Se doter d’une armée quand les fascismes soufflent fort ?

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Si l’on écoute de nombreux exécutifs européens, à commencer par la France, la guerre qui point à l’Est clôt le débat sur une défense commune : il en faut une. Pourtant, les inquiétudes sont légitimes et certaines questions aussi cruciales qu’irrésolues.

Emmanuel Macron l’a dit une nouvelle fois mercredi soir, face à la menace russe et au revirement étasunien, il faut agir rapidement « en Européens ». Pourtant la donne politique sur notre continent a de quoi poser de sérieuses questions quant à la construction d’une défense commune. Entre les États dirigés par l’extrême droite comme l’Italie ou la Hongrie, et la puissance de la dynamique fasciste dans les autres pays, la création d’une force armée qui nous réunirait peut même inquiéter. C’est cette inquiétude que nous avons proposée à des politiques de gauche de France et d’Italie et au philosophe Étienne Balibar (à retrouver ici, ici et ).


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À dire vrai, notre angoisse n’a rencontré que peu d’écho. Chacun renouvelle ses convictions. Ceux qui, à gauche, veulent avancer dans une intégration plus grande de l’Europe veulent croire que la création d’une armée commune et son corollaire, une politique internationale partagée, est de nature à souder les Européens et à contenir la poussée d’extrême droite. À ces Européens convaincus, on fera remarquer que cela n’est jamais advenu. Il faut s’interroger sur ce point. Si l’Union européenne ne s’est jamais dotée d’une armée ce n’est pas parce que les États-membres qui la composent sont antimilitaristes mais parce que jamais une direction commune n’a réussi à voir le jour. L’opposition à la Russie de Vladimir Poutine qui nous unit largement ne suffit pas à déterminer une politique commune de défense en de larges points et pour longtemps. Des dynamiques convergentes, largement sous influence néolibérales, ont réussi à instaurer un espace de libre-échange et un marché commun ; le mouvement ouvrier et les forces progressistes ont réussi à conquérir quelques droits sociaux ; d’autres à élargir l’espace du droit. Mais pas davantage – et surtout ni politique étrangère commune ni armée européenne. Ces objections massives et objectives demeurent. Vouloir n’est pas toujours pouvoir. 

Une autre partie de la gauche pense que la médiocrité des politiques sociales et écologiques européennes sont des carburants pour l’extrême droite. Ils ne voient pas dans cette intégration nouvelle au travers d’une armée une solution pour bloquer l’extrême droite et en nourrissent dès lors de vives inquiétudes. À ceux-là nous pouvons dire que la question n’est pas pour ailleurs. Les idées de l’extrême droite se nourrissent d’une légitime peur de la guerre et d’égoïsmes dangereux et elles ne reculeront pas du fait d’un retrait des affaires du monde. Ajoutons que la dissuasion nucléaire dans les mains du Rassemblement National a de quoi effrayer.

Nos nuits seront courtes…

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