L’intersyndicale tient bon, le gouvernement n’a pas d’échappatoire

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Ce mercredi, l’intersyndicale se rend à Matignon, convoquée par un premier ministre qui tente d’afficher l’ouverture tout en sachant qu’aucun compromis n’est à l’ordre du jour. Car si les syndicats tiennent la rue et répètent leurs exigences, la gauche politique, elle, peine à offrir une perspective crédible… avec l’extrême droite en embuscade.

À l’invitation du premier ministre Sébastien Lecornu, l’intersyndicale sera reçue ce matin à 10 heures à Matignon. Une rencontre singulière, presque inédite dans sa forme, qui survient après « l’ultimatum » lancé par les syndicats à la suite de la mobilisation réussie du 18 septembre dernier – un million de personnes dans les rues de France.


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Le choix du format dit déjà beaucoup. Lecornu n’a pas opté pour les traditionnels apartés bilatéraux, ces rendez-vous qui servent d’ordinaire à