La bataille du budget : haro sur les dépenses ?

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Ce graphique, publié par Les Échos, montre le grand dérapage du déficit public, au contraire de l’ambition des gouvernements Borne et Attal de le ramener à moins de 3% en 2027.

En 2024 on serait à 5,6% au lieu de 5,1% programmé. Et en 2025 à 6,2% au lieu de 4,1%. Soit une différence d’environ 65 milliards.

Devant les membres de la Commission des finances de l’Assemblée, Bruno Le Maire a martelé qu’il faut tenir le cap prévu. Revenir à 5,1% de déficit cette année. Être à 4,1% en 2025 et ainsi de suite. Et pour cela une seule méthode : haro sur les dépenses, sauf, bien entendu, l’essentiel des aides publiques aux entreprises. Les augmentations éventuelles d’impôts, c’est juste la pommade pour faire passer la douloureuse.


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Le ministre démissionnaire de l’Économie l’a dit assez crûment : « S’il n’y a pas une réduction des dépenses de l’État, des collectivités, de la Sécurité sociale, globalement vous ne rétablirez pas l’équilibre. Tout le reste c’est de la poudre de perlimpinpin. Laissez entendre qu’il faudrait taxer les plus riches, taxer les entreprises, augmenter les impôts ici ou là, que cela permettrait de rétablir les comptes publics, c’est un mensonge. »

Soulignons trois points :

1. Le dérapage vient de plus loin que cet été. En février 2023, le ministre avait supprimé par décret 10 milliards de dépenses sur le budget adopté par le Parlement deux mois plus tôt à grands coups de 49.3. Et, déjà, le motif était que le déficit avait dérapé par rapport aux prévisions. Cinq mois plus tard, ça recommence. Preuve que ce sont les limites et les contradictions de la politique d’Emmanuel Macron et de Bruno Le Maire qui sont en cause.

Ce ne sont pas les dépenses (sauf celles des aides aux entreprises) qui dérapent. Ni celles des collectivités locales. Le rapporteur de la Commission des Finances Charles de Courson évalue celui-ci à un maximum de 3,5 milliards. Ni à celui des indemnités journalières maladies où l’on refait le coup des indemnités chômage. La Cour des Comptes a évalué l’augmentation des dépenses à 5 milliards… en cinq ans. Elle l’explique « d’une part par l’augmentation et le vieillissement de la population active affiliée au régime général, d’autre part, par la progression du Smic et des salaires sous l’effet de l’inflation ». Elle ne parle pas bien entendu de la question des conditions de travail. Et la fraude et les abus, c’est peanuts.

Le problème ce sont les recettes. Comme le note l’économiste Pierre Madec, « quand on supprime la taxe d’habitation et l’ISF, lorsqu’on met en place la flat tax, lorsqu’on baisse l’impôt sur le revenu, les impôts de production ou encore l’impôt sur les sociétés, on a en effet moins de recettes fiscales ». D’autant que la TVA rentre moins bien que prévu. Le pouvoir d’achat des salaires en recul ne fait pas une consommation dynamique.

2. Taper sur les dépenses aurait un effet désastreux au plan économique, social et environnemental. Le gouvernement démissionnaire a gelé 16 milliards de dépenses, soit l’équivalent du trou supplémentaire à combler pour se ramener à 5,1% cette année.

Éric Coquerel, le président de la Commission des Finances, a calculé que si le prochain gouvernement procédait à l’annulation de tous les crédits gelés, en additionnant les crédits déjà annulés, cela correspondrait au total « à réduire le budget du ministère du sport de 18,9%, celui de l’écologie de 14%, celui de la transformation publique de 11,2%, celui des Outre-mer de 11%, celui de la cohésion des territoires de 7,5% et celui du travail de 6,8% ». Et il faudrait continuer encore et encore en 2025 et les années suivantes. D’autant plus que la baisse des dépenses publiques dans un contexte de croissance très fragile a un effet négatif sur celle-ci. Ce qui aggravera le chômage, diminuera encore la croissance… et les rentrées fiscales. Et le déficit diminuera beaucoup moins que prévu…

3. Toutes les droites sont alignées sur le testament funeste de Bruno Le Maire. À commencer par Michel Barnier qui ne veut surtout pas augmenter la dette et presque pas les impôts. Suivi par les groupes Ensemble, Horizons, Démocrates et Droite républicaine. Y compris le Rassemblement national. Son représentant, Jean-Yves Tanguy a reproché aux ministres… de n’avoir « aucune mesure structurelle à proposer aux Français, à part augmenter les impôts ».

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3 commentaires

  1. Lucien Matron le 12 septembre 2024 à 18:14

    Bruno Le Maire est aux finances depuis 7 ans avec la bénédiction d’Emmanuel’Macron. A eux deux, ils portent l’entière responsabilité du dérapage inouï des comptes de la Nation. Au point, où ils en sont arrivés, le pays entier devrait être debout et réclamer leur démission pour incompétence notoire, dilapidation des caisses de l’Etat, détournement de fonds publics, voire escroquerie ! Dans quelle autre structure ou organisation, entreprise, association, ou simplement famille accepterait-on cette situation de déficit récurrent ? Nulle part ! Augmenter les dépenses ( pour certaines inutiles) et diminuer les recettes en accordant des largesses à ceux qui ne les méritent, au nom des dogmes libéraux, est une impasse dont il faut sortir en changeant de cap politique. En 1789, on aurait fait de ces gouvernants du gibier de potence, contentons- nous de les évincer du pouvoir et de promouvoir une autre politique, celle du programme du NFP.

  2. Chenal Maryse le 13 septembre 2024 à 13:20

    Il peut y avoir des aides aux entreprises mais si la pauvreté a augmenté, les dividendes distribués n’ont jamais été aussi importants pourquoi ne pas remettre comme ça l’a été par le passé deux taux d’impositions des bénéfices des sociétés, un taux normal pour les bénéfices qui restent dans l’entreprise pour l’investissement et un taux majoré pour le bénéfice distribué en dividendes.

  3. Lucien Matron le 16 septembre 2024 à 05:58

    Il est possible d’accompagner les entreprises, tout dépend lesquelles et pour quelles raisons elles sont aidées. Il y a une différence entre l’entrepreneur individuel artisanal ou commercial et une entreprise de plusieurs centaines de salariés. Dans tous les cas, l’accompagnement doit se faire avec des contreparties ( qualité du service rendu à la population, intérêt général, emploi local, etc…). Le plus souvent, dans les très grandes entreprises nationales, internationales ou multinationales, justement celles qui engrangent le plus de profits, c’est le chantage à l’emploi et à la délocalisation, qui permet toutes les pressions pour obtenir des aides massives sans contrepartie véritable. Avec leur armée d’avocats, de conseillers fiscalistes et financiers, elles savent trouver toutes les failles des lois et des normes pour prospérer. C’est ce système absurde qu’il faut combattre.

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