L’eau ça mouille. Le feu ça brûle. Et la police tue.
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Le ciel est bleu. Le feu ça brûle et l’eau ça mouille. Et il parait même qu’il n’y a pas de fumée sans feu. La polémique suscitée par le tweet de Jean-Luc Mélenchon qui assure que « la police tue » est aussi absurde qu’infondée. Oui, la police tue. En France et à l’étranger. Pourquoi le nier ? Les exemples sont pléthoriques : d’Adama Traore en passant par Wissam El-Yamni, Claude Jean-Pierre ou Zyed Benna et Bouna Traoré : c’est factuel. La police tue. Qu’il s’agisse de cas de légitime défense ou de bavures policières, la police a tué. La police tue. En 2019, le site Basta recensait même 676 personnes tuées à la suite d’une intervention policière en à 43 ans.
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Il y a dans la critique faite à Jean-Luc Mélenchon une forme de déni. Jean-Luc Mélenchon, comme il le rappelle ce matin sur France Inter, n’est pas anti-flic. Il est « contre l’usage disproportionné de la violence » et favorable à la formation d’une police républicaine. Pourquoi dit-il ça ? Parce que depuis l’entrée en vigueur d’une loi sur la légitime défense des policiers datant du 28 février 2017, les tirs des policiers et des gendarmes ont augmenté de 50%. Depuis cette date, les forces de l’ordre peuvent plus facilement faire usage de leur arme, notamment en cas de refus d’obtempérer. Une loi qui « est venue mettre de la confusion dans des textes qui étaient jusque-là très clairs », assure ce matin Fabien Jobard, directeur de recherche au CNRS sur France Info. Comment ne pas s’en inquiéter ?
Historiquement, l’usage des armes par les policiers devait être « absolument nécessaire, strictement nécessaire et absolument proportionnelle aux dangers encourus. La loi est venue introduire une notion un peu compliquée », explique le chercheur qui ajoute : « lorsqu’il y a refus d’obtempérer, et que le policier peut imaginer raisonnablement que la personne va porter atteinte ou risque de porter atteinte » aux membres des forces de l’ordre ou à n’importe qui, le policier peut tirer. Ce qui n’était pas le cas avant. Comment ne pas s’en inquiéter, disais-je ? C’est même l’IGPN qui a alerté, quelques mois seulement après l’entrée en vigueur de la loi, de ses effets sur la hausse significative des tirs par les policiers. Des tirs qui ont conduit et conduisent inévitablement à des drames.
Ça n’est donc pas faire injure aux policiers de dire que la police tue. Parce que tout simplement, on l’y autorise. La loi l’y autorise et plus encore cette loi du 28 février 2017 – une loi revendiquée de longue date par le syndicat de police, Alliance. La police tue. Ça ne fait peut-être pas plaisir à entendre mais c’est une réalité. De même que l’homme tue. C’est aussi une réalité. Ce qui ne veut pas dire que tous les hommes tuent. Que l’homme serait nécessairement un loup pour l’homme. Mais nier l’évidence, c’est s’empêcher de vouloir mettre le nez dans ce qui devrait constituer une urgence : celle de repenser notre police et la doctrine du maintien de l’ordre. Et à défaut d’une réforme de la police, la priorité pourrait être mise sur la formation des policiers. Parce que le premier problème de la police, comme le rappelle Jobard, c’est « le manque structurel de formation des policiers ». Et une police mal formée, c’est une police qui se met en danger. Et nous avec.