Macron renonce à l’Europe puissance à Gaza
Si la guerre en Ukraine a constitué le cœur de l’entretien du président de la République, ses prises de position sur la situation au Proche-Orient se sont révélées très problématiques.
Hier soir, faisant feu de tout bois pour tenter, non de convaincre mais de réveiller son électorat, Emmanuel Macron s’est invité sur les deux premières chaînes de télévision, assumant d’intervenir dans le débat des élections européennes. Sans aucun nouvel argument et donc avec probablement le même effet. Proche de zéro, si ce n’est pire : faire monter l’extrême droite qu’il a désigné comme son unique opposant et dont il excite les électeurs à qui mieux-mieux.
Mais un passage a attiré notre attention. Emmanuel Macron fut interrogé par Anne-Sophie Lapix et Gilles Bouleau au sujet de la guerre à Gaza et de la reconnaissance d’un État palestinien : « Est-ce que la pression ne doit pas être plus forte sur Israël ? interroge Anne-Sophie Lapix. Reconnaître l’État de Palestine serait une façon de faire pression. » Elle enchaîne : « Votre ancien ministre des affaires étrangères, M. Le Drian, dit que c’est le moment pour jouer un rôle ». Réponse de celui qui prône matin, midi et soir une Europe souveraine et forte : « Il n’y a pas de tabou. Est-ce que je pense que cela fera pression sur le Premier ministre Netanyahou ? Non. Ce qui met de la pression, c’est quand on arrive à engager des puissances comme les États-Unis et d’autres ». On aimerait savoir à quels « autres » pense notre président s’il ne pense pas à l’Europe.
Finalement, pour Emmanuel Macron, l’enjeu ultime est de convaincre les États-Unis – et il s’en remet à leur décision. N’est-ce pas là de la vassalité ? Pour faire pression sur Biden, la moitié du périphérique parisien n’a-t-il pas été fermée ce mercredi ? Ça, c’est du rapport de force !
On apprenait hier soir que Benjamin Netanyahou sera invité à s’exprimer devant le Congrès américain tandis que l’on rappelle – non sans raison – le risque d’un retour de Donald Trump à la Maison blanche. Dans ce contexte, penser que les États-Unis vont faire pression sur Israël relève d’une sorte de naïveté. Naïveté que n’ont pas l’Espagne, l’Irlande, la Norvège et la Slovénie.
Donc il faut savoir : soit on veut que l’Europe s’affirme sur la scène mondiale, la France jouant son rôle, pour l’Ukraine comme pour la Palestine. Soit on s’en fiche un peu de cette construction d’une autonomie européenne comme acteur de paix. Quand on écoute le Président français, on a comme un doute.
La France ferait mieux de se distinguer en étant le premier pays du G7 à reconnaître l’État de Palestine et à s’employer à la libération des otages, des prisonniers palestiniens – sûrement une des solutions pour avoir des représentants soutenus par le peuple palestinien autour de la table des négociations. Au lieu d’affirmer, bravache, que bien sûr il continuera de parler avec Netanyahou alors qu’il sera probablement condamné par la Cour pénal internationale, Macron ferait mieux d’agir pour le droit international, l’égalité entre les citoyens, la vitalité d’un État palestinien dans des frontières reconnues et sécurisées.