Une nouvelle stratégie qui pourrait coûter cher au PS

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La newsletter du 9 décembre 📨

par Pablo Pillaud-Vivien

Au-delà du vote attendu ce soir sur le budget de la Sécurité sociale, le PS est-il en train d’opérer un changement de stratégie ? Depuis la nomination de François Bayrou, il multiplie les votes et les initiatives pour éviter la crise institutionnelle. Mais ce choix pourrait lui coûter cher dans une gauche déjà échaudée.

Le budget de la Sécurité sociale va être mis aux votes des députés aujourd’hui. Le secrétaire national du PS Olivier Faure ainsi que le président du groupe à l’Assemblée nationale Boris Vallaud plaident pour un vote en sa faveur. Les socialistes se félicitent d’avoir obtenu le retrait des pires horreurs du budget initial.

Dans un entretien au Monde, Boris Vallaud fait la liste : « Il n’est plus question de la suppression des deux jours fériés, de la réforme de l’assurance-chômage, de la suppression du gel des minima sociaux, des pensions de retraite et du barème de la CSG, du doublement des franchises médicales, du coup de rabot sur les titres-restaurant, des augmentations de cotisations sur les apprentis. »

À en croire le chef des députés socialistes, ce budget serait donc acceptable, presque un budget de gauche, puisque les députés LR et Horizons n’en veulent pas. Dès lors, la gauche – disons le PS – sera rendu responsable de ce budget et des difficultés maintenues ou aggravées pour les assurés sociaux. Les propos de l’économiste Thomas Piketty sur France Inter sont inquiétants et éclairants.

Les deux dirigeants socialistes ont choisi la recherche d’un compromis pour incarner une « opposition utile ». Dans une Assemblée sans majorité, face au risque d’instabilité et d’accès au pouvoir du RN, face à l’inquiétude des Français de voir le pays sans budget, le PS se sent la responsabilité de garantir le fonctionnement minimal de l’État, quitte à soutenir un budget conçu par un gouvernement qui poursuit une politique néolibérale. Ils veulent croire que ce vote sera un pas vers la restauration de leur influence perdue.

Dans le même temps, ils font un pas en arrière vis-à-vis de leur engagement en faveur d’une primaire de la gauche. La conférence de presse qui devait avoir lieu lundi 15 décembre pour acter les dates et les formes de la primaire est reportée sine die de leur seule initiative. Ont-ils tourné la page du Front populaire 2027 et des rencontres de Bagneux auquel ils participaient ?

Ce choix des socialistes à l’Assemblée a tout d’une inflexion voire d’un revirement stratégique. François Hollande et Carole Delga ont-ils partie gagnée ? Olivier Faure et Boris Vallaud se posent en garants de la stabilité de l’Etat et de l’unité des socialistes. Mais après ?

Après, il y a la compréhension politique que les Français se feront de cette séquence. Le Parti socialiste apparaît comme le soutien indispensable au maintien d’un pouvoir à bout de souffle. Que sont devenues les réformes qui permettraient au pays de sortir de cette descente lente mais certaine vers l’enfer de la paupérisation et des rancœurs profondes ? Cette remise des ambitions transformatrices a coûté très cher au PS entre 2012 et 2017. En 2022, elle s’est traduite par le score calamiteux de Anne Hidalgo, 1,7%. Que ne voient-ils que le peuple de gauche associe le macronisme à la casse sociale, au mépris démocratique et à l’autoritarisme rampant ? 

Le PS est divisé, souvent au bord de la rupture. Sa direction en est convaincue : sans compromis avec le gouvernement, c’est l’explosion. Alors le parti à la rose a privilégié ce qui permet à chacun de rester dans la maison.

Mais une autre réalité s’impose : le macronisme est aujourd’hui l’espace politique le plus rejeté du pays. S’y allier ou simplement s’y accoler est une prise de risque majeure. La note pourrait être salée. Les élections municipales arrivent dans quelques semaines. Les urnes rendront leur verdict… Le PS devra-t-il une nouvelle fois ouvrir un cycle d’aggiornamento ? Il sera encore temps, comme toujours.

Pablo Pillaud-Vivien

🔴 INSULTE DU JOUR

Brigitte Macron persiste et signe : les féministes sont des « sales connes »

Brigitte Macron, la femme du président qui discute « entre hommes » avec ses ministres accusés d’agressions sexuelles et qui a fait de la lutte contre les violences faites aux femmes la grande cause de son quinquennat, a déclenché une vive polémique en qualifiant de « sales connes » les militantes de #NousToutes qui avaient interrompu la veille le spectacle d’Ary Abittan. Cet humoriste était visé en 2021 par une accusation de viol ayant abouti à un non-lieu. Assister à son spectacle qui faisait polémique était déjà un signe de soutien très discutable. Traiter des militantes féministes de “sales connes” relève sans ambiguïté du sexisme : historiquement, ce type d’insulte vise d’abord les féministes pour les renvoyer au silence. En s’y prêtant, Brigitte Macron s’inscrit dans une longue tradition de dénigrement portée par la droite, l’extrême droite et son président de mari. Insupportable. Mais au fond, qui est surpris ?

P.P.-V.

ON VOUS RECOMMANDE…

À l’occasion de l’anniversaire de la loi de 1905, retour sur l’intervention lumineuse de Rokhaya Diallo dans un débat sur France Culture : elle y dévoile l’angle mort du débat français sur la laïcité, en montrant que ce n’est pas tant le voile qui dérange que la transgression des places sociales assignées (une femme de ménage voilée = tolérée ; des femmes voilées dans les tribunes de l’Assemblée = scandale) révélant ainsi comment l’universalisme proclamé continue de servir de paravent à un ordre social implicite, où le signe religieux ne devient problématique que lorsqu’il accompagne une montée en visibilité et en pouvoir.

C’EST CADEAU 🎁🎁🎁

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