaire, grand défenseur de l’école privé. Le voilà pourfendeur de la « théorie du genre » – vous savez, le truc qui n’existe pas mais qui fait peur aux gens de droite. Interrogé au Sénat dans le cadre des questions au gouvernement, ce mercredi 28 novembre, à propos des « programmes d’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle de la maternelle au lycée », le ministre se veut rassurant pour la droite : « Toute référence à l’identité de genre et au wokisme sera retirée […] Je m’engagerai personnellement pour que la théorie du genre ne trouve pas sa place dans nos écoles. […] Le militantisme n’a pas sa place à l’école : je veux un encadrement strict de tous les intervenants ». Mais qui a dit le contraire ? Car dans le texte, non définitif, il n’en est pas question…
Faut-il comprendre que, selon Alexandre Potier, les « programmes d’éducation » du gouvernement Barnier comporteraient des pages wokistes sur la théories du genre ? Ce n’est pas franchement le style du premier ministre… Les associations, telles le Planning familial ou la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise) dénoncent des « informations mensongères » et « dangereuses ». Même dans le camp macroniste, on s’indigne. Ainsi tweete Aurore Bergé : « Un ministre ne devrait pas diffuser de fausses informations en agitant des peurs et des fantasmes pour espérer se faire connaître des Français. Il n’est nullement question de « théorie du genre » dans l’éducation à la vie affective. Il suffit de lire (vraiment) le programme prévu ».
Problème : Anne Genetet, la ministre de l’éducation, est allé dans le sens de son camarade de gouvernement, martelant que « la théorie du genre ne trouve pas sa place à l’école » – tout en affirmant plus tard que « la théorie du genre n’existe pas ».
En revanche, il est question du concept « d’identité de genre », et c’est bien ça que la ministre de l’éducation entend effacer. Or, ce concept est l’un des motifs de discriminations inscrit dans le code pénal. Créer une confusion entre militantisme et juridique, c’est pas beau. D’autant plus moche que le gouvernement ne fait que répondre et attiser les peurs de l’extrême droite, au nom d’un texte que la ministre qualifie de « très progressif ».
Comme au bon vieux temps des débats du mariage pour tous, les faits sont sans importance pour la droite. Seule l’idéologie et la diabolisation comptent.
Il aurait mieux fait de l’y laisser.
La diabolisation, l’agitation des peurs, le confusionnisme font partie intégrante de l’idéologie de l’extrême droite. Et comme cette idéologie mortifère a gagné du terrain dans les médias par la bollorisation et la sténisation des rédactions, dans l’enseignement de certaines écoles supérieures, il n’est pas étonnant de la voir débarquer dans la sphère politique. C’est une vaste entreprise de manipulation de masse qui s’opère sous nos yeux.
Historiquement, il existe des précédents avec l’avènement du nazisme, du fascisme et aujourd’hui du trumpisme. Ne nous y trompons pas, il ne s’agit pas de libérer la créativité, l’imagination, la culture, la connaissance, la solidarité ou toute autre processus d’émancipation mais au contraire de verrouiller les esprits pour faciliter la main-mise d’une caste réactionnaire et totalitaire sur les leviers du pouvoir politique et économique. Pour échapper à cet enfermement, il y a urgence à expliquer, mobiliser et organiser la résistance.
Le totalitarisme d’extrême-gauche est fécond en pseudo-sciences qu’il brandit comme porteur de vérités intangibles, dont la contestation est interdite. La théorie du genre est le lyssenkisme de notre époque. Historiquement le précédent du communisme aurait dû éclairer les esprits sur le danger mortel que portent de telles idéologies. Le mélenchonisme en aurait-il pris le relais ? Et il y a toujours un PCF à ses côtés en appoint. L’extrême-gauche a deux fers au feu. Il faut rester vigilant pour la défense de l’Etat de droit.