LA LETTRE DU 27 AOÛT
NFP : moins d’esbroufe, plus de fond
Faute d’être parvenu à fracturer la gauche et les écologistes, Emmanuel Macron a décidé de ne pas nommer un Premier ministre qui mette en œuvre le programme du NFP. Comment les partis vont-ils réagir ?
La proposition surprise de Jean-Luc Mélenchon – cet homme a de la ressource en ce domaine – de soutenir sans participer un gouvernement du NFP aura eu le mérite d’éclaircir le jeu. La promesse de voter une motion de censure en cas de ministres insoumis était bien le prétexte pour s’opposer à la politique proposée par la gauche. Il est clair également qu’il ne peut y avoir de gouvernement NFP sans une de ses principales composantes. Imagine-t-on plus fragile gouvernement – déjà minoritaire à l’Assemblée nationale – tenant par le soutien d’un groupe extérieur à lui-même ? La modération de Lucie Castets face à cette proposition témoigne d’un gros doute. Le NFP ne peut réussir qu’en s’élargissant – y compris à des forces sociales au-delà des partis – et non en soustrayant. On attend des initiatives lisibles sur ce terrain.
Emmanuel Macron annonce vouloir se passer de la gauche. Mais n’avance aucune solution. Toute honte bue, il renvoie aux partis la responsabilité de sortir de la situation. En attendant, rien ne change. Au prétexte de gestion des affaires courantes, la même politique se perpétue : la rentrée scolaire comme la préparation du budget, la gestion des hôpitaux comme celle des libertés publiques avancent sur les mêmes rails.
Devant cette situation impensable, La France insoumise brandit la menace de destitution du Président. Les partis formant le NFP en appellent à la mobilisation des citoyens. LFI avance même une date : le 7 septembre. Seront-ils suivis ? Il est attendu du NFP des propositions ayant une chance de débloquer la situation, et pour cela qu’elles soient en phase avec les attentes et le sentiment de tous.
Même si le NFP ne dispose pas de majorité au Parlement et n’a rassemblé que le tiers des suffrages aux législatives, il a d’autres solides ressources. Les enjeux dont il se saisit sont à la racine de la crise actuelle. On ne les entend plus assez, ils sont comme noyés dans la mélasse des enjeux de la formation d’un gouvernement. L’entrée en scène des syndicats, des militants et des élus de terrain pourrait rappeler ces évidences. La France n’est pas principalement malade d’une Assemblée éclatée mais d’une politique qui n’est pas soutenue et qui défait ce qui nous tient ensemble : un travail rémunérateur et qui a du sens ; de services publics qui permettent de vivre en sécurité et en dignité ; un pays qui agit pour la paix ; une préparation de l’avenir avec des politiques environnementales, en faveur des transports décarbonés… Revenons-en au fond. Ou une nouvelle fois – après la triste séquence sans fin pour trouver un nom de Premier ministrable –, le NFP perdra tout le monde en chemin.
Catherine Tricot
MERCATO DU JOUR
Quand l’Élysée sonde de potentiels ministres
Complètement hors des clous de son rôle constitutionnel, le président de la République s’imagine Premier ministre. Refusant depuis plus de 50 jours de nommer un-e chef-fe de gouvernement, le voilà qui commence à tâter le terrain en passant des coups de fil à certaines personnalités pour leur demander si un maroquin pourrait les intéresser. Honnêtement, on marche sur la tête. Au nom de la démocratie, il serait temps que le Conseil constitutionnel s’en mêle. Et le peuple tant qu’à faire.
P.P-V.
ON VOUS RECOMMANDE
- L’air du temps, c’est aussi ça que captent les réalisateurs. Avec « Emilia Perez », Jacques Audiard livre un film risqué, une comédie musicale en mexicain, jouée par une Portoricaine, une Espagnole, une Américaine et une Mexicaine qui ont gagné le Prix d’interprétation féminine au Festival de Cannes, sur une cheffe de cartel qui change de genre. Une ode à l’amour, à la liberté et à la transgression. Toujours limite, toujours pertinent.
ÇA SE PASSE SUR REGARDS.FR
Pour recevoir cette newsletter quotidiennement (et gratuitement) dans votre boîte-mail, suivez le lien : regards.fr/newsletter !
On ne dit pas « Palme d’Or de la meilleure actrice » mais « Prix d’interprétation féminine ». Seul un film peut avoir la Palme d’Or.