Roland Nivet : « La paix est une construction »

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Le Mouvement de la Paix condamne fermement les actes de guerre de la Russie et appelle partout à l’action pour dire non à la guerre. Nous avons rencontré Roland Nivet, le porte-parole du mouvement.

Regards. Que peuvent les mouvements pacifistes en temps de guerre ?

Roland Nivet. Nous avons déjà l’expérience de deux guerres mondiales qui sont la preuve que la guerre n’est jamais la solution. Le mouvement pacifiste est passé d’une opposition à la guerre à la formulation de propositions concrètes. La paix est une construction. Ça commence par réduire les dépenses d’armement. Il y a aussi d’autres initiatives que nous appelons de nos vœux : créer un observatoire des situations conflictuelles, augmenter les recrutements de diplomates, éduquer les jeunes générations à la paix. Enfin, pour créer les conditions d’une paix durable, nous devons repenser nos modes de coopérations entre pay. Ça passe par des échanges universitaires par exemple ou par la culture. Ce qui se joue en ce moment avec le conflit russo-ukrainien, c’est la question du monde dans lequel nous voulons vivre.

Moins de 24 heures après le début d’une nouvelle guerre en Europe, Macron a parlé de « tournant de l’histoire de l’Europe ». L’évolution en Ukraine évolue chaque minute mais les dernières nouvelles ne laissent pas penser que la paix est proche. Au contraire…

Je salue d’abord les initiatives diplomatiques d’Emmanuel Macron qui a cherché par tous les moyens à maintenir le dialogue avec la Russie qu’il faut cesser de diaboliser. Après une guerre, on peut compter les morts et on peut évaluer les destructions. Dans une situation de crise, on peut toujours retirer les blindés et discuter mais une fois que la guerre est engagée, c’est irrémédiable et on ne sait pas quand ça peut s’arrêter. Le puissant lobby militaro-industriel n’arrange rien. Les citoyens et les associations doivent maintenir la pression. L’histoire le montre : toutes les guerres se terminent par des négociations. Je pense que c’est encore possible. Mais il faut que les peuples se mobilisent. Et nous devons maintenir le dialogue avec la Russie.

Peut-on raisonnablement plaider pour le désarmement quand Poutine menace l’occident de sanction sans précédent si on devait « interférer » dans cette crise ? Il a parlé de « conséquences » qu’on « n’a encore jamais connues »…

Contrairement à ce que dit Emmanuel Macron, nous sommes à un tournant qui peut nous faire aller jusqu’à une crise nucléaire. Il faut que nous nous posions la question de l’élimination des armes nucléaires. En janvier 2017, la France a fait une conférence de presse commune avec les Etats-Unis pour dire qu’il ne fallait pas aller à l’ONU discuter du traité d’interdiction des armes nucléaires. Une autre contradiction, c’est le traité constitutif de l’Union européenne où il est écrit noir sur blanc que la sécurité européenne ne peut se concevoir que dans un lien étroit avec l’OTAN. La solution d’une paix durable ne peut passer que par le désarmement de nos sociétés et le renforcement de nos diplomaties.

Bertrand Badie explique souvent qu’aujourd’hui, le médiateur suprême ne passerait plus par une sorte de géopolitique orchestrée par les diplomaties nationales mais par les peuples et les sociétés civiles. Vous partagez son analyse ?

Le problème, c’est que les peuples n’ont pas encore pris pleinement conscience qu’ils représentaient la force dont parle Bertrand Badie. Même sur le désarmement nucléaire, on a fait un sondage avec le journal La Croix il y a 4 ans et qui révélait que 75% des Français voulaient le désarmement nucléaire et que 68% souhaitaient que l’on ratifie le traité d’interdiction des armes nucléaires. Si tous ces gens se mobilisaient, il est certain que l’Etat bougerait. Il faut que l’on arrive à une sorte de journée mondiale contre la guerre comme il y a en a eu au moment de la guerre en Irak.

 

Propos recueillis par Pierre Jacquemain

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