Frédéric Tonolli : « On a abandonné les Ukrainiens »

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Poutine est-il fou ? Le documentaire de Frédéric Tonolli pour Arte, Poutine, le retour de l’ours dans la danse, montre au contraire combien Vladimir Poutine n’a cessé de prévenir le monde de ses intentions : la Russie humiliée par les occidentaux va revenir. C’était le sens de son discours de Munich dès février 2007. Frédéric Tonolli revient de Kyiv, il est l’invité de #LaMidinale.

UNE MIDINALE À VOIR…

 

ET À LIRE…

Sur Poutine est-il fou ?
« Je pense que Poutine est fou ou en tout cas qu’il est atteint de quelque chose de terrible. »
« Il y a une logique derrière Poutine qu’on aurait pu venir voir venir. Peut-être pas la guerre en Ukraine mais sur ces 20 dernières années, il y a une logique. Et Poutine nous a prévenu. Nous par hybris, par intérêt, on n’a pas écouté, on n’a pas voulu voir venir. »
« D’une certain façon, Poutine est un idéologue. Mais il est aussi pragmatique. Il a cette intelligence – même si elle est folle – du joueur. Il est opportuniste. »
« Depuis 2007, Poutine nous annonce que la Russie va revenir. Cette Russie humiliée veut revenir dans le jeu. Et il n’a de cesse que de le faire mais il fait quand nous on montre des faiblesses et des inintentions. C’est là qu’il est pragmatique et joueur parce qu’il va très vite. »
« Il est un idéologue au sens où il a toujours cette idée de grande Russie. »

Sur l’esprit de Maïdan
« Dès 2013, l’Ukraine se tourne vers l’Europe et le monde occidental entre ouvre certaines portes (…). Les Ukrainiens dans leur ensemble en ont envie. Dans la même année, Poutine lance quelques milliards à l’ancien président Ianoukovytch qui finit par refuser de signer et de se rapprocher avec l’Europe. Et là, ça pète à Maïdan, la place centrale de Kiev. La jeunesse et une grande partie des habitants de Kiev et d’Ukraine qui se révoltent et ça va tourner à un carnage avec une centaine de personnes tuées. Moscou ne pouvait pas laisser faire (…). Ça va donner la révolution de Maïdan qui va entraîner en quelques jours la fuite du président vers la Russie. Cette révolution est une réussite. Il y a un esprit de Maïdan, il n’y aura plus jamais d’avant Maïdan. Les Ukrainiens se sont retrouvés à ce moment-là. »

Sur la guerre russe
« Poutine peut gagner militairement la bataille. L’armée russe est un rouleau compresseur terrible. Il pourrait gagner la bataille de Kiev. Il pourrait gagner la bataille d’Ukraine mais il ne pourrait jamais gagner la guerre. »
« Poutine a réussi à réunir tous les ukrainiens. »
« Les Ukrainiens ne sont plus des nationalistes, ils sont des patriotes. »
« En réunissant tous les Ukrainiens, Poutine a déjà perdu cette guerre. »
« Ce que disent les Ukrainiens des Russes est très violent (…). Il y a un rejet de tout ce qui est russe. Un rejet que je partage. »

Sur la résistance ukrainienne
« Il y a une volonté commune. »
« Toutes les personnes que j’ai vues cherchent à rendre service aux autres dans une cause commune et cette cause commune c’est l’Ukraine. Ils en sont eux-mêmes surpris. Ils se redécouvrent en tant que nation, peuple et pays. Poutine, dans sa démence et sa violence, leur a offert cette possibilité. »

Sur l’espoir des Ukrainiens
« Tu peux raser un pays, tu ne peux pas raser l’âme d’un pays. »
« Poutine, s’il lâche les freins, il va gagner la bataille. Mais il va gagner quoi ? Un champ de ruines. »
« Poutine a déjà perdu la guerre : il était habile jusqu’à maintenant mais son cheval est devenu fou et il n’arrive plus à l’arrêter. »
« L’Affiche rouge, le groupe Manouchian à Paris en 1942 n’avait aucune chance de gagner contre les Allemands et pourtant… L’âme de la résistance, ce n’est pas de gagner, c’est de savoir que l’on va résister et se battre. »
« Peut-être que demain, si les chars russes entrent dans Kyiv, ceux qui sont aux avant-postes partiront en courant parce que le canon, c’est terrible. »
« Poutine et les Russes n’auraient jamais pensé que les Ukrainiens seraient encore là après 14 jours de guerre : il n’y a pas eu de débandade. »

Sur l’abandon des Ukrainiens par le reste du monde
« En tant qu’être humain, je voudrais dire qu’il faut aider par tous les moyens possibles notre voisin : il se trouve que c’est l’Ukraine mais ça aurait été la Pologne, la Suède ou que sais-je, ça aurait été pareil. »
« Il ne faut pas oublier que, jusqu’au 5 décembre 1994, l’Ukraine qui était indépendante depuis 1991 après la chute de l’URSS, se trouvait à la tête d’un arsenal nucléaire issu de son héritage soviétique. L’Ukraine, le Kazakhstan et la Biélorussie signent alors le mémorandum de Budapest : ils acceptent de se dénucléariser en échange de quoi les Etats-Unis, l’Angleterre et la Russie leur promettent que leur intégralité territoriale serait assurée. Or, depuis 2014, on a de cesse de trahir les Ukrainiens et de s’asseoir sur les traités. »
« Il y a un émoi parce que les Ukrainiens sont à nos portes : lorsque j’étais à Alep, c’était les sables du désert, c’était un peu plus loin de nous et ça ne nous dérangeait pas… Là, on s’entretue sous nos fenêtres. »
« D’une certaine façon, on a abandonné les Ukrainiens mais je ne suis pas en capacité de juger. »

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