TRIBUNE. Un autre budget de la santé est possible !

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L’Assemblée nationale examine le projet de loi de financement de la Sécurité sociale. Les députés Hendrik Davi et Sébastien Peytavie, membres de la commission des affaires sociales, avancent des pistes pour envisager une alternative de gauche à la proposition du gouvernement.

Vendredi dernier en commission des affaires sociales, nous avons assisté à un moment historique : la commission a voté à l’unanimité un amendement supprimant l’article définissant les objectifs de l’ONDAM (Objectif National de Dépenses d’Assurance Maladie) pour protester contre l’insuffisance des budgets prévisionnels à faire face à nos besoins, en particulier pour les hôpitaux. Dans le prolongement, les membres de la commission des affaires sociales ont voté à l’unanimité contre l’adoption du PLFSS. Comment expliquer une telle déroute ?

Les propositions du gouvernement désavouées à l’unanimité

Ce gouvernement comme les précédents ne prend pas les problèmes sociaux à la racine. Prisonnier d’une logique comptable, il essaye de résorber le déficit de la sécurité sociale – de 18 milliards pour 2025 ! – en coupant aveuglement dans les dépenses de solidarité. Cette logique comptable est non seulement injuste car elle détériore l’accès aux soins des publics les plus précaires mais surtout inefficiente car elle prive de moyens la prévention. 

Alors que 20% des Français déclarent avoir renoncé à des soins pour des raisons financières en 2022, la hausse du ticket modérateur est une très mauvaise nouvelle. Cette mesure va réduire l’accès aux soins des plus modestes. Mais, elle va également générer des dépenses supplémentaires par une mauvaise orientation des parcours de soin et le report des soins vers les urgences. Pire, elle va causer la hausse des coûts des mutuelles dont les dépenses de gestion sont structurellement plus élevées que celles de la sécurité sociale. Alors que l’intensification du travail a fait exploser les cas de burn-out en France qui concernent 2,5 millions de personnes, l’abaissement du plafond de remboursement des indemnités journalières en cas d’arrêts maladie et d’accidents du travail va avoir des effets dramatiques sur la santé des salariés. 

Partir des besoins, en finir avec une logique comptable

Cette logique comptable est enfin absurde car elle empêche les professionnels de notre système de soin de bien faire leur travail. Ainsi l’assurance maladie contraint par exemple les médecins à limiter leur nombre de prescriptions de pansements. Une infirmière témoignait en ce sens qu’intervenant un jour pour enlever des points de suture à une petite fille, elle s’était rendu compte que la plaie s’était infectée, faute de soins de pansements non prescrits par le médecin traitant. L’enfant a dû être hospitalisée pendant 15 jours. Bilan comptable pour la sécurité sociale : plus de dépenses.  Pour améliorer la santé de nos concitoyens, il faut partir des besoins. Et ensuite mettre en adéquation les recettes à ces besoins. 

Nous avons besoin de plus d’infirmières, de médecins, de sage-femmes, de médiateur-trices en santé et d’aide-soignant-e-s. Pour cela, il faut augmenter le nombre de personnels soignants, formés dans nos universités et donc augmenter le nombre d’enseignant-es-chercheur-e-s dans les CHU.   

Augmenter le nombre de soignants et rendre leurs métiers plus attractifs

Il est ensuite urgent de rendre ces métiers du soin et du médico-social plus attractifs en augmentant les salaires notamment des aides-soignantes et des infirmières, mais aussi en améliorant leurs conditions de travail. Il est urgent d’instituer des normes de nombre de soignants par nombre de patients dans les services, comme cela est déjà fait pour les services de réanimation où les chiffres sont de 2 IDE pour 5 lits, 1 aide-soignant-e-s pour 4 lits… Nous devons prendre soin de ces professionnels qui portent aujourd’hui à bout de bras notre système de soin et d’accompagnement social. 

Enfin, il faut mieux doter correctement nos hôpitaux, réouvrir les lits (plus de 110 000 ont été fermées depuis 2000) et construire massivement des centres de santé publique pour en finir avec les déserts médicaux. 

Réduire certaines dépenses

Nous pouvons aussi améliorer l’efficacité de notre système de soin en réduisant certaines dépenses. Il faut encadrer la rémunération de certaines professions libérales, limiter les profits des cliniques privées et bâtir un service public du médicament pour en finir avec la spéculation des groupes pharmaceutiques. Plus largement, la santé des écosystèmes et la santé des populations sont intimement liés. Si nous voulons vraiment limiter les dépenses en prévenant les maladies, il faut en finir avec avec les pesticides qui causent des cancers chez les agriculteurs et leurs enfants et avec la pollution de l’air responsable de 47 000 décès prématurés en France.

À l’occasion de l’examen de ce PLFSS, les députés du NFP ont proposé un grand nombre de pistes de recettes. Nous proposons une réforme ambitieuse de réduction des exonérations de cotisation sociales permettant d’en finir avec les effets pallier. Cela permettrait de dégager 12,3 milliards d’euros de recettes. Nous proposons d’en finir avec la désocialisation des heures supplémentaires, ce qui rapporterait 2,5 milliards d’euros à la sécurité sociale. Nous proposons une augmentation 9,2 à 12% du taux de cotisation à la CSG sur les revenus du capital, ce qui apporterait 3 milliards de recettes de plus. Alors que depuis 2020, les 42 milliardaires français ont gagné 230 milliards d’euros – l’équivalent d’un chèque de 3 400 euros pour chaque Français ! – nous proposons donc une taxe exceptionnelle de 2% sur le patrimoine de ces milliardaires, permettant de dégager entre 2 et 5 milliards d’euros de recettes supplémentaires. 

