Travailler plus : une valse et des couacs

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Le ministre de l’économie Antoine Armand veut donc nous faire travailler plus longtemps. Une nouvelle fumisterie macroniste pour perpétuer une politique anti-sociale.

Au premier temps de la valse, la politique de l’offre affirme qu’il faut à tout prix baisser le « coût du travail », notamment du travail non qualifié pour que la production française soit compétitive et que l’emploi prospère en même temps que les profits. « Au cours des années 1990-2000, explique le Haut Conseil du Financement de la Protection Sociale, la CSG s’est substituée aux cotisations salariales, et les impôts et taxes affectées se sont substituées aux cotisations patronales, avec l’essor des allégements généraux dégressifs sur les bas salaires. »


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Ce mouvement s’est poursuivi au cours des années 2010. En 2019, les cotisations sociales ne représentaient plus que 56% des recettes… La CSG pèse pour 20% des recettes et les recettes fiscales et autres contributions sociales pour 16%.

Au deuxième temps de la valse, Emmanuel Macron accentue encore la même politique. Les exonérations de cotisations sont massivement augmentées pour les compléments de salaires (primes, participations). 20 milliards d’euros en 2022, selon un rapport de la Cour des comptes.

Au troisième temps, c’est-à-dire cette année, les effets pervers de cette politique se généralisent : déficit public explosif ; record de salarié.es payé.es au Smic ; baisse du pouvoir d’achat du salaire moyen; déficit de la sécurité sociale équivalent… aux pertes de recettes liées aux exonérations sur les compléments de salaires (graphique ci-dessous) ; crise de productivité; poursuite de la désindustrialisation ; stagnation de l’emploi ; étatisation de la gestion de la sécurité sociale. Le vol en escadrille fait le plein.

Au quatrième temps de la valse, le gouvernement Barnier met sur la table un projet de budget pour 2025 lourdement austéritaire pour les services publics, la sécurité sociale, les collectivités territoriales, les fonctionnaires et l’écologie. Néanmoins, comme l’ont pointé les organisations syndicales, « une mesure réinterrogeait la pertinence des exonérations sociales systématiques, et prévoyait une désaccoutumance ‘en douceur’ des entreprises ».

Effectivement, le rendement espéré de la mesure est de 4 milliards sur 80 milliards d’exonérations. Mais le Medef, comme drogué aux baisses de cotisations, a dit non à ce modeste début de désintoxication. Et, à l’Assemblée nationale, les députés de la Macronie, ceux de la Droite républicaine et ceux du Rassemblement national ont voté ensemble pour faire tomber la mesure. Le pas de danse était bien engagé.

« Je vous ai compris ! », a immédiatement embrayé le gouvernement et son ministre de l’économie Antoine Armand, dans Les Échos du 4 octobre : « La baisse du coût du travail reste l’ADN de ma sensibilité politique […] Je souhaite que nous améliorions notre proposition en commençant par atténuer la hausse de cotisations sur les bas salaires. Il faudra trouver d’autres efforts. Cela peut prendre plusieurs formes, notamment une augmentation de la durée du travail – qui reste insuffisante en France ». L’abandon d’un jour férié supplémentaire comme le propose Élisabeth Borne ? « C’est une piste parmi d’autres. » « L’objectif doit être, en tout cas, d’accroître le nombre d’heures travaillées sur l’année, pour pouvoir financer notre modèle de protection sociale auquel nous tenons tous. »

L’alternative est claire : soit la baisse du coût du travail, soit la baisse du coût du capital. Mais il ne faut pas se leurrer. Surtout qu’il ne s’agit même pas de travailler plus pour gagner plus !

Le lendemain, on a glissé dans l’oreillette de Dominique Seux, le directeur de la rédaction des Échos, que « c’est décidé : il n’y aura pas un deuxième lundi de Pentecôte », mais une nouvelle attaque contre les droits des chômeurs, cette autre réforme ficelée par Gabriel Attal. Dominique Seux nous informe que, selon Matignon, « les sondages montrent que les Français attendent, avant de travailler plus, une baisse des indemnités des chômeurs ».

Cibler tous les salariés, cela peut être dangereux. Surtout qu’il ne s’agit même pas de travailler plus pour gagner plus ! La supposée flemmardise des chômeurs ayant davantage d’écho, haro donc sur les chômeurs ! Pour peu que les salariés oublient qu’une majorité d’entre eux sera au chômage au moins une fois durant sa carrière professionnelle, cela pourrait passer.

Mais les couacs ne s’arrêtent pas là. Côté financement de la sécurité sociale, l’Assemblée a adopté lundi le volet recettes du projet de loi de financement de la Sécurité sociale. Les élus de droite étaient largement absents, visiblement pas très mobilisés par la chasse aux flemmards. Les élus du Nouveau Front populaire ont dégagé 20 milliards d’euros supplémentaires. Ils ont voté notamment une taxation des dividendes, des plus-values sur la vente d’actions et une augmentation de la CSG sur les revenus du capital. Et aussi une contribution sur les revenus de l’intéressement et de la participation des salariés.

Au fond, l’alternative est claire : soit la baisse du coût du travail, soit la baisse du coût du capital. Mais il ne faut pas se leurrer. Il y a du pain sur la planche pour convaincre que c’est la voie durable pour traiter les maux de l’économie et de la société.

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