Explosions au Liban : prouesse technologique ou terrorisme ?

La semaine dernière, des centaines d’appareils électroniques piégés ont explosé au Liban, faisant des milliers de blessés et des dizaines de morts. « Attaque » ou « terrorisme » ? Peu importe, la presse française est en admiration face à cet « exploit ».

Si tout le monde a conclu qu’Israël était le responsable de cette attaque, le président Isaac Herzog sur SkyNews a démenti qu’Israël soit impliqué, ce qui suscite plus que du scepticisme de SkyNews, mais faisons comme si le coupable était encore inconnu et appelons-le simplement le commanditaire. Si le Hezbollah était visé, l’explosion au milieu du public, des magasins, ou à domicile, a fait que les victimes sont aussi des civils et des enfants. Le commanditaire a pris le risque de tuer des civils au milieu de la population, ce qui fait que cette opération peut être considérée comme un acte de terrorisme qui, d’après la loi du 9 septembre 1986, est « une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur ».

TOUS LES JOURS, RETROUVEZ L’ESSENTIEL DE L’ACTU POLITIQUE DANS NOTRE NEWSLETTER

👉 C’EST ICI ET C’EST GRATUIT

L’Organisation des Nations Unies a de son côté rappelé que « le fait de prendre pour cible simultanément des milliers de personnes, qu’il s’agisse de civils ou de membres de groupes armés, sans savoir qui était en possession des engins visés, où ils se trouvaient et qui se trouvaient dans leur environnement au moment de l’attaque, constitue une violation du droit international relatif aux droits humains et, le cas échéant, du droit international humanitaire ». Au Liban, la population est bien sûr terrorisée par ces explosions puisque, comme avec n’importe quel groupe terroriste, la mort peut frapper n’importe qui, n’importe quand.

On s’étonnera donc que certains dans la presse fassent preuve de retenue dans la condamnation de cet acte terroriste, voire laissent percer comme une admiration. La Croix titre ainsi : « Explosion de bipeurs au Liban : ce que l’on sait de l’attaque meurtrière attribuée à Israël », alors que le vrai titre aurait dû être « Explosion de bipeurs au Liban : ce que l’on sait de l’attaque terroriste meurtrière attribuée à Israël ». Pour sa part, Le Figaro écrit « Pointé du doigt au Liban, Israël n’a pas revendiqué cette attaque digne d’un grand film d’espionnage », phrase où le lecteur ressent un certain malaise, qui aurait été le même si Le Figaro avait écrit quand le Hamas avait massacré la plupart des spectateurs d’un concert de plein air qu’il s’agissait d’une attaque « digne d’un grand film de guerre ». Pour sa part, Libération décrit une « opération militaire inouïe » et pas une « opération terroriste inouïe ». Reconnaissons que l’honneur du journaliste Jean-Michel Aphatie est de dire sur RTL son horreur devant cette attaque terroriste et son étonnement devant les réactions d’une certaine presse.

Il se trouve que la loi sur l’apologie du terrorisme, qui stipule que « le fait de provoquer directement à des actes de terrorisme ou de faire publiquement l’apologie de ces actes est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende », a été et est toujours utilisée pour poursuivre de nombreuses personnes depuis l’attaque du 7 octobre 2023, ce qui fait débat. Comment donc qualifier ce qui fait penser à de l’admiration devant une « attaque digne d’un grand film d’espionnage » ou une « opération militaire inouïe » ? Ceux qui sont indignés par les réactions d’une certaine presse pourraient très bien recourir à cette loi, car, de fait, quelle est la différence de nature entre cette « opération », le massacre des civils à un concert le 7 octobre 2023 en Israël, ou celui du Bataclan en novembre 2015 ?