Mayotte : un défi global pour l’État

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À certains endroits de l’île, le cyclone Chido a tout détruit. Mais la catastrophe mahoraise n’est pas qu’une affaire climatique.

« Où sont les gens ? Ils habitaient dans des cases en tôle, sans soubassement. Il n’y a plus rien que le silence », souffle le sénateur mahorais Saïd Omar Oili. Le nombre de morts enregistré « n’est pas en adéquation avec la réalité des 100 000 personnes qui vivent dans un habitat précaire », relève le ministère de l’intérieur. Il y a les innombrables morts… et il y a les vivants, sans abris, isolés, blessés sans accès aux soins, assoiffés et affamés.


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Les moyens déployés par l’État depuis l’île de la Réunion sont considérables pour apporter de l’eau, de la nourriture, déblayer les routes et remettre en marche électricité et réseaux de communications. Emmanuel Macron va atterrir ce jeudi sur l’île avec un avion plein de vivres. François Bayrou, taxé d’avoir mal apprécié la situation, déclare que « la France fait face à la pire catastrophe naturelle depuis des siècles ». L’onde de Valence se fait sentir : dans des situations extrêmes, l’État et ses représentants sont attendus, vite et fort.

La reconstruction va commencer sans tarder. Et c’est déjà la fin de l’union nationale. D’où vient l’ampleur de la catastrophe ? Comment rebâtir pour que cela ne recommence pas ? 72 heures à peine après le passage du cyclone, Bruno Retailleau livre son diagnostic sur X : « On ne pourra pas reconstruire Mayotte sans traiter, avec la plus grande détermination, la question migratoire […] Il faudra légiférer pour qu’à Mayotte, comme partout sur le territoire national, la France reprenne le contrôle de son immigration. » En accord avec la plupart de la population mahoraise, le premier flic de France a un marteau et voit tous les problèmes en forme de clou. Comme l’extrême droite, il a une obsession et une seule. La porte aux explications simplistes et aux solutions expéditives lui avait été ouverte en 2023 par Gérald Darmanin et son opération « Wuambushu » visant à détruire l’habitat indigne, augmenter les expulsions et lutter contre les arrivées en bateau de Comoriens.

Quelques pistes méritent d’être suivies : reconstruire mais en anticipant les effets d’un climat déréglé. Cesser les expulsions en masse vers les Comores. Créer – enfin – un accès général à l’eau potable. Considérer Mayotte comme une île dans un archipel.

La Cimade rappelle « c’est la précarité extrême des personnes qui les a exposées, pas leur statut administratif ». L’Insee nous apprend que 42% de la population vit avec moins de 160 euros par mois et un tiers des habitants vit dans des bidonvilles insalubres. Ce n’est pas le droit du sol, mais les écarts de PIB entre Mayotte et les Comores qui justifient les mouvements de population. Cette réalité s’impose : les hommes se battent pour vivre et rien ne les arrête.

Quelques pistes méritent d’être suivies : reconstruire mais en anticipant les effets d’un climat déréglé. Cesser les expulsions en masse vers les Comores qui laissent des mineurs isolés aux prises avec la violence pour survivre, cause de beaucoup d’insécurité. Créer – enfin – un accès général à l’eau potable. Considérer Mayotte comme une île dans un archipel.

Insistons ici sur le rôle incontournable de l’État dans l’urgence mais aussi pour conduire la reconstruction. À l’heure où les normes sont décriées, celles qui définissent les constructions anticycloniques doivent s’imposer. Elles peuvent faire l’objet de nouvelles réflexions et retour d’expériences mais il est certain qu’elles ne s’accommoderont pas de constructions légères en tôle ondulée. Reconstruire coûtera cher en argent et en innovation pour faire avec les Mahorais. Couler du béton ne peut pas être la première réponse.

Le second axe incontournable est celui d’une nouvelle approche de l’avenir de Mayotte et de l’archipel des Comores. Dans les années 70, Valéry Giscard d’Estaing rappelait : « Les Comores ont toujours été une unité. Il est naturel que leur sort soit un sort commun ». Et de fait les liens familiaux et de solidarité forment une toile dense, quel que soit le statut de ces îles. L’indépendance ou non n’est pas la question ultime.

La fragilité des îles impose de ne pas les isoler. Le monde vit un moment de repli quand il faudrait penser interdépendance. Pour Mayotte, comme dans les Caraïbes ou dans l’océan Pacifique, les îles peuvent choisir de rester françaises ainsi que l’ont voulu ici les habitants. Mais la France n’a pas à les séparer de leur géographie et de leur histoire. Un objectif de la diplomatie française serait sûrement de faire émerger des unités de solidarité entre territoires aux destins liés. Et d’y participer.

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