Le patronat a un plan : l’extrême droite au pouvoir

Image

Le Medef oppose une levée de boucliers à toute idée de redistribution des richesses, quitte à bloquer encore plus la situation politique…. car il a une alternative du côté de chez Marine Le Pen.

« Si les impôts augmentent, il y aura une grande mobilisation patronale, au-delà du Medef », menace Patrick Martin, le patron des patrons. Et de prévenir : les entreprises ne sauraient être la « variable d’ajustement » du budget 2026. La « taxe Zucman », défendue par la gauche, serait « un frein terrible à l’investissement et à la prise de risque », voire « une forme de spoliation ». Le patronat ne se contente plus de faire pression discrètement. Les patrons ont un plan.


TOUS LES JOURS, RETROUVEZ L’ESSENTIEL DE L’ACTU POLITIQUE DANS NOTRE NEWSLETTER

👉 C’EST ICI ET C’EST GRATUIT


Chaque fois que la gauche a esquissé un projet de redistribution ou d’émancipation, le camp patronal s’est levé comme un seul homme. Dans les années 1970 déjà, à la perspective de l’arrivée de la gauche au pouvoir, les « forces vives de la nation » (mdr !) se coalisaient pour alerter sur la « catastrophe » économique à venir (qui n’est pas advenue). Quelques décennies plus tard, en 1997, la mise en place des 35 heures fut accueillie par une campagne patronale massive, saturant les tribunes médiatiques de prédictions apocalyptiques.

Ces épisodes rappellent une évidence : le patronat ne se vit pas seulement comme un acteur économique mais comme une classe sociale qui défend ses intérêts. Mais à cette tradition s’ajoute aujourd’hui une nouveauté inquiétante. Le patronat ne ferme plus la porte à l’extrême droite : il l’entrouvre, parfois même l’ouvre en grand. Laurence Parisot, présidente du Medef au tournant des années 2010, pouvait encore affirmer qu’« il n’y avait pas de valeurs communes avec le Front national ». Cette mise en garde a fait long feu… Désormais, de grands PDG ou même le patron du Medef rencontrent Marine Le Pen et le Rassemblement national est convié au grand rendez-vous annuel des patrons. Le danger n’est plus l’extrême droite mais la gauche et ses projets fiscaux. De fait, aux dernières élections législatives, le patronat n’a pas appelé au barrage républicain. Il préfère, comme l’écrit Laurent Mauduit dans Collaborations (La Découverte), travailler à amender le programme du RN « afin qu’il s’écarte le moins possible d’une ligne pro-Europe et pro-business ».

Les patrons ont une alternative politique qui leur convient, qui est compatible avec l’idée qu’ils se font du monde, de leur place dans ce monde : celle de chefs qui le méritent. Ils quittent les rives de la démocratie. Et si pour cela, il faut s’allier à l’extrême droite, qu’importe.

Les patrons ne sont pas seulement opposés aux projets de gauche. Désormais ils ont une alternative politique qui leur convient, qui est compatible avec l’idée qu’ils se font du monde, de leur place dans ce monde : celle de chefs qui le méritent. Ils quittent les rives de la démocratie. Et si pour cela, il faut s’allier à l’extrême droite, qu’importe. L’humanité n’est pas leur critère, la justice sociale encore moins. Leur combat : préserver l’investissement, encourager la prise de risque, sauver l’économie. Derrière ces mots, il y a une logique de classe : refuser toute redistribution qui viendrait rogner les profits, même marginalement. Il y a une pensée de la dynamique sociale : elle se doit d’être inégalitaire. 

L’histoire sociale française a montré que les patrons savaient s’opposer aux conquêtes sociales. Aujourd’hui, ils traversent des frontières politiques jugées infranchissables depuis 1945… Actant la déroute de la Macronie, le patronat a un plan B : dealer avec l’extrême droite voire lui paver le chemin du pouvoir. Ce serait la conséquence consciente de leur intransigeance sur le conclave sur les retraites et leur refus catégorique de toute redistribution. L’indignation morale ne suffira pas. Il faut une mobilisation intellectuelle et sociale.

Partager cet article

Actus récentes

Abonnez-vous
à notre NEWSLETTER
quotidienne et gratuite

7 commentaires

  1. Piboudy le 16 septembre 2025 à 16:39

    Bonjour,

    Nous savons tous que (presque tout) le patronat ne voit pas plus loin que le bout du nez de ses intérêts qui se résume à un seul composant : le fric, le fric, le fric !
    La situation est la même, en tous temps et en tous lieux.

    Souvenez-vous des industriels qui ont financé Hitler (https://leco.playbacpresse.fr/article/ces-entreprises-forcees-ou-non-de-soutenir-hitler) et des industriels italiens qui soutenaient Berlusconi. Aujourd’hui les géants américains soutiennent Trump.

    Le patronat préférera toujours un gouvernant fort qui va dans leur sens.

    L’histoire bégaye sérieusement.

    Cordialement.

