Selon Le Figaro, les femmes veulent des vrais mecs, du genre… Poutine et Erdogan

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Ou comment, de lien en lien, on peut passer de Sandrine Rousseau à une poignée d’autocrates.

« Les femmes ne veulent pas de l’homme déconstruit ! Contrairement aux affirmations de la députée Sandrine Rousseau, la plupart des femmes plébiscitent les hommes forts, conquérants et protecteurs », voilà comment débute cette tribune de Noémie Halioua, publiée ce 28 novembre sur le site du Figaro.

 

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On sent, à longueur de feuillets, que la rédactrice en chef parisienne de la chaîne de télé I24News s’est fait plaisir en écrivant. On sent une colère, un désir de vivre, de jouir, et une incompréhension totale du sens que prend la société. Au fond, ce qu’elle ressent, c’est plus que le grand remplacement, c’est l’effondrement d’une civilisation.

On aurait aimé que l’autrice, en bonne journaliste, source son article. Elle qui ne cesse d’évoquer « la plupart des femmes », voire carrément « la majorité des femmes », pour venir valider sa propre vision de la société, ne fait intervenir aucune étude pour démontrer qu’elle n’est pas toute seule à penser ce qu’elle pense.

Mais passons.

Vient d’un coup cette phrase : « La plupart des femmes continuent de plébisciter les hommes forts et construits, conquérants et puissants, disons même protecteurs puisque nous n’avons pas peur des mots, dans lesquelles elles ne perçoivent pas instinctivement un violeur en puissance ou une altérité rivale qui justifie une déclaration de guerre », avec un lien hypertexte sur « hommes forts et construits ». On clique… Et là on tombe sur un article de 2016 intitulé « Le culte de l’homme fort », qui débute de la sorte : « Poutine, Erdogan, Orban, Xi Jinping… Le culte de l’homme fort est en plein renouveau sur tous les continents. »

N’est-ce pas fantastique, comme lien ? D’un coup, la tribune de Noémie Halioua prend une toute autre tournure. Vladimir Poutine serait-il un « modèle de séducteur universel » ? Le président turc Recep Tayyip Erdoğan un « apollon » ? Peut-on classer le Premier ministre hongrois Viktor Orbán dans la catégorie des « hommes les plus sexy de la planète » ? Ne voyez-vous donc pas la « promesse d’aventure », la « chance de rencontre », l’« excitante, érogène, enthousiasmante » opportunité d’avoir un date avec Xi Jinping ?

On espère que le lien ne va pas être supprimé !

Un homme déconstruit peut en cacher un autre

C’est quoi, un homme déconstruit ? À lire Noémie Halioua, ce spécimen serait « dépourvu d’attributs masculins, neutre voire féminisé, castré symboliquement […] à qui elles pourraient prêter leur jupe ou qui pleure des rivières devant un film à l’eau de rose, qui se maquille le matin et qui attend qu’on l’invite à dîner […] androgyne en salopette et trottinette, « assumant sa part de féminité » dans une joyeuse exhibition ». Et de citer comme exemple Timothée Chalamet, Conchita Wurst ou Bilal Hassani.

En résumé, l’homme déconstruit n’est pas homme, c’est une tapette, un pédé refoulé – que penser alors des femmes qui fantasment sur Chalamet, Harry Styles, Johnny Depp, Jim Morrison ?

A contrario, l’homme, le vrai, serait toujours vivant, n’en déplaise à ces furies : « Chaque année, le magazine américain People dresse le podium des hommes les plus sexy de la planète : en 2021, c’est l’acteur Paul Rudd qui a été consacré succédant à Michael B. Jordan, George Clooney, Brad Pitt ou encore Idris Elba. Des apollons infiniment populaires auprès du public féminin, à l’aise dans leur pompe, pas « déconstruits » ni sensibles à la « fluidité du genre » pour un sou. À moins que le spectacle d’Elba en talon ou Clooney avec des faux-cils m’ait échappé, auquel cas il serait judicieux de le signaler en commentaire de ce billet. »

Il était, en effet, judicieux de ne pas omettre ce dernier commentaire. Car au fond, Noémie Halioua voit en ces sex-symbols ce que le magazine People y voit – et qu’elle partage visiblement –, sans jamais se demander si ça colle avec la réalité des dits sex-symbols.

En deux minutes sur Internet, on trouve par exemple que Brad Pitt vient juste de lancer sa propre marque de soins pour le visage, « une gamme skincare non-genrée ». Mais il est plus facile d’imaginer Brad Pitt en vieux réac’ qu’Éric Zemmour ou Michel Houellebecq en sex-symbols.

Sandrine Rousseau > le mal absolu

On n’a toujours pas bien compris ce que venait faire la députée écolo dans cette tribune. Visiblement, elle incarne à elle seule beaucoup de choses. Voyez plutôt : « terrorisme intellectuel » ; « discours militants agressifs » ; « nouvelles inquisitrices » ; « exciseuses occidentales » ; « castratrices ».

Mais pourquoi donc Sandrine Rousseau est-elle sur les bancs de l’Assemblée nationale et non pas en prison aux côtés de Salah Abdeslam ?

Pour finir, l’autrice se pare d’un drap qu’on ne saurait définir, à mi-chemin entre Simone Veil et Jean Moulin : « Ce propos qui aurait été encore hier une banalité sans nom est devenu révolutionnaire, un acte de délinquance vis-à-vis de la pensée dominante. » Une pensée si dominante que, s’y attaquer, ce serait prendre « un risque d’être pourchassé par une poignée de militantes agressives ». Comme quoi, un pet dans un verre d’eau peut provoquer dans l’esprit de certains un tsunami à engloutir leur Atlantide.

 

Loïc Le Clerc

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