Financer un vrai service public de la santé efficace est possible

Pour réduire les dépenses de santé, il est aussi nécessaire d’investir les politiques de prévention en modulant le prix de certaines consommations nocives pour la santé publique. C’est le sens des mesures de taxes comportementales que nous proposons sur le tabac, l’alcool et les produits sucrés et les publicités afférentes à ces produits. Ces taxes pourraient générer jusqu’à 4 milliards d’euros de recettes supplémentaires. 

Au total, c’est presque 27 milliards euros de recettes supplémentaires que ces amendements permettent de dégager, ce qui permettrait d’avoir 9 milliards de dépenses de plus et d’éviter d’alourdi de 18 milliards de plus la dette sociale. 

Hélas, les députés du socle commun ont refusé une large partie de ces propositions de recettes permettant pourtant de résorber le déficit historique de la sécurité sociale dont ils sont responsables. Dans une forme d’irresponsabilité, ces derniers sont allés même jusqu’à voter contre la proposition – timide – de réduction des allègements d’exonération de cotisations sociales de leur propre gouvernement. Ce faisant, ils renoncent donc à améliorer ou même maintenir l’accès aux prestations de soin de nos concitoyens, pourtant première préoccupation des français selon un sondage récent. Il est encore temps cette semaine lors cours de l’examen en séance publique de changer de politique et voter un projet de loi de financement de la sécurité sociale ambitieux à la hauteur des besoins réels de nos concitoyens.

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1 commentaire

  1. Françoise Haas le 30 octobre 2024 à 23:09

    S’il vous plaît, ne mincissez pas l’impact actuel du Covid-19. L’épidémie n’est pas finie. Il n’y a plus aucune mesure de prévention en dehors de la vaccination, autorisée à partir de 6 mois mais promue uniquement pour les plus de 65ans. La vaccination à partir de 2021 de larges pans de la population a permis de faire baisser la gravité et les décès lors de la phase aiguë du Covid-19. Ainsi, le gouvernement a atteint son objectif : ne pas embolie l’hôpital à chaque nouvelle vague et ne plus avoir à prendre des mesure de confinement qui affectaient l’économie. À partir de 2022 c’est la fin des mesures de prévention : arrêt de travail sans jours de carence pour isolement en cas de Covid, plus de tests PCR généralisés pour accéder à l’hôpital, fin de l’obligation du port du masque (le masque chirurgical n’est pas efficace contre les maladies aéroportées et le masque FFP2 n’a pas été recommandé, en raison du scandale de l’absence de stocks en 2020). Faute de mesures de prévention, des personnes sont mortes de Covid, seules dans les hôpitaux. Les personnels de santé sont également concernés, chaque vague a fait des victimes, a nuit à la santé des survivant·es, a détérioré leurs conditions de travail et causé des traumatismes. L’épidémie de Covid-19 continue, en l’absence de moyens de prévention : masques FFP2, moyens pour contrôler la qualité de l’air intérieur et l’améliorer par des systèmes de purification, filtre HEPA ou UV-C. Ce qui permet de limiter les déclarations de maladies nosocomiales c’est qu’elle ne peut pas être reconnue comme telle si une nuit au moins n’est pas passée à l’hôpital. Ors les soins en ambulatoires se sont multipliés, quelles que soient les conditions de vie à domiciles des patient·es, mais pour supprimer des lits et postes hospitaliers, le post-opératoire étant assuré en libéral à domicile. Sans test PCR disponibles, les tests antigèniques ne décelant qu’une infection Covid sur 3, les diagnostics sont établis sans identifier les virus, de façon symptomatiques, il n’y a donc moins de Covid-19 déclarés en faveurs de symptômes viraux. Le Covid-19 est un virus pathogène de même classe de danger que celui de la tuberculose. Le Covid-19 n’est pas un virus saisonnier ou d’hiver, il circule toute l’année, comme en témoigne la surveillance des eaux usées, associer sa vaccination avec celle contre la grippe, cause à chaque rentrée une montée des cas. Il se transmet par l’air que l’on respire, mais n’est pas une maladie pulmonaire, il s’attaque à tous les organes (sauf la prostate), a des effets à long terme : diabète, AVC, problèmes cardio-vasculaires et neurologiques. Il cause aussi des Covid long, avec arrêts maladies, invalidités, y compris chez des personnes jeunes. Il n’existe pas de traitement pour guérir le Covid long, qui en 2022 était estimé à 2 millions de personnes en France. Depuis on ne sait pas par absence de recensement alors qu’une plateforme était prévue, entre autres à cet effet, par la loi votée en janvier 2022, mais suivie d’aucun décrets d’application et le dépuré l’ayant portée ayant fini son mandat en juin suivant. Le Covid-19 est dangereux pour tout le monde et ses effets à long terme n’épargne personne, souvenez-vous des athlètes qui se sont effondré·es lors des JO de Paris. Le Covid-19 est également dangereux pour les enfants, chaque infection altère le système immunitaire. Combien de fois dans l’année, dans leur vie seront contaminés ceux qui sont nés à partir de 2020 ? Quels sont les effets à long terme sur leur système immunitaire immature ? Les enfants ne sont pas épargnés par le Covid long, ils ne sont même pas recensés. Certains ne peuvent plus suivre une scolarité normale, mais ils ne perçoivent pas d’indemnités journalières et les personnes qui les aident font comme toustes les aidant·es familiaux, iels se débrouillent. Il y a le même déni et la même absence de volonté publique devant le Covid-19 que devant le réchauffement climatique. Les 2 sont liés et nous savons qu’à l’avenir l’émergence de nouveaux virus est inévitable. Si l’on ne parvient pas à prendre les mesures contre le Covid-19 et si l’on ne tire pas les leçon de cette pandémie, comment pourrons-nous faire face aux suivantes ?

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