  2. Philippe VIVET le 17 septembre 2025 à 22:50

    Merci Pablo pour ton analyse que je partage d’autant plus que j’en étais convaincu depuis au moins 5 ou 6 ans.
    Quand la menace rouge (fût-elle quelque peu pâle…) est par trop pressante, le patronat et les droites savent faire bloc.
    L’Histoire nous en est témoin : Von Papen et Hindenburg avec Hitler, Friedman, Hayek et l’École de Chicago avec Pinochet par exemple.
    Après tout Meloni fait le job et Paris valant bien une messe, Bardella pourrait en faire autant quitte à faire passer à Marine une nuit des longs couteaux mais soft…soft…
    J’ai un (micro-) désaccord avec toi : le Programme Commun des années 70, Mitterrand 81-83, les 35 heures n’étaient pas révolutionnaires mais s’en prenaient au taux de profit et étaient à ce titre insupportables à la droite et au patronat.
    Cela dit, il y a 2 différences notables entre cette époque et l’époque actuelle, qui peuvent radicaliser nos adversaires :
    – le Capital était alors en « bonne santé », actuellement productivité et profitabilité sont en déclin. La (si douce) taxe Zucman et puis quoi encore !
    – le Capital français et européen est en chute libre, un vrai boulet pour le Capital global, la Chine, les USA. Il serait temps que la Sainte Alliance intervienne comme au bon vieux temps…

  3. Marie-Amélie le 18 septembre 2025 à 09:12

    Il est temps que nous ayons un président pragmatique, modeste et ne dénigrant pas les chasseurs.
    François Ruffin coche toutes les cases pour succéder à Macron.

    • Berthelot Jacques le 19 septembre 2025 à 17:41

      Modeste en s’auto désignant candidat et vainqueur d’une hypothétique primaire à gauche candidature portée par qui , quelles associations quelles forces politiques ?

  4. Berthelot Jacques le 19 septembre 2025 à 05:53

    Il faut noter la tartufferie du RN , en odeur de sainteté auprès du patronat et des plus riches.
    D’un côté par sa propagande il se présente comme le défenseur du peuple , des plus modestes , et de l’autre il est contre l’ISF , contre l’augmentation du SMIC , d’accord avec la FNSEA , pour la loi Duplomb ….
    La gauche doit les démasquer : rendre compte de leurs votes à l’assemblée , dénoncer leur projet antisocial.
    leur projet repose sur une chose: instaurer l’Apartheid en France : priver celles et ceux qu’il appelle les « non européens » entendez par là les noirs et les arabes de tous les droits : emploi , logement, protection sociale , diverses allocations.
    Il laisse entendre que les économies faites seraient consacrées aux plus modestes , mensonges , escroquerie , racisme institué.
    leurs électeurs modestes n’ont rien à gagner de leur arrivée au pouvoir.

  5. Lucien Matron le 19 septembre 2025 à 07:39

    L’ alliance de l’extrême droite et du patronat n’est pas nouvelle. Les leçons de l’histoire ne sont jamais retenues. «  Mieux vaut Hitler que le Front Populaire » était déjà la stratégie du très grand patronat avant la dernière guerre mondiale. De nombreux grands groupes industriels ont collaboré directement avec l’Allemagne nazie…Aujourd’hui en France ou ailleurs, le patronat et les grandes fortunes ont compris que les besoins et les aspirations de la population étaient contraires à leurs intérêts : justice sociale et fiscale, éducation pour tous, santé publique, logement décent, aspirations à une vie meilleure, égalité des droits, etc…
    Pour empêcher toute transformation sociale , le grand patronat et les détenteurs de capitaux ont compris qu’il leur fallait gagner plusieurs batailles : la bataille culturelle et des idées en faisant main basse sur les médias de toute nature ( d’internet à la presse papier en passant par les radios et les écrans!, la bataille sociale en tentant d’éliminer toutes les résistances syndicales, la bataille environnementale en refusant toutes les normes contraignantes, la bataille de l’éducation et de la formation en saccageant la formation des enseignants et le fonctionnement de l’enseignement, etc….Ils peuvent s’appuyer sans complexe sur l’idéologie du Rassemblement National, celle de Trump et Cie. ..Le succès de la mobilisation du 18 septembre est un espoir pour toutes celles et tous ceux qui veulent résister et empêcher le front patronal nationaliste.

  6. Broca-75005 le 20 septembre 2025 à 21:00

    On attend encore les commentaires attristés de François Hollande trop occupé avec sa fondation éthique financée par Total et les autres zinzins français.
    Le problème, c’est d’avoir la mémoire longue, Macron, il ne vient pas de nulle part, Hollande, il ne vient pas de nulle part, Mitterrand non plus.
    Un commentaire cite « Von Papen et Hindenburg « avec » Hitler », en fait, on pourrait plutôt citer Janvier 1919, la semaine sanglante « Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht « avec » Gustav Noske C’est bien le SPD qui a ouvert la porte, les autres s’y sont engouffrés tranquilles.
    Maintenant, il ne reste plus qu’à citer la phrase trop célèbre de Gramsci.

Laissez un commentaire