La fable de Madame de Montchalin et les graphiques bidons de Monsieur Guérini

screenshot_2022-06-30_11.31.15.png

Augmentation du point d’indice de la fonction publique, hausse des APL… Au gouvernement, on se prend pour Robin des Bois alors qu’on est plutôt Super-Menteur.

Le gouvernement provisoire a décidé une augmentation plafonnée des loyers de 3,5% et une revalorisation de 3,5% des aides au logement (APL). Amélie de Montchalin, battue aux législatives – mais toujours ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires –, a invité pour consultation les associations représentatives des locataires… le lendemain de l’annonce de la décision gouvernementale. Elle s’est fendue de deux tweets pour défendre cette décision. Dans le premier, elle explique que l’augmentation des loyers permettra… d’en limiter la hausse !

Et dans le deuxième, elle frôle ses précédents records de mépris et d’arrogance.

Sur le prétendu effort gouvernemental pour limiter la hausse des loyers, la Confédération nationale du logement explique qu’au contraire cette hausse de 3,5% correspond à l’évolution annuelle des loyers prévue selon l’indice de référence des loyers (IRL). Le gouvernement ne fait donc aucun effort pour les locataires. L’augmentation de 3,5% des APL comblera d’autant moins l’alourdissement de la facture logement pour les locataires qu’elle n’intègre pas les charges de gaz et d’électricité. Et que les APL ont subi sous le premier quinquennat d’Emmanuel Macron des coupes successives considérables. Selon la Fondation Abbé Pierre, en 2022, ce sont 4,2 milliards d’euros qui sont économisés par rapport au montant qu’aurait dû atteindre l’allocation.

screenshot_2022-06-30_11.31.15.png

 

Pierre Madec, économiste à l’OFCE et spécialiste du logement, a fait les comptes : « L’augmentation de 3,5% pèserait pour 2,6 milliards d’euros sur le reste à vivre des ménages locataires, cette baisse du reste à vivre étant compensée partiellement par l’État à travers l’augmentation de 810 millions d’euros des aides personnelles au logement ».

Quant au méchant blocage, qui pénaliserait le propriétaire pauvre et avantagerait le riche locataire, c’est une fable qui confine à la fake news de lobbyiste. Si un blocage provisoire des loyers favorise injustement les ménages aisés que dire alors de la suppression de la taxe d’habitation, de la suppression de la redevance télévisée et de la ristourne de 18 centimes sur le litre d’essence à la pompe ?

Une politique de justice sociale ne consiste pas à utiliser les pauvres propriétaires et les riches locataires contre la masse des locataires pénalisés par la hausse des loyers et des charges. Elle consisterait à décider un blocage provisoire des loyers. Et en même temps à augmenter les minimum retraites pour que tous dépassent le seuil de pauvreté et à supprimer les avantages fiscaux des riches, qu’ils soient propriétaires ou locataires.

Au fait, Madame de Montchalin a juste oublié de nous dire combien de propriétaires sont de pauvres retraités et combien de locataires sont riches. Et pour cause. Comme l’a tweeté Cécile Duflot :

Et effectivement Cécile Duflot, elle, n’a rien inventé. L’INSEE a fait, en novembre 2021, le point statistique sur la propriété des logements. On peut notamment y lire ceci :

screenshot_2022-06-30_11.35.26.png

 

La « hausse Guerini » = la deuxième pire baisse de pouvoir d’achat en 30 ans

Le ministre de la Transformation et de la Fonction publique Stanislas Guerini tweete lui aussi à tour de bras pour dire tout le bien qu’il pense de la décision gouvernementale de revaloriser de 3,5% le point d’indice de la fonction publique. Il explique, graphique à l’appui, que 3,5% de hausse de l’indice, c’est du jamais vu.

… et qu’avec les augmentations individuelles on aura en moyenne du 5%…

… et que tout ça, c’est lui qui l’a fait avec ses petits bras musclés.

Avec ça si les fonctionnaires ne sont pas contents, ça ne pourra être que parce que ce sont des ingrats, des égoïstes qui ignorent que les impôts sont déjà trop lourds, des adeptes irresponsables du toujours plus, et/ou des paresseux.

 

VOIR AUSSI SUR REGARDS.FR
>>
« La revalorisation du point d’indice des fonctionnaires de 3,5% est loin d’être à la hauteur »

 

Le graphique de la « hausse jamais vue » de revalorisation du point d’indice cumule tellement les types de mensonge que les rectificatifs ont vite afflué sur le réseau social. Certains sont très parlants. Le docteur en Sciences politiques Emre Öngün a juste intégré la hausse des prix pour tracer la courbe de l’évolution annuelle du pouvoir d’achat du point d’indice de la fonction publique. La « hausse Guerini » sera en fait la deuxième pire baisse de pouvoir d’achat en 30 ans.

Julien Gossa, maître de conférences en informatique à l’Université de Strasbourg, a pour sa part tracé les deux courbes d’évolution du point d’indice et de l’indice des prix à la consommation depuis 25 ans. C’est tout aussi pertinent. La perte de pouvoir d’achat cumulée est considérable. Elle s’aggrave avec la hausse Guerini.

L’économiste Michael Zemmour répond avec précision et humour à l’argument du cumul de la hausse du point et de celui des hausses individuelles (avancements d’ancienneté et de compétences)

Cerise sur le gâteau, Stanislas Guérini a également formulé sur LCI le souhait d’ouvrir des négociations pour aboutir en 2023 à une partie « intéressement » dans la rémunération des fonctionnaires. Je dois dire que le ministre n’a pas tweeté là-dessus sur son compte ! Mais, Romaric Godin journaliste économique à Mediapart a résumé en un tweet ce qu’on peut en penser. Et l’inquiétude que l’on peut légitiment ressentir.

Sont-ce encore de vrais ministres ou déjà des ministres métavers d’une réalité virtuelle ?

 

Bernard Marx

Partager cet article

Actus récentes

Abonnez-vous
à notre NEWSLETTER
quotidienne et gratuite

Laissez un commentaire