Meurtre de Philippine : au-delà des polémiques, la réponse est politique

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Le meurtre de cette étudiante de 19 ans dans le bois de Boulogne à Paris samedi dernier agite les plateaux de télévision et les comptes X des politiques.

Non qu’un féminicide fasse soudain la Une de l’actualité (il y en a une centaine en France tous les ans), mais c’est l’identité de la personne soupçonnée du crime qui suscite l’attention : il s’agit d’un jeune Marocain de 22 ans, condamné étant mineur pour viol, très récemment sorti de cinq ans de prison et sous obligation de quitter le territoire français (OQTF). Son pays d’origine, le Maroc, a même autorisé l’expulsion le lendemain de sa remise en liberté après 75 jours passés en centre de rétention administrative (CRA).


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Sans équivoque ou ambiguïté, il faut condamner ce crime atroce qui fauche dans sa jeunesse quelqu’un qui avait encore la vie devant soi. La protection des victimes, et en particulière des femmes, et la lutte contre les violences sexistes et sexuelles doivent être des priorités pour la gauche.

En prenant bien soin de créer de la confusion sur la nature du crime (un viol et un meurtre) et l’identité du criminel (un étranger), la droite et l’extrême droite posent deux hypothèses-fictions qui, à mon sens, sont éminemment fausses : 

  • Le premier, c’est que la peine qu’avait purgé le présumé meurtrier pour viol n’était pas assez longue : il a été condamné à sept ans de prison (il était mineur au moment des faits) et en a effectué cinq. Non que la question de la longueur des peines ne soient pas des plus primordiales à se poser collectivement, il faut aussi être lucide : qu’il ait été condamné à sept, dix ou quinze ans de prison n’enlèvera jamais la peine de la victime. Et dans tous les cas, il serait forcément ressorti à un moment donné.
  • Le second, c’est que si l’OQTF avait été appliquée, une mort aurait pu être évitée. D’abord, c’est loin d’être certain car rien ne dit qu’il n’aurait pas commis son crime dans son pays d’origine, le Maroc. En l’expulsant, on ne faisait que déplacer le problème dans l’espace… et dans le temps car il serait sûrement revenu, par des moyens légaux ou illégaux.

De cela, nous pouvons tirer plusieurs conclusions :

  • Sur les OQTF : la France est le pays d’Europe où le nombre de ces mesures administratives est le plus important (plus de deux fois plus qu’en Allemagne par exemple) et où celui de leurs exécutions le plus faible. La plupart de ceux qui sont visés par ces obligations d’éloignement ne sont pas des délinquants pour d’autres raisons que leur présence irrégulière sur le territoire. Pis : nombre d’associations et d’experts alertent sur leur caractère arbitraire voire illégal. Le réformer permettrait de mieux cibler les personnes à risque.
  • Sur les moyens de la justice : la droite et l’extrême droite sont arc-boutés sur la façon dont on entre en prison et pour combien de temps, jamais comment on en sort. Or, il s’agit là d’une promesse de la République faite aux individus : leur capacité à changer. Mais pour cela, il faut des moyens pour les accompagner dans leur emprisonnement, notamment au niveau des soins psychologiques et psychiatriques, ou de la réinsertion.
  • Sur le droit : un État, et notamment son bras judiciaire, ne peut anticiper ce que va faire un individu. Mieux : il ne doit surtout pas s’y risquer, même au nom de la prévention. Sinon, on rentre dans le règne de l’arbitraire où primerait les stéréotypes et les préjugés les plus problématiques (notamment racistes).

Alors oui, dire qu’une mort aussi terrible que celle de Philippine aurait pu être évitée par l’application d’une OQTF ou une justice moins laxiste est plus simple à dire que le fait qu’il faille engager une réflexion sur la façon dont on accueille les étrangers sur notre territoire et dont on les accompagne, y compris dans leurs sanctions et leur réinsertion lorsqu’ils ont commis des délits ou des crimes. Mais il en va de la défense des principes cardinaux d’humanité et d’État de droit, principes qui vacillent sur leurs bases aujourd’hui – même s’il est vrai que défendre le droit des étrangers ou celui des agresseurs alors que l’émotion nationale, partagée par l’aut

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