Jordan Bardella : « C’est moi le président »

Sous le choc, quelques minutes après l’annonce de la condamnation de Marine Le Pen, nous avons rencontré Jordan Bardella dans son bureau, au parti. Un entretien poignant et une séquence-émotion d’une rare intensité.
Regards. Hier, lundi 31 mai, Marine Le Pen a été condamnée. Elle est désormais inéligible pour cinq ans. Donc, 2027, la présidentielle, c’est finito pipo comme disent les jeunes. Et vous, Jordan, ça baigne ?
Jordan Bardella. Aujourd’hui, ce n’est pas seulement Marine Le Pen qui est injustement condamnée : c’est la démocratie française qui est exécutée.
Non mais, ça, c’est votre tweet d’hier…
Ah oui, vous avez raison. [Il sort une fiche de sa poche où il est écrit « éléments de langage, 1er avril 2025 ».] Hier, ce n’est pas seulement Marine Le Pen qui a été injustement condamnée : c’est la démocratie française qui fut exécutée.
Merci Jordan, c’est important, la concordance des temps. J’aimerais revenir sur votre déclaration, il y a quelques mois à peine : « Ne pas avoir de condamnation à son casier judiciaire est la règle numéro 1 lorsqu’on souhaite être parlementaire de la République. Cela vaut pour tout le monde. » Ça dit quoi maintenant ?
Tout le monde n’est pas Marine Le Pen, enfin !
Okay… Le RN, que vous présidez…
Oui, c’est moi le président. [Rires puérils]
… oui… le RN, donc, a récemment supprimé de son site internet une partie du programme 2022 de Marine Le Pen. Tout le livret « Défense » a disparu. On pouvait y lire des choses comme « La Russie, c’est super, l’Allemagne, c’est caca ». Un commentaire ?
Non mais, ça, c’est dans le programme de Marine. Je ne suis pas Marine, comme vous pouvez le constater. [Il regarde par la fenêtre. Le vent fait bruisser les feuilles des arbres.] J’ajoute que Marine n’est pas moi, non plus. Je sais, c’est un peu technique mais c’est sincère.
Très bien. Prenons donc votre programme alors, celui des législatives 2024 intitulé « Bardella premier ministre ». Une des mesures proposait de « mettre en place, en plus des peines planchers, la limitation de la possibilité des aménagements et réductions de peine ». Rappelons que Marine Le Pen vient d’être condamnée à 4 ans de prison, dont deux ans ferme, aménageables avec un bracelet électronique…
Je vois pas le rapport. [Il regarde à nouveau sa fiche « éléments de langage.] Ce n’est pas seulement Marine Le Pen qui a été injustement condamnée…
Oui, oui, oui, on a compris, Jordan. Une dernière question si vous le permettez…
En tant que président du Rassemblement national, je le permets.
Ce week-end, sur BFMTV, Marine Le Pen a, et c’est une première, affirmé que vous aviez « la capacité d’être président de la République ». Plutôt cool, non ?
[Il bombe le torse, un torse si musclé qu’un des boutons de sa chemise craque et laisse entrevoir une peau imberbe.] Oh, vous savez… La France c’est un pays à prendre, c’est comme une femme, au fond, et il faut vraiment en avoir envie, et il faut lui montrer tous les jours, et il faut avoir ce projet-là depuis sa naissance.
Vous citez François Fillon ou je rêve ?
Ah pardon. Mauvaise fiche.
[Marine Le Pen entre en trombe dans les locaux du RN. Jordan Bardella met fin à l’entretien. S’en suivent des cris et des larmes. Terrible.]