Propos lapidaires sur l’antisémitisme
Les propos et les actes antisémites remontent en flèche. Il faut stopper leur progression, mais pas au prix de redoutables simplismes.
Ce n’est pas parce que l’islamophobie est un fléau majeur de nos sociétés que l’on peut banaliser la montée de l’antisémitisme. La concurrence des victimes est inopportune. L’antisémitisme et l’islamophobie empoisonnent à part égale notre scène publique.
Il est vrai qu’aucune frontière étanche ne sépare par essence l’antisionisme et l’antisémitisme ; pas plus que l’antinazisme d’hier n’était immunisé absolument contre la germanophobie ; pas plus que la crainte du fanatisme islamiste ne protège inéluctablement de l’islamophobie. Il est donc inacceptable de taxer a priori d’antisémitisme tout forme d’antisionisme ou toute critique à l’égard de la politique suivie par l’État d’Israël. Mais en retour tout refus à gauche des errements du sionisme contemporain est tenu de veiller en permanence à ce que la critique ferme des dérives officielles de l’État hébreu ne nourrisse jamais, même inconsciemment, un antisémitisme toujours possible.
Ce n’est pas parce que l’Holocauste est utilisé par l’extrême droite israélienne au pouvoir qu’il faut méconnaître ou relativiser son exceptionnalité, dont la reconnaissance a été un fondement de l’esprit démocratique après 1945. Mais ce n’est pas pour autant qu’on n’a pas le droit de dire que le massacre de la population civile gazaouie a un caractère potentiellement génocidaire que rien ne peut légitimer.
Ce n’est pas parce qu’Israël pratique en grand une politique coloniale, au mépris des multiples condamnations internationales, que cet État est par essence un État colonial, donc illégitime. Rien ne peut conduire à revenir sur la décision internationale de 1948 qui en a fait un État d’accueil pour les Juifs persécutés. Mais comme rien ne peut contredire le droit à l’existence des Palestiniens de se constituer en État, il n’y a pas d’autre solution – difficile mais raisonnable – que celle de la légitimité de deux États distincts. Ce serait un excellent remède aux délires antisémites que d’avancer sans tarder dans cette direction.
Ce n’est pas être antisémite que de déplorer que, dans le cas de l’Ukraine, l’agresseur russe soit soumis à de justes sanctions et que, à propos de la Palestine, Israël continue à poursuivre impunément une colonisation condamnée de droit par la communauté internationale. La logique du « deux poids, deux mesures » est incompatible avec l’universalité du droit et avec la simple justice.
Ce n’est pas être antisémite ou islamophobe que de dire que, si les crimes du Hamas pourraient relever des juridictions punitives internationales, il en est de même du massacre de la population gazaouie par l’armée d’Israël.
En bref, en matière d’antisémitisme comme d’islamophobie, ce qui devrait s’imposer universellement, c’est l’esprit de justice et d’humanité, pas l’esprit de revanche et de discrimination.
Je vois la confrontation selon 3 niveaux. Le niveau de la colonisation des territoires palestiniens, le niveau de la confrontation religieuse avec dans chaque bord les composantes fanatiques, et enfin le niveau des civilisations (démocratie). Cela fait beaucoup de confusions et permet aux plus manipulateurs de cacher leurs véritables objectifs.
D’accord avec l’angle d’attaque de cette courte mise eau point. Un problème quant à la solution à deux états : sa réalisation suppose que les centaines de milliers de colons israéliens quittent les colonies qu’iels ont établis en Palestine contre le droit international…
Je trouve particulièrement blessant et irresponsable d’écrire une telle chose: « Il est vrai qu’aucune frontière étanche ne sépare par essence l’antisionisme et l’antisémitisme ; pas plus que l’antinazisme d’hier n’était immunisé absolument contre la germanophobie »
J’ai vécu depuis 1968 dans la même organisation que Krivine, Bensaïd, Weber et tous les autres. J’avais même cru comprendre que l’antisionisme était une pensée née chez des intellos juifs de l Europe de l’Est, dont certains étaient syndicalistes et partisan.anes d’un parti révolutionnaire et internationaliste ( genre PC d’antan). J’avais cru comprendre que les macronistes utilisent en permanence cet argument : l’antisioniste d’aujourd’hui ( depuis quand d’ailleurs) = antisémitisme. Le rajout de la subtile formule « par essence » ne change rien. Donc à partir d’aujourd’hui je dois surveiller mon expression. Je pourrais être antisémite à l’insu de mont plein grès. Il y aurait une sorte d’antisémitisme naturel potentiel ( la frontière pas étanche) chez qui n’est pas juif. D’où vient cette théorie ? Tout le reste de l’analyse ne peut rattraper cette suspicion fondée « inconsciemment » donc inaccessible à la raison.
Petite remarque : la « germanophobie » (ça vient d’où cette comparaison avec l’antisémitisme ?) n’a pas tué 6 M de personnes. Je concède que j’ai entendu parlé des « boches » dans ma famille. Je sais pourquoi. Jean-Paul Bordeaux
« En bref, en matière d’antisémitisme comme d’islamophobie, ce qui devrait s’imposer universellement, c’est l’esprit de justice et d’humanité, pas l’esprit de revanche et de discrimination. » Très juste.
le problème est hélas est que certains à gauche ont totalement oublié les droits humains.
Je trouve que la « comparaison » ou le « parallèle » fait par Roger Martelli est faux, sinon tiré par les cheveux
« Il est vrai qu’aucune frontière étanche ne sépare par essence l’antisionisme et l’antisémitisme ; pas plus que l’antinazisme d’hier n’était immunisé absolument contre la germanophobie »
En effet le sionisme est une doctrine si ce n’est un mouvement religieux alors que l’antisémitisme est un racisme, frontière il y a c’est la loi qui la trace. Comme le nazisme est une idéologie raciste meurtrière, la germanophobie est une détestation du peuple allemand, ce qui n’est pas une attitude très humaniste mais elle n’est pas de l’ordre du racisme.
Merci. Simple et bien dit.
Le texte de Roger Martelli est juste dans sa portée universaliste. L’antisémitisme, l’islamophobie, le racisme ne sont que des facettes d’un même prisme. C’est la raison pour laquelle lorsque la présidente de l’Assemblée Nationale et le président du Sénat, ont organisé en novembre dernier une marche contre l’antisémitisme, il s’agissait d’une volonté politique visant à dissocier le caractère universaliste de la lutte contre tous les racismes et l’antisémitisme. De la même manière, la lutte contre Poutine ne saurait être mêlée à la culture du peuple russe, la lutte contre Truman contre la culture américaine et la lutte contre Xi Jinping contre la culture chinoise. Dans tous les cas, comme le conclut Roger Martelli, « c’est l’esprit de justice et d’humanité » qui devrait toujours prévaloir. La politique mérite mieux que des raccourcis et des simplismes.
L’analyse de Roger Martelli est juste. Ça qui est dit va de soi. Mais qu’est-ce qui empêche de dire que c’est surtout LFI qui est visée par les accusations d’antisémitisme ?
Il faudrait commencer par démontrer en quoi « l’islamophobie est un fléau majeur de nos sociétés ».
Où est la comparaison, sérieusement ?
– L’antisémitisme en France se mesure en constatant qu’un nombre de plus en plus important de Juifs quittent la France où ils ne se sentent plus en sécurité, et que de très nombreux autres envisagent de le faire. Ça dure depuis plus de 20 ans et ça s’aggrave.
– L’islamophobie est un fléau tellement majeur de nos sociétés que chaque année des millions de Musulmans cherchent à s’installer dans lesdites sociétés. La seule « étude » faisant état de Musulmans fuyant ce fléau majeur qu’est l’islamophobie (et seulement en France) a été bidonnée en partenariat avec le CCIF qui fut une succursale aujourd’hui dissoute des Frères Muz.
A propos des FM, si vous voulez un exemple de vrai Fléau Majeur de nos sociétés, vous avez l’islamisme. Ça fait des morts, des (vrais) blessés, des (vrais) traumatisés, des enfants orphelins, des parents endeuillés, des veuves, des veufs, du sang, des larmes. Ça fabrique des crétins ultraviolents, ça pousse les profs d’histoire à l’autocensure et les dessinateurs caricaturistes à travailler dans un bunker, ça transforme la laïcité en un délire de vieux raciste et utilise la gauche radicale comme marchepied avant de la détruire (souvenez-vous Khomeini). Voilà, c’est ça qu’on appelle un « fléau majeur ».
A vous lire il faudrait se dire que l’islamophobie n’est pas bien grave, que l’on peut continuer à se laisser envahir par la haine de ces gens du Maghreb, car il nous en vient toujours par millions.
Vous voilà proche de l’idée de grand remplacement, et même en plein dedans si votre démonstration est juste: On a beau les traiter comme indésirables, afficher notre islamophobie, ils viennent quand même.
Rassurez-vous, je ne vous assimile pas à Zemmour.Mais vous nagez dans ses eaux.
Des juifs qui fuient la France à cause de l’antisémitisme, cela existe bien sûr.
Mais n’est- ce pas plutôt l’antisionisme qui les fait fuir. Vous savez comme moi que la religion parfois se radicalise et Israël m’échappe pas à la vague brune qui touche l’Europe et le monde. Il existe des juifs qui ne sont pas immunisés contre le radicalisme religieux (pas le judaïsme qui est fondamentalement une forme d’humanisme) et sa traduction politique dans le colonialisme assumé en Israël et en Palestine.Que ces gens-là fuient la France, il n’y a rien d’étonnant à cela.Et quand un dirigeant israélien vient en France, c’est à ces gens là qu’il s’adresse prioritairement, les invitant à rejoindre Israël.Aujourd’hui on peut craindre que la sécurité des juifs en Israël soit bien mal assurée. Il y a eu le 7 octobre qui a ébranlé l’idée que le pays était bien défendu.Et il y a pire, la guerre, le massacre, le génocide engagé ne démultiplie pas les risques de voir de tels actes terroristes à l’avenir?
Il y a des juifs vivent en France et décident comme moi d’y rester parce que c’est leur pays…un pays malmené où la bête immonde est de retour…Cette bête immonde, autrefois porteuse d’un antisémitisme d’extermination, aujourd’hui soutien inconditionnel de Netanyahou.
S’il y a des juifs antisémites, je n’en suis pas, mais suivez mon regard.
Mais sinon à part ça : en quoi « l’islamophobie est-elle un fléau majeur de nos sociétés » ?
Avec exemples, SVP.
L’islamophobie est un racisme comme peut l’être l’antisémitisme. En ce sens l’islamophobie, l’antisémitisme et le racisme sont des fléaux. L’islamophobie existe dans toutes les couches de la société française, c’est une des conséquences, parmi d’autres, des politiques coloniales menées par la France en Afrique et au Maghreb.
Dans la vie quotidienne cela se traduit par des contrôles de police au faciès, des refus d’embauche pour les mêmes raisons, une relégation sociale au quotidien, etc…A l’international, les exemples sont nombreux d’islamophobie : les fausses armes de destruction massive inventées par les amêricains en Irak, les répréssions contre les Afghans, contre les Ouïgours…
Cette islamophobie a donc des conséquences géopolitiques non négligeables. Pour revenir à la France et à l’islamophobie, les programmes politiques des Rassemblement National, de Reconquéte et de leurs alliés européens ne peuvent conduire qu’à des désastres politiques, économiques, culturels et sociaux. En France, nous avons un principe républicain fort pour éviter le pire : celui de LAICITE. Hélas, ce principe est instrumentalisé chaque jour par celles et ceux qui devraient être les premiers à le defendre. Autrement dit, un islamophobe, un antisémite, un raciste sort de fait, du champ républicain, le racisme étant un délit et pas une opinion, il ne devrait mêle pas avour le droit de vote.
Une religion n’est pas une race. Diriez-vous que l’antichristianisme – ou la christianophobie – est un racisme ?
Il n’y a pas d’Islamophobie en France mais une tension alimentée par au moins 2 facteurs :
1. la défiance envers la laïcité venant de Musulmans de plus en plus nombreux à assimiler cette grande conquête républicaine à une atteinte portée contre eux à dessein ;
2. l’impossibilité de proposer à visage découvert une critique de cette religion sans se mettre automatiquement en danger de mort.
Ceux qui soutiennent le point de vue victimaire et mensonger de l’islamophobie comme « fléau majeur de nos sociétés » travaillent à maintenir cette tension et font les affaires des calotins. Le vrai fléau de nos sociétés est le regain d’une bigoterie aux accents identitaires et liberticides qui détruit l’école et pourrit les relations entre les êtres. Je trouve incroyable de devoir expliquer ça ici…
À bas la calotte, nom de dieu !