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Oui, il faut revenir aux urnes. Pas pour élire dans l’urgence une nouvelle Assemblée nationale mais pour débattre et trancher les projets politiques. Pour cela, la démocratie a besoin de temps.

Donc Sébastien Lecornu, premier ministre démissionnaire, se voit… remis en mission. Emmanuel Macron, en artisan d’un théâtre dont il est devenu le seul spectateur, l’envoie mener d’ici à mercredi soir d’ultimes négociations sur une « plateforme d’actions ». Cette pièce de boulevard aurait été déclenchée par la nomination de Bruno Le Maire au ministère des armées… pendant quatorze heures. Le temps d’un petit somme, d’une crise et d’une démission. Bruno Retailleau, chef des Républicains, a inventé la participation sans soutien. Grotesque à un rare niveau.


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Et la farce se poursuit avec « d’ultimes négociations jusqu’à mercredi soir ». Qui peut croire qu’un accord, un texte, une ligne politique sortiront de rafistolages ? Bruno Retailleau et son parti ont pris prétexte de la composition du gouvernement pour sortir. C’était écrit, ce fut anticipé. Les Républicains se battent pour retrouver une centralité politique. Pendant un an, ils se sont rattachés à la Macronie, ils ont « exercé le pouvoir » tout en mimant le discours de l’extrême droite. Plus 2027 approche, plus le compromis avec un président aussi rejeté qu’Emmanuel Macron les mène à l’impasse : rhétorique, électorale et existentielle.

La gauche cherche un horizon. Les uns (socialistes, écologistes, communistes) défendent la nomination d’un gouvernement NFP, espérant que le chef de l’État sera contraint de s’y rallier. Quand bien même il le ferait, les conditions ne sont plus celles d’il y a un an : on peut douter de la possibilité pour un tel exécutif de gauche de tenir et de gouverner à gauche. Les insoumis défendent leur motion de destitution et redécouvrent les vertus du front uni après avoir contribué méthodiquement à le mettre en miette. Tout le monde réclame l’unité, mais personne ne veut être uni. La prophétie de Manuel Valls sur les deux gauches irréconciliables est devenue une stratégie.

Que faire ? Revenir aux urnes. Mais le véritable enjeu, c’est de donner du temps pour mener le débat et trancher clairement les grandes options. L’idée, c’est qu’Emmanuel Macron annonce sa démission, propose une date (en mai, après les élections municipales), ce qui donne à chaque candidat⋅e le temps. Donner du temps, c’est la condition de la démocratie.

Et pourtant, le pays n’est pas mort. La lente agonie du macronisme n’a pas à être celle de la République. Nous sommes un peuple politique, traversé par des colères, des contradictions, mais aussi des désirs et des dynamiques. La crise que nous traversons est sociale, économique, de repères. Mais elle est d’abord politique.

Alors, que faire ? Revenir aux urnes. C’est la demande de 70% des Français qui veulent la démission d’Emmanuel Macron (+16% en un an). Mais le véritable enjeu, c’est de donner du temps pour mener le débat et trancher clairement les grandes options. Après Jean-François Copé et François Ruffin, après l’avoir nous-même porté (à Regards), Édouard Philippe le propose : une élection présidentielle anticipée dans les deux sens du terme, avant l’heure et avec méthode. L’idée, c’est qu’Emmanuel Macron annonce sa démission, propose une date (en mai, après les élections municipales), ce qui donne à chaque candidat⋅e le temps de bâtir son discours, ses alliances, sa campagne et de convaincre. Donner du temps, c’est la condition de la démocratie. La précipitation d’une dissolution ou d’une démission immédiate ne ferait que tout simplifier : il faut battre l’extrême droite mais il faut aussi redonner espoir et perspective à notre pays.

Si telle était la voie de sortie – que nous croyons la plus raisonnable –, on mettrait le pays en pause, comme avant chaque présidentielle. Un budget et pas de nouvelle réforme : elles n’ont aucune base politique.

Dernier problème : Emmanuel Macron. La Constitution de la 5ème République lui confère des pouvoirs exorbitants et il n’hésite pas à en user contre l’esprit même de la démocratie. Combien de temps pourra-t-il résister ainsi ? La République, en ce moment, tient moins à sa lettre qu’à notre capacité collective à en réinventer le sens.

D’ici là, Sébastien Lecornu négociera. Et que se passera-t-il jeudi ? Le macronisme dilatoire, c’est vraiment la plaie. Mais quand le pouvoir tourne en rond, c’est souvent que le pays, lui, commence à réfléchir.

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