Le début de la fin pour « la politique de l’offre » ?

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La newsletter du 30 octobre 📨

par Catherine Tricot

En taxant les multinationales, les super-dividendes et les Gafam, les députés ont fissuré le dogme de la politique de l’offre et rouvert le débat sur ce qui fait vraiment la force d’une économie.

Un vote à la profonde portée politique vient d’intervenir à l’Assemblée nationale. Les députés ont mis un coin dans la politique de l’offre, alpha et oméga depuis 2014 de la politique économique française. Ils viennent de voter des impôts sur les super-dividendes, les multinationales et de relever celui sur les Gafam. Une rentrée fiscale de plus de 30 milliards est attendue. Contrairement aux atermoiements qui reportent à un hypothétique impôt européen et en dépit des appels à faire le dos rond face à Donald Trump, Eric Coquerel, Clémentine Autain et Nicolas Sansu ont donné du courage à leurs « chers collègues » qui ont fini par voter cette mesure de justice fiscale. Ce seront des moyens pour les investissements et les services publics. C’est enfin un coup d’arrêt à la doxa selon laquelle l’attractivité de la France reposerait sur la baisse des impôts des plus riches et des entreprises. A n’en pas douter, on va nous promettre que les sept plaies d’Égypte vont s’abattre sur la France. 

On revient de loin. La taxe Zucman a été battue avant même d’être débattue. Les députés issus du bloc central sont remontés comme des coucous et les députés RN ont changé de pied : tous s’opposent à l’alourdissement des impôts des plus riches. 

Devant l’évidence mathématique de l’échec à venir, les socialistes avaient cherché un nouveau compromis avec le gouvernement, à charge pour lui de le vendre aux députés de son camp. Ainsi est née l’improprement nommée « taxe Zucman light » qui ne devait pas inclure l’outil de production. Les députés socialistes voulaient à tout prix arracher quelques milliards et parvenir à un accord avec le pouvoir macroniste. En bons camarades, ils cherchaient même à associer écologistes et communistes à ces négociations. On a écrit ici et tout le bien de ces confusions politiques qui, sous couvert de gagner du temps pour fourbir des armes contre le RN, leur chauffent la place. 

Le fait que le vote intervenu il y a deux jours touche l’outil de production est un coin dans la politique de l’offre. L’idée du ruissellement des riches vers les pauvres était déjà battue en brèche par la poussée des inégalités aux deux extrémités du corps social. En revanche, ce vote assume que l’attractivité et la force des entreprises ne reposent pas seulement ni principalement sur la propriété (privée) des biens de production. Ce qui conditionne la production relève de la qualité des infrastructures de transport, de formation, de santé, de la production d’énergie. Elle dépend de la formation des salariés, de leur bonne santé, de leur qualité de vie et de l’environnement dans lequel ils évoluent. Elle suppose de préparer le pays au changement climatique et à la révolution de l’intelligence artificielle… Il faut donc que les entreprises y contribuent et il faut donner des moyens, notamment à l’État, pour assurer ces missions. Ce vote est de bonne politique pour les habitants et pour les entreprises. Les entreprises « Choose France » pour ces raisons, et non parce qu’Emmanuel Macron a baissé en sept ans le taux d’imposition de 45 à 43%. Le vrai débat alternatif politique est là. Des bases pour sortir de l’étouffoir de cette maudite politique de l’offre ont été posées à l’assemblée. 

La suite politique sera sûrement mouvementée. Le RN, repris en main par Jean-Philippe Tanguy, a troublé le jeu et voté ces mesures. Le bloc central est vent debout, certains en PLS. Les sénateurs vont vouloir y remettre bon ordre. Y aura-t-il un budget à Noël ? Rien n’est moins sûr mais une trouée a été possible.

Catherine Tricot

🔴 NAUSÉE DU JOUR

Un texte raciste du RN contre les Algériens voté par l’Assemblée

Scandale dans l’hémicycle : pour la première fois, un texte du Rassemblement national a été adopté. À une voix près. Une résolution symbolique mais lourde : la dénonciation de l’accord franco-algérien de 1968, qui régit depuis plus d’un demi-siècle la circulation et le séjour des Algériens en France. Bien que largement vidé de sa substance, le RN en a fait un objectif idéologique et raciste. Le centre et la droite ont abandonné la barrière républicaine sous les applaudissements de Marine Le Pen. Car il aura suffi de l’absence des macronistes et du Modem (moins d’un quart était présent) et de la droite désormais sans vergogne pour offrir au RN sa première victoire parlementaire. La moitié des troupes Horizons d’Édouard Philippe ont voté avec l’extrême droite. La moitié des Républicains aussi. Rappelons que l’ancien premier ministre et actuel président de Renaissance, Gabriel Attal, absent lors du vote, appelait déjà à « dénoncer » l’accord : le RN n’a plus besoin de forcer la porte, on la lui ouvre. À une voix près, la France officielle a réhabilité un discours raciste, en ciblant une communauté, un pays, une mémoire. À une voix près, la République s’est tue. Marine le Pen a raison de dire : « C’est une journée que l’on peut qualifier d’historique pour le RN ». Haut-le-cœur.

P.P.-V.

ON VOUS RECOMMANDE…

« La Vénus de Botticelli, naissance d’une icône », sur France TV. Une femme sort d’un coquillage et masque pudiquement son sexe avec sa longue chevelure. Avec Marilyn Monroe et Mona Lisa, la Vénus de Botticelli est une des icônes de la beauté féminine. Ce documentaire de France TV d’une profonde intelligence revient avec des artistes, des historiens et des créateurs sur l’un des chefs-d’œuvre les plus célèbres de la Renaissance. Du cinéma à la mode, en passant par l’art contemporain et les objets du quotidien, ce tableau n’a cessé de façonner le regard sur la beauté féminine.

C’EST CADEAU 🎁🎁🎁

Le 30 octobre 1938, une radio américaine diffuse La Guerre des mondes, une pièce radiophonique inspirée du célèbre roman de l’écrivain britannique H.G. Wells. Au micro et à la mise en scène, Orson Welles, 23 ans, un metteur en scène alors quasi inconnu du grand public. Pour donner un caractère réaliste à la pièce, Welles décide d’y inclure de faux flashs d’information qui évoquent le débarquement des Martiens dans la région de New York. Selon les journaux de l’époque, cette version de La Guerre des mondes aurait déclenché une panique générale à travers le pays. Problème : cette panique générale n’a pas eu lieu. En effet, l’émission était clairement annoncée dans les programmes et un générique marquait le début et la fin de cette mise en scène radiophonique. Tout était faux : des fake news sur des fake news avant l’ère des fake news.

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