Michel Barnier compte ses abattis

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Dans son discours de politique générale, le nouveau premier ministre a donné la mesure de sa fragilité et de sa solitude politique.

Michel Barnier cherche à gagner du temps… et prend son temps en livrant, ce 1er octobre, un discours sans flamboyance – il est vrai que l’heure ne s’y prête guère et qu’il n’a pas été choisi pour cela.


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À défaut de grand dessein, il a commencé son intervention par une leçon de respect et de courtoisie érigés par lui, puis par Marine Le Pen, en règle républicaine. Un piège clairement destiné à ostraciser LFI et à la couper de ses partenaires du NFP, piège dans lequel les députés LFI sont tombés avec enthousiasme, accompagnant tout le discours de cris véhéments. Malheureusement chahuter n’est pas résister. Ce discours fut surtout – au-delà de l’onctuosité du ton du premier ministre – un équilibre entre phrases par trop générales et quelques mesures pour faire patienter. Le plat de résistance viendra avec le projet de budget.

Prenant tout le monde à contre-pied, Michel Barnier a promis la vérité sur la dette économique… et écologique. Pour ce qui est de la dette économique, le premier ministre ne veut pas endosser la responsabilité des déficits (comptes publics en premier lieu) sans fâcher les macronistes. Malgré la prudence de ce discours, Gabriel Attal n’avait pas l’air content. Plus droitier que jamais, l’ex-premier ministre s’est attaché à défendre un bilan indéfendable et à imposer sa ligne rouge : pas touche au mythe du ruissellement – qui aurait créé de l’emploi et donc de la richesse (lol) – et à l’impôt des plus riches. On verra comment Barnier se sortira de cet oukase, lui qui a promis de ramener le déficit à 5% l’an prochain et 3% en 2029.

Entre injonctions contradictoires et promesses qui n’engagent que ceux qui y croient, Michel Barnier joue les équilibristes.

Aussi a-t-il osé une trouvaille pour remplir les caisses de l’État : il a promis la lutte contre la fraude sociale en annonçant mettre en place la carte vitale biométrique ! Cette proposition participerait d’une mise en fiche de la société qui préoccupe les défenseurs des libertés individuelles – il en reste. Surtout, cette mesure alimente le discours du RN sur les causes du malheur français : les assistés et les immigrés. À défaut de solution, Barnier cotise au discours de l’extrême droite et le crédibilise, comme s’en est réjoui sa présidente Marine Le Pen.

Concernant la dette écologiste, il a réaffirmé sa volonté de produire une énergie décarbonée en donnant une impulsion au nucléaire et aux énergies renouvelables. Il a promis également de mieux isoler les bâtiments publics appartenant à l’État. Dans le même temps, il a annoncé un nouveau sursis pour isoler les logements et il a remis en cause l’artificialisation zéro des sols pour permettre la relance du pavillonnaire grâce au prêt à taux zéro. Entre injonctions contradictoires et promesses qui n’engagent que ceux qui y croient, Barnier joue les équilibristes.

Les chefs de groupe des partis du NFP ont tous rappelé l’illégitimité politique de ce gouvernement. Ils le censureront. Marine Le Pen a feint de vouloir juger sur pièce dans les semaines et mois à venir. On sait d’ores et déjà que son calendrier est écrit : surmonter le procès des assistants parlementaires, préparer le programme, remettre en ordre le parti, trouver des candidats et… elle donnera l’assaut au pouvoir.

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1 commentaire

  1. carlos_H le 3 octobre 2024 à 13:30

    « Les chefs de groupe des partis du NFP ont tous rappelé l’illégitimité politique de ce gouvernement. Ils le censureront.  »
    => ET?
    Puisqu’il est à peu près évident que l’union des droites, de l’extrême-centre à l’extrême-droite en passant par Les Républicains les plus réactionnaires, semble en bonne voie de réalisation, qu’espérez-vous de cette censure votée par le NFP (enfin, on verra qui du parti socialiste ne la votera pas…)? Qu’elle aboutisse?
    Peut-être devriez vous en attendre autant que du processus de destitution, non?
    Et si non alors pourquoi?
    Qu’est-ce qui vous permet de penser qu’il y aurait + de volontaires à droite pour voter la censure qu’à voter la destitution? Le PS a déjà montré qu’il était capable de trouver des arguments pour éviter de mettre au premier plan du débat public la crise démocratique critique que nous traversons actuellement grâce au processus de destitution enclenché et qui pointe l’incapacité de Macron à reconnaître le résultat des élections législatives quitte à se subroger à la censure parlementaire (car il revenait à l’Assemblée de « censurer » Lucie Castets…, pas au président!) en totale contradiction avec le devoir attendu de sa fonction! Mais au-delà, le processus de destitution promettait d’installer une discussion dans la société sur le type de pouvoir auquel les français étaient prêts à se soumettre: Faut-il un pouvoir autoritaire verticale à la Macron (le RN en rêve) ou un pouvoir plus démocratique en France? La gauche si elle s’était unitairement engagée dans le processus de destitution aurait ainsi permis de faire glisser le combat politique de l’opposition droite/gauche vers celui de la barbarie contre la démocratie, l’instauration de la loi du plus fort vs l’affirmation de l’Etat de droit, etc…

    D’autre part, s’agissant de la politique présidentielle, si le chef de l’État reste responsable devant le Peuple, c’est bien à l’Assemblée Nationale que le processus de destitution du président peut-être lancé à travers l’article 68: le débat public par la suite devait finir de convaincre les parlementaires, érigés en haute-cour, de valider ou non la destitution… Après tout, la prérogative de nommer le premier ministre n’échappe pas à cette règle de base de devoir le faire en respectant la volonté populaire! Or, dans quel autre but que de demander l’arbitrage du Peuple, sa parole, pour résoudre une crise ou un blocage institutionnel , la dissolution de l’Assemblée Nationale a t’elle été ordonnée par le président? Que peut on déduire de son refus de tenir compte de cet arbitrage en nommant un premier ministre représentant 6% des scrutins? Le président a t’il fait preuve d’insincérité lorsqu’il a indiqué qu’il « redonnait la parole au Peuple »… « rien de plus républicain » s’empressait-il s’ajouter alors!
    Cela mérite bien de s’intéresser autant à la forme qu’au fond! Peut-on émettre une décision ou un jugement sans tenir compte de l’esprit d’un texte résumé dans son article 3 :  » gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. »?
    Je pense que sous la pression populaire, on aurait pu s’attendre à quelques surprises avec la procédure de destitution… On en n’attend aucune concernant celle de la censure.

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