LA LETTRE DU 12 DÉCEMBRE

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« En fanfare » : en attendant le nouveau premier ministre, laissez-moi rêver en liberté !

par Catherine Tricot

Dans la vie, il y a des choses plus importantes que de connaître le nom du locataire de Matignon : aller voir le film d’Emmanuel Courcol. 

Au moment où vous lirez cette lettre, il y aura un nouveau premier ministre. Ou pas. Emmanuel Macron l’a promis dans les 48 heures mais il ne tient pas toujours ses promesses. Que dire de plus ?

Redire que la seule sortie réaliste est la nomination d’un premier ministre issu de la coalition NFP, avec la mise en sourdine et en retrait des macronistes faute de quoi, après la chute du gouvernement de « socle commun », celui-ci tombera aussi. Cette solution s’impose par la composition de l’Assemblée, parce que le pays ne peut pas poursuivre le tangage politique, parce que le président y perdrait sa place, inéluctablement. Il a les moyens de faire entendre raison à ses troupes. Si lui-même retrouve raison. Pas certain.

Redire aussi que la gauche est diverse et qu’il ne faut pas le redécouvrir chaque matin. Et que donc il n’y a pas qu’une façon de répondre aux questions politiques essentielles. Mais qu’elle doit rester rassemblée. Hier, un sondage qui n’est qu’un sondage rappelait la puissance de l’extrême droite politique en France. Il faut être prêt à l’affronter et à la battre. En ordre dispersé : même pas en rêve.

Une fois rappelé ces fondamentaux développés dans les newsletters de lundi, mardi et mercredi… profitons de ce moment suspendu pour faire un pas de côté et parler d’un film qui nous a emballé et qui n’est pas sans rapport avec ce dont nous parlons dans cette newsletter. 

« En fanfare » raconte l’histoire d’un chef d’orchestre mondialement célébré qui a besoin toute affaire cessante d’un donneur pour contrer sa leucémie. Il découvre l’existence de son frère de sang, serveur dans une cantine scolaire du Nord et joueur de trombone dans une fanfare du bassin minier, près de Douai.


« En fanfare » est en train de faire son chemin dans les cœurs des spectateurs. De bouche à oreille, on se recommande ce beau film. Il a tout pour devenir un succès populaire. Comme dans « Bienvenue chez les Ch’tis », il se situe dans le Nord, un paysage typique de briques et de culture ouvrière. Comme dans bien des films aimés de ces vingt dernières années, il est question de la rencontre fortuite entre deux univers sociaux, la bourgeoisie parisienne et le monde populaire. Et comme dans « La vie est un long fleuve tranquille », l’histoire repose sur le hasard des naissances et de ses conséquences, inversion de bébé à la maternité pour l’un, adoption par deux familles différentes d’une fratrie, ici. Enfin, comme dans « Romuald et Juliette » ou encore dans « Intouchables », cette rencontre improbable se transforme en une solidarité entre individus.

Ce film nous montre des personnes, des culture, des univers singuliers. On y entend beaucoup de musiques bien différentes, du Sardou et du Ravel, de la musique contemporaine et du Dalida. Une bande son qui nous a plu cet été le long de la Seine, dans une mémorable cérémonie d’ouverture. Et ce melting-pot musical parle de chacun de nous : on peut aimer « allumer le feu » (moi, pas tellement), s’époumoner « laissez-moi danser en liberté » (moi, nettement plus) et toquer les rythmes du « Sacre du printemps ». Au-delà de cette place donnée à des individus mêlés, moins enfermés dans des stéréotypes sociaux et davantage reconnus dans leur complexité, à des classes populaires respectées et des dominants moins arrogants, tous ces films nous donnent à voir l’utopie d’une société réconciliée. Ils l’évoquent sans éluder sa division centrale, qui n’est pas que division matérielle et de richesse mais qui s’inscrit dans les cultures, les tenues des corps, les goûts, les accents… Ils ne disent pas que la rencontre et le respect subvertissent cette division en classe à l’origine des dominations. Mais ils racontent ce rêve de subversion. « Monday, Tuesday, lalala… Laissez-moi danser, chanter en liberté »

Catherine Tricot

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Des milliards pour financer la malbouffe

Le site Alternatives économiques est cash : « Les contribuables français déboursent plus de 60 milliards d’euros par an pour un système agricole et alimentaire socialement et écologiquement destructeur ». D’abord 48,4 milliards d’euros de subventions – dont seulement un tiers pour l’agriculture et 8% pour le bio ! – pour des entreprises qui misent « sur la fourniture d’une matière première agricole standardisée, produite au plus bas prix possible à coups de chimie, de dégradation de la biodiversité, de souffrance animale. Et de souffrance des hommes au travail et de bas revenus ». Miam ! Conséquence ? Il faut ajouter 19,1 milliards d’argent public pour contrer les « impacts négatifs de ce modèle » : pathologies liées au surpoids et à l’obésité, conditions de travail, compensation des faibles revenus, dépenses environnementales. Et bon appétit bien sûr !

L.L.C.

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Le podcast « De Milei à Trump, le libertarisme est-il la nouvelle doctrine ? », à écouter sur France Culture. Pour comprendre les fondements et origines du mouvement libertarien. Et surtout pour avoir à l’esprit qu’il existe plusieurs plusieurs composantes de ce mouvement, dont les ultra-conservateurs à la sauce argentine. Loin de l’image des années 70…

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