Le Pen inéligible : le bal des populistes est ouvert
Tout laisse à penser qu’au sortir de son procès, Marine Le Pen sera inéligible pendant cinq ans. La cheffe de l’extrême droite française ne pourra pas se présenter en 2027.
Marine Le Pen « empêchée » de candidature en 2027 par la justice, ça n’est pas une mince affaire. Et pourtant, force est à la loi et, faut-il le rappeler ad nauseam, les accusés, dont Marine Le Pen en premier lieu, sont accusés d’avoir détourné près de 7 millions d’euros des fonds européens.
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Si, aujourd’hui, Marine Le Pen risque l’inéligibilité de facto, quand bien même elle ferait appel de sa condamnation, c’est bien parce qu’il y a eu des précédents qu’elle n’a eu de cesse de dénoncer.
Les gouvernements successifs ont notamment fait voter deux lois, celle du 9 décembre 2016 et celle du 15 septembre 2017. Sous Hollande puis sous Macron. Et voilà que les élus sont désormais privés de leurs mandats s’ils agissent comme des bandits.
Qu’il est drôle de voir Marine Le Pen crier au scandale contre une justice quand elle a passé sa carrière à dénoncer des délits qu’on lui reproche désormais. Comme si, pour une figure politique de haut-rang, il fallait une justice parallèle.
Qu’il est ironique de voir Gérald Darmanin venir au secours de Marine Le Pen alors que son camp a justement permis cette situation. Populisme de bas étage qui mise tout sur l’oubli des citoyens – vive la presse libre !
Cependant, il faut quand même raison garder. Ces lois ont été rédigées dans l’urgence, après les affaires Cahuzac et Fillon. L’idée de rendre effective une décision de justice même en cas d’appel relève de l’extraordinaire et peut avoir des conséquences préjudiciables. Ainsi rappelle Patrick Cohen ce matin sur France Inter : « Cette exécution provisoire, d’effet immédiat, même en cas d’appel […] est en train de devenir la norme pour des élus locaux condamnés à perdre leurs mandats, dès le jugement de 1ère instance. C’est arrivé au maire de Toulon Hubert Falco. A la maire de Montauban, Brigitte Barrèges, qui a été relaxée en appel et qui a pu retrouver son fauteuil. Et encore aux maires de Gaillac dans le Tarn, de Moyeuvre-Grande en Moselle, de Bassussarry dans les Pyrénées-Atlantiques… »
Le RN sait que la sentence va tomber et passe désormais tout sur le plan politique. Ils dénoncent le « gouvernement des juges » alors qu’ils ne font qu’appliquer les lois votées par les politiques. Un gouvernement des juges, c’est exactement le contraire. Puis, de la voix de leurs porte-paroles, ils menacent Michel Barnier de censure, jouant de l’amalgame entre politique et justice.
Pour l’heure, aucun tribunal n’a encore rendu Marine Le Pen inéligible. Le procès n’est pas terminé. La pression s’exerce du politique vers le judiciaire. Avec cette idée : il faut une exception pour Marine Le Pen. Au nom du « Peuple », selon l’expertise de Gérald Darmanin. Depuis quand la justice française ne se rend-elle plus au nom du peuple français ? Populisme, encore et toujours, quelques mois après avoir tordu les élections législatives. Ils osent tout.