Écologie : encore un recul… ras-le-bol !
En France et en Europe, le renoncement écologique n’est plus un accident. C’est devenu une ligne politique.
Sans trembler, Stéphane Séjourné, le commissaire européen français, vient d’acter l’abandon de l’objectif de ne vendre que des véhicules électriques à l’horizon 2035. Cette capitulation n’est pas isolée. C’est un signal. L’Europe et la France lâchent l’affaire climatique. Elles le font à la demande des constructeurs automobiles. Tant pis pour nous tous.
Depuis des mois, s’enchaînent les renoncements sur les pesticides (même plus limités dans le temps), défense offensive des mégabassines, abandon de la planification écologique, sabordage du rail, rétropédalage sur la rénovation thermique, abandon total sur les responsabilités des donneurs d’ordre en matière sociale et environnementales. Ces régressions sont le fait d’un pouvoir français qui perd pied, d’une commission européenne accrochée à ses dogmes dépassés et des coups de boutoir venus de l’extrême droite et de la droite.
Il faut désormais le dire clairement : les consensus scientifiques ne suffisent plus à faire face. Ont-ils d’ailleurs jamais suffi ? Des rapports du GIEC, il y en a eu des dizaines. Des alertes, des courbes, des degrés, des seuils critiques. Tout est su, documenté, répété. Et pourtant, l’inaction persiste. Pire : elle se transforme en reculade assumée.
Pourquoi ? Parce que le politique ne gouverne plus le temps long. Parce que la science, aussi solide soit-elle, ne pèse rien face aux intérêts économiques immédiats. Parce que la peur climatique se noie dans une concurrence d’angoisses tout aussi massives : guerre mondiale, menace nucléaire, terrorisme, crise sociale, effondrement démocratique, explosion des inégalités, intelligence artificielle. L’apocalypse est devenue plurielle et le climat en fait les frais.
Dans un monde saturé de catastrophes potentielles, la crise climatique est devenue une inquiétude parmi d’autres. Moins spectaculaire qu’un conflit armé. Moins immédiatement mobilisatrice qu’une crise sociale. Alors on la repousse et on la troque contre des promesses de croissance et de stabilité.
Plutôt que d’en faire un projet de justice sociale, de souveraineté populaire, de sécurité collective, le macronisme en a fait un supplément d’âme, tout juste utile pour les discours aux tribunes internationales… quand il reste encore un public.
Stéphane Séjourné rassure l’industrie, ménage les marchés, cède sans bruit. Emmanuel Macron laisse faire car ce lâchage est cohérent avec son virage général : moins d’écologie, plus d’ordre ; moins de transition, plus de continuité ; moins de rupture, plus de gestion. Mais la planète ne gère pas. Elle encaisse.
Et à cette abdiquation écologique s’ajoute une impasse industrielle majeure. Car, par ces décisions, la France et l’Europe abandonnent l’objectif d’être à la pointe de l’innovation écologique. Pendant que nous protégeons des rentes industrielles vieillissantes, d’autres régions du monde avancent. La Chine bien sûr, mais plus largement l’Asie, investit massivement dans la voiture électrique légère, accessible et adaptée aux usages populaires. Et ce sont aussi l’Afrique et une grande partie de l’Asie du Sud qui deviennent les marchés décisifs de demain : là où se construiront les infrastructures, les normes et les nouveaux modèles de mobilité. Pendant que l’Europe persistera à produire des voitures thermiques ou des véhicules électriques hors de prix, d’autres proposeront des petites automobiles électriques robustes et abordables, pensées pour des villes modernes et des besoins réels. Nous ne sacrifions pas seulement le climat : nous abandonnons aussi la bataille industrielle et géopolitique des décennies à venir.