Allemagne : Sahra Wagenknecht est-elle de gauche ?
Si la « gauche anti-migrants » avait un visage, ça serait celui de Sahra Wagenknecht. Ancienne de Die Linke, la députée ambitionne de chasser sur les terres électorales de l’extrême droite. À quel prix ?
Thorsten Holzhauser, chercheur auprès de la fondation Theodor-Heuss-Haus, a consacré sa thèse de doctorat à l’histoire de l’intégration du Parti du socialisme démocratique (PDS) dans l’Allemagne réunifiée. Depuis, il s’intéresse, entre autres, au paysage politique allemand et plus particulièrement à l’évolution du parti Die Linke.
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Regards. Pourriez-vous nous faire un bref tour d’horizon du paysage politique allemand en 2023 ?
Thorsten Holzhauser. La gauche allemande est actuellement divisée en deux blocs et en différents partis. Les partis de centre-gauche – les sociaux-démocrates du SPD et les verts de Grünen – forment ensemble le gouvernement d’Olaf Scholz, mais ils souffrent des luttes permanentes avec leur partenaire de coalition, les libéraux de centre-droit du FDP, en particulier sur des questions telles que le climat, la protection, les transports, l’immigration et la politique fiscale. En théorie, on pourrait penser que ces problèmes seraient profitables au parti allemand de gauche plus radicale, Die Linke, mais il n’a pas été en mesure d’agir en conséquence. Le parti est plongé dans une crise profonde qui dure depuis plusieurs années, lorsqu’il s’est polarisé en deux ailes avec une majorité progressiste d’un côté, et une minorité plus populiste, voire conservatrice, de l’autre. La conséquence la plus récente de cette scission est le départ de Sahra Wagenknecht du parti avec certains de ses partisans, qui font désormais partie d’un nouveau parti appelé l’Alliance Sahra Wagenknecht.
Quels sont les objectifs et les ambitions de Sahra Wagenknecht derrière la création de son Alliance ?
Le premier objectif est stratégique. Dans le passé, lorsque Die Linke était dirigé par le mari de Sahra Wagenknecht, Oskar Lafontaine, il s’agissait de la plus grande force populiste d’Allemagne, combinant des politiques de gauche avec une rhétorique clairement anti-élite. Le parti était la voix forte des classes inférieures. Mais depuis une dizaine d’années, Die Linke a perdu une partie de ses électeurs au profit du nouveau parti d’extrême droite Alternative für Deutschland (AFD). Wagenknecht tente de récupérer ces électeurs.
« Il ne fait aucun doute que le clivage entre les progressistes et les conservateurs, voire les nationalistes, n’est pas l’apanage de l’Allemagne. On peut observer des débats très similaires dans la politique française avec Jean-Luc Mélenchon, entre autres. »
L’Alliance Sahra Wagenknecht fait-elle partie d’une stratégie politique plus large qui considère que pour être proche du peuple, il faut nécessairement être populiste ?
C’est ce que soutient Sahra Wagenknecht. Pour elle, être de gauche signifie être du côté des gens ordinaires et leur apporter la sécurité, non seulement matériellement et socialement, mais aussi culturellement. Autrement dit, leur offrir une sécurité face aux changements sociaux et à l’immigration. Mais la question est de savoir comment définir ces « gens ordinaires ». La vision que Wagenknecht s’en fait est, je dirais, plutôt négative : ils font déjà partie de l’Allemagne, ils ont peur de l’immigration, ils ne comprennent pas les droits des LGBT+, ils ne s’intéressent qu’à leur propre bien-être et pas à celui des autres… Cette vision fait l’objet de nombreux débats : s’agit-il toujours d’une vision de gauche ?
Qu’est-ce que la création de l’Alliance Sahra Wagenknecht nous apprend sur les tendances de la politique allemande ?
Au cours des deux dernières années, la politique allemande a été de plus en plus marquée par une polarisation sur les questions sociales entre un groupe socialement libéral et progressiste et un groupe socialement plus conservateur. Des questions telles que l’immigration et l’asile sont devenues des marqueurs dominants de la politique allemande, et le groupe conservateur a décidé de mettre l’accent sur les débats relatifs au genre, à l’écriture inclusive, aux droits des personnes transgenres, à la question de l’identité et à ce qui est communément appelé la « cancel culture ». Le problème, c’est que la ligne de démarcation entre ces deux groupes ne correspond pas nécessairement à la structure du système de partis allemand. Die Linke subit cette polarisation, mais il n’est pas le seul parti en Allemagne à souffrir plus ou moins d’une division interne entre progressistes et conservateurs : par exemple, la CDU, principal parti allemand de centre-droit, est divisée en interne entre une aile plus conservatrice représentée par la direction actuelle autour de Friedrich Merz et une aile plus libérale sur le plan social qui domine certains États de l’Allemagne. La Rhénanie-du-Nord-Westphalie, dirigée par Hendrick Wüst, pourrait être considérée comme l’un de ces États, mais ce n’est qu’un exemple parmi d’autres. Cette division entre les groupes progressistes et conservateurs se retrouve également au sein du SPD et de Grünen.
La création du parti de Sahra Wagenknecht est-elle la finalité d’une démarche politique déjà entamée depuis plusieurs années ?
En effet, le projet de Wagenknecht prend forme dans une temporalité plus longue. Au début des années 1990, les post-communistes allemands ont soutenu qu’ils n’auraient du succès dans l’Allemagne réunifiée que s’ils pouvaient attirer deux groupes d’électeurs différents : d’une part, des électeurs socialement progressistes et de gauche radicale, d’autre part, des électeurs plus conservateurs et nostalgiques, plus particulièrement dans la partie orientale de l’Allemagne qui cherchait une représentation contre les élites libérales de l’Ouest. En conséquence, Die Linke a longtemps été façonné par un mélange de positions anti-occidentales et anticapitalistes. Mais au cours de la dernière décennie, ce mélange a cessé de fonctionner. Une nouvelle génération de la gauche a tenté de positionner Die Linke davantage comme une force urbaine, cosmopolite et socialement libérale. Wagenknecht a de plus en plus rassemblé une aile socialement conservatrice, et c’est l’une des racines de la scission actuelle qui a conduit à la fondation de son nouveau parti.
La scission du parti Die Linke est-elle un symbole des scissions des partis de gauche européens ?
Il y a un côté spécifiquement allemand à ce développement, qui est lié à l’histoire de Die Linke, mais aussi à son passé, défini par une position populiste. Mais il ne fait aucun doute que le clivage entre les progressistes et les conservateurs, voire les nationalistes, n’est pas l’apanage de l’Allemagne. On peut observer des débats très similaires dans la politique française avec Jean-Luc Mélenchon, entre autres. À un autre niveau, nous avons plus ou moins la même division au sein des partis socialistes européens, notamment au sein des partis centre-gauche, sur des questions telles que l’immigration ou les droits des personnes LGBT+. Les partis socialistes dans certaines parties de l’Europe du Nord et de l’Est ont évolué vers la droite ces dernières années en essayant de rivaliser avec les populistes et les nationalistes de droite.
Un génocide est en cours à Gaza !!!
Que fait Regards ?
Regards tape encore sur Mélenchon !!!!
Chacun ses idées….
Sahra Wagenknecht est aussi une ancienne du SED, le parti au pouvoir en RDA. Elle y avait adhéré en 1989, un an avant l’écroulement du régime qu’elle servait. Et déjà de conviction très anti-migrants : le Mur de Berlin était un dispositif édifié pour empêcher les gens de passer la frontière de son pays. A l’époque la question de son orientation politique ne se posait pas. Sur le fond a-t-elle tellement changé ?
Non, enfin quelqu’un de cohérent avec ses idées et son parcours, vivement les mêmes en France ! (par contre votre blague sur le mûr, est hors de propos… )
Le Mur de Berlin est en cohérence avec ses idées et son parcours. Je ne faisais ni blague ni hors-sujet en le citant. Pour le reste, contrairement à vous, je ne souhaite pas pour la France un régime communiste. Pour aucun pays non plus.
Le SPD et les Verts ne sont pas de gauche. Le SPD est néolibéral de centre et les Verts sont bobo militaristes (Grüne Kmer). Le reste de la gauche de « Die Linke » se définit comme woke, libéral avec un vocabulaire de pseudo petit peuple. Partout où ils sont arrivés au pouvoir, ils ont suivi le centre dans les coalitions. Le problème de l’immigration en Allemagne est également gonflé par les médias, comme en France, afin de détourner l’attention des véritables problèmes de société. Oui, Wagenknecht a son propre regard sur l’immigration parce que a) les immigrés sont toujours en concurrence avec les classes inférieures et b) parce que la migration s’accompagne souvent d’une « fuite des cerveaux » et elle est la seule à nommer clairement ce problème.
Les médias la traitent encore avec des gants de velours dans l’espoir qu’elle prenne des voix à l’AFD. Mais cela va bientôt changer et elle sera alors combattue par les médias de la même manière que JLM.
Elle pourrait en effet atteindre un potentiel d’électeurs aussi élevé.
Elle est certes l’une des femmes politiques les plus populaires d’Allemagne et environ 20% d’entre elles peuvent s’imaginer voter pour elle.
» Mais il ne fait aucun doute que le clivage entre les progressistes et les conservateurs, voire les nationalistes, n’est pas l’apanage de l’Allemagne. On peut observer des débats très similaires dans la politique française avec Jean-Luc Mélenchon, entre autres. »
et donc , je comprends pas (ou je comprends trop, connaissant Regards ) : Mélenchon serait conservateur, et Garrido, Corbières , Autain, Ruffin seraient les progressistes
Regards multiplie ses attaques contre Mélenchon !!! une habitude !!!
« les nationalistes, n’est pas l’apanage de l’Allemagne. On peut observer des débats très similaires dans la politique française avec Jean-Luc Mélenchon, »
Franchement ça vaut les hitleros-troskistes de Staline !!!!
Associer LFI et JLM et le nationalisme, il faut oser !!
Mais il parait qu’on en reconnait à ça …
C’est dans les vielles marmites qu’on fait le mieux mijoter les vieilles rancœurs !!!
Allez Regards Keep cool, Quand c’est foutu, c’est foutu ! Joseph ne reviendra plus !
Débat en France aussi entre progressistes et conservateurs. Et de citer encore Mélenchon, qui a décidément le dos large. Depuis que les vedettes de Regards ont leur rond de serviette dans les télés pourries, comme BFM, le glissement à droite est de plus en plus prononcé. On a même une Catherine Tricot qui se permet, quand Mélenchon s’en prend aux éditocrates et autres chiens de garde des médias, de louer le grand professionnalisme de Ruth Elkrieff. Où s’arrêtera Regards ?