Cette semaine d’« apaisement » vous a été offerte par Emmanuel Macron

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Un tel décalage entre les paroles et les actes, ça relève de l’art. Chronique des performances des pompiers pyromanes.

« Nous avons devant nous 100 jours d’apaisement », a déclamé le président de la République lundi 17 avril, lors de son énième allocution télévisée. Il faut dire que la France est loin de se tenir sage. Pas un Macroniste, ministre ou député, ne peut apparaître en public sans provoquer une bronca. Que la semaine fut longue !

 

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Et maintenant, quel « ordre de bataille » ?

 

Mardi 18 avril, jour 1

Au sortir de son allocution, on découvre que le Président s’est offert un moment de com’ inopiné. Une vidéo tourne sur les réseaux sociaux. On y voit Emmanuel Macron tout tranquille dans les rues de Paris, croiser des gens avec lesquels il entonne un chant traditionnel pyrénéen. Problème : ses compagnons de chorale sont des membres d’un groupe d’extrême droite. Une scène pleine de coïncidences qui laisse pantois.

Puis la journée du mardi sera consacrée à la droitisation de l’exécutif – oui oui, ils peuvent aller plus à droite ! C’est Bruno Le Maire qui ouvre le feu sur BFMTV : « Nos compatriotes en ont ras-le-bol de la fraude. […] Ils n’ont aucune envie de voir que des personnes peuvent bénéficier d’aides, les renvoyer au Maghreb ou ailleurs, alors qu’il n’y ont pas droit. »

Sur France 5, Olivier Véran nous offre cette diversion sarkozyste : « Je pense qu’il faut une convention citoyenne sur la question de l’immigration et de l’intégration », assène celui qui est, rappelons-le sans cesse tellement on ne se lasse pas de cette blague, ministre du Renouveau démocratique.

Et quoi de mieux pour finir la journée qu’un ministre du Travail en remettant une couche sur la réforme des retraites ? Olivier Dussopt, au micro de BFMTV : « Les conditions de l’apaisement, c’est de faire en sorte que cette réforme s’applique dans de bonnes conditions ».

Mercredi 19 avril, jour 2

Le chef de l’État est en déplacement en Alsace. Il « va au contact », selon l’expression consacrée, pour la première fois depuis son allocution. Avant son arrivée, la zone est vidée et bouclée. Un arrêté préfectoral interdit les rassemblements.

Malgré toutes ces précautions, il sera sifflé, hué, menacé et insulté. Il lance : « Ce n’est pas la première fois que j’entends des gens qui râlent après moi […] J’ai eu bien pire » ; « C’est pas les casseroles qui feront avancer la France. On peut relancer massivement l’industrie de casseroles aussi, on n’en produit pas assez, mais moi ce qui m’intéresse c’est ce qui va permettre à nos compatriotes de mieux vivre. » ; « C’est le président qui décide. J’ai un CDD jusqu’en 2027. »

Puis il y a eu cet échange entre Emmanuel Macron et un ouvrier, relaté par Johan Faeber sur Twitter :

« Vous travaillez ici depuis quand ?
– Depuis 1979.
– Ah ben alors vous ne prenez pas votre retraite ? »

Et le président de la République de rire à sa « blague ».

Le soir, le journal régional Dernières nouvelles d’Alsace publie une interview d’Emmanuel Macron où il assure dire « toujours la vérité aux Français », avant d’affirmer : « Je n’ai jamais empêché les gens de parler, d’exprimer les oppositions, de manifester. »

Jeudi 20 avril, jour 3

Emmanuel Macron se rend dans les Cévennes. Les « dispositifs sonores portatifs » sont interdits par arrêté préfectoral – grâce aux différentes lois antiterroristes. Les gendarmes perquisitionnent les casseroles des manifestants. Encore une fois, la situation est extrêmement tendue. Seule une action policière intense permet au Président de voir la couleur du ciel.

Vendredi 21 avril, jour 4

Le ministre de l’Intérieur assure que « les casseroles ne sont pas interdites », qu’il ne s’agirait que d’une « mauvaise interprétation des gendarmes » (salut les débiles !). Quelques heures plus tard, le ministre de l’Éducation avance que « confisquer les casseroles relève du maintien de l’ordre ».

Lequel des deux ment ?

Élisabeth Borne, elle, ment assurément quand elle nie les interdictions de manifester… des arrêtés préfectoraux « d’interdiction de manifestation » ! La fin justifiant les moyens, il s’agissait pour la Première ministre de s’en prendre à Jean-Luc Mélenchon.

Pendant ce temps-là, un camion de la CGT tourne autour de l’Élysée, avec le slogan « Notre retraite, on n’y touche pas » inscrite sur le flanc. Le véhicule sera arrêté et les deux syndicalistes présents à son bord passeront une heure au commissariat. Selon Remy Buisine, ils seront convoqués le 9 mai prochain pour « manifestation illégale ».

Samedi 22 avril, jour 5

La procureure de Colmar annonce que trois personnes seront jugées en septembre pour avoir fait des doigts d’honneur à Emmanuel Macron lors de son déplacement alsacien du mardi. Pour info, aucune de ces personnes n’est Éric Dupont-Moretti.

Dimanche 23 avril, jour 6

Au Parisien, Emmanuel Macron réitère : « Quand vous avez des gens qui sont là uniquement pour couvrir votre voix, voire vous jeter des choses, ce n’est plus une contestation, cela s’appelle de l’incivisme. » Par ailleurs, le Président désavoue une nouvelle fois sa Première ministre, expliquant qu’il aurait dû plus « se mouiller » dans cette réforme des retraites.

Plus que 93 jours d’apaisement.

 

Loïc Le Clerc

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