LA LETTRE DU 23 MAI

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Macron en Nouvelle-Calédonie : l’impossibilité d’un nouveau rapport hexagone/Outre-mer

Le président de la République vient d’arriver sur le Caillou pour tenter d’apporter des solutions à la crise aiguë qui secoue l’île.

Voilà plusieurs jours qu’une partie de la jeunesse kanake se révolte. Le déclencheur ? La présentation d’un projet de loi constitutionnelle d’élargissement du corps électoral sur le territoire calédonien. Mais la crise est plus profonde : elle remet en cause le processus de décolonisation qu’avaient amorcé les accords de Nouméa en 1998 et qui assuraient, jusqu’alors, la paix civile sur l’île.

L’équilibre délicat entre une population autochtone kanake aujourd’hui minoritaire, parfois indépendantiste mais pas uniquement, des blancs, venus de métropole ou leurs descendants, parfois loyalistes mais pas uniquement, et près d’un tiers d’immigrés de la région pacifique, est mis en péril. La recherche permanente, longue, lente et difficile, de consensus en Nouvelle-Calédonie, qui était la ligne de conduite de l’État depuis des décennies, a été battue en brèche avec l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron en 2017.

Forcer la tenue d’un référendum sur l’indépendance en pleine épidémie du covid (un appel au boycott avait été lancé et plus d’un néo-calédonien sur deux n’est pas allé voter), nommer dans son gouvernement une ministre loyaliste, déposer une proposition de loi pour faire perdre à la collectivité néo-calédonienne la compétence sur le nickel, imposer un calendrier serré et non-accepté sur des modifications constitutionnelles… autant d’éléments susceptibles d’ébranler les identités, les sensibilités, les dynamiques socio-politiques. Si à cela, on ajoute une crise économique assise sur des inégalités allant croissant, il paraissait logique que ça pète.

Mais voilà qu’arrive, pour 12 heures sur place, Macron-le-sauveur, flanqué des ministres des Outre-mer (forcément) mais aussi des ministres de l’Intérieur et des Armées. Le signal est clair : rétablir l’ordre plutôt que la paix civile. La méthode est toujours la même avec ce pouvoir et l’on ne voit pas bien comment elle pourrait porter ses fruits. L’impartialité de l’État et du pouvoir a été battue en brèche mais surtout, une défiance à l’égard de l’exécutif s’est profondément installée. Comment la surmonter ? En acceptant – et cela vaut pour tous les outre-mer – d’envisager un cadre souple de l’inscription de certains territoires et de certains peuples dans la République française.

Quand on les écoute, les Kanaks, leurs représentants comme les révoltés, ne veulent pas se couper complètement de la France. Quand bien même elle a été et est toujours dans une certaine mesure considérée comme une puissance colonisatrice, l’enjeu est de réévaluer le rapport que la Kanaky entretient avec elle. Mais pour cela, il faut être ouvert à cette possibilité. Or le pouvoir actuel fait plutôt montre d’une volonté de rigidification de tous les cadres qu’il propose. La révolte des Kanaks peut-elle faire changer Emmanuel Macron sur ce point ? On en doute mais on l’espère.

Pablo Pillaud-Vivien

GRÈVE DU JOUR

Radio France ne se laisse pas faire

Ce jeudi et ce vendredi, la maison de la radio est en grève. Le projet de création d’une holding regroupant les entreprises de l’audiovisuel public est dans le viseur des salariés. Non qu’ils soient rétifs à tout changement. Mais parce que les logiques de l’exécutif semblent être uniquement économiques, c’est-à-dire en l’espèce, de réduction de coûts. Les arguments avancés par le député Renaissance Quentin Bataillon ne convainquent pas : l’audiovisuel public va mal (Ah bon ? Où ça ? Selon quels critères ? Les audiences sont excellentes et les coûts maîtrisés !), la synergie permettrait d’être « plus puissant » (Ah oui ? Et pourquoi donc ?) et surtout l’inénarrable « Il faut réformer parce que c’est bien de réformer » (lol). Bref, rien ne va, ni sur le fond, ni sur la forme. Mais on commence à avoir l’habitude avec ce gouvernement.

P.P.V.

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