TRIBUNE. L’intersyndicale a beaucoup à nous apprendre

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Comment caractériser la situation politique actuelle et quel horizon politique au-delà du retrait de la réforme ? On a posé la question aux membres des quatre partis de la Nupes. Ici le communiste Ian Brossat.

Rude exercice que celui qui consiste à dresser aujourd’hui le bilan des trois mois intenses qui viennent de s’écouler. Pour au moins deux raisons. D’abord, parce que la bataille des retraites n’est pas terminée, n’en déplaise au président de la République qui voudrait refermer cette « séquence » comme on termine la première saison d’une série. La mobilisation se poursuit, elle prend des formes nouvelles avec les « casserolades », les manifestations de colère qui accompagnent toutes les sorties publiques des figures de la Macronie…

 

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Ensuite, la situation est difficile à résumer précisément parce qu’elle est traversée de contradictions multiples. D’une part, une intersyndicale unie, des mobilisations gigantesques rassemblant des millions des travailleurs, des grèves massives – malgré le sacrifice que représente une journée de salaire perdue dans cette période d’inflation galopante – et surtout le soutien constant et encore inentamé des Français. Tout cela est bel et bien réel. Nous ne l’avons pas rêvé. Nous l’avons fait. Collectivement.

« La France n’est plus tout à fait la même à l’issue de ces trois mois. Les idées de justice et de solidarité ont gagné du terrain. Pour le dire en quelques mots : ils ont d’ores et déjà perdu. Nous n’avons pas encore gagné. »

D’autre part, un gouvernement qui a choisi jusqu’à présent de rester droit dans ses bottes, balayant d’un revers de main la colère populaire. Il a usé de tous les outils les plus autoritaires qui sont à sa disposition : du 49.3 à la répression policière sur les manifestants en passant par les maires mis à l’index par les préfets pour avoir osé afficher leur soutien à la grève sur le fronton de leur mairie. En conclure que la mobilisation a été un échec serait trop rapide. Parce que la France n’est plus tout à fait la même à l’issue de ces trois mois. Les idées de justice et de solidarité ont gagné du terrain. Pour le dire en quelques mots : ils ont d’ores et déjà perdu. Nous n’avons pas encore gagné.

C’est donc cette perspective de victoire qui doit nous occuper. Gagner sur les retraites et conquérir le pouvoir demain. La question est d’autant plus vive que nous ne sommes pas seuls dans ce combat face à la Macronie. L’extrême droite attend son heure. Et elle sait que la colère sans espoir, c’est de l’or en barre pour elle. C’est donc à nous – à la gauche dans sa diversité – qu’il revient de redonner de l’espoir.

De ce point de vue, l’intersyndicale a assurément beaucoup à nous apprendre. Sur trois points au moins.

  • Premièrement, par sa capacité à faire l’union sans écraser personne, à bâtir l’unité dans le respect de chacune de ses composante. Et pourtant, ce ne sont pas les différences qui manquent.
  • Deuxièmement, par sa capacité à mobiliser massivement dans les sous-préfectures autant que dans les grandes métropoles.
  • Troisièmement, en faisant la démonstration qu’il est possible de rassembler une très large majorité de notre peuple autour des enjeux du travail : sa place dans nos vies, sa rémunération, son sens…

Nous rassemblons aujourd’hui un Français sur quatre. C’est le score de la Nupes aux dernières législatives. C’est celui qu’on nous prête si des élections avaient lieu demain. L’intersyndicale, elle, rassemble trois Français sur quatre. C’est dire que nous avons une marge de progression conséquente.

J’ajouterais un élément. La victoire, cela suppose la capacité à rassembler une majorité. Les institutions actuelles font que les élections présidentielle et législatives sont des scrutins à deux tours. Chacun le sait – et cela peut relever de l’évidence – mais j’y insiste. Car l’enjeu n’est pas seulement d’arriver au second tour, mais de le gagner. Longtemps, les duels face à l’extrême droite étaient quasi systématiquement couronnés de victoire. Les dernières législatives l’ont prouvé : ce n’est plus le cas. La qualification au second tour est une condition nécessaire de la victoire, mais pas suffisante. Il nous faut donc montrer dès le premier tour un visage suffisamment rassembleur pour être capables de gagner au second.

De tout cela, parlons ensemble. Débattons. Sans caricatures ni faux semblants. C’est ainsi que nous avancerons ensemble et que nous créerons les conditions des victoires d’aujourd’hui et de demain.

 

Ian Brossat, maire adjoint de Paris en charge du logement, porte-parole du PCF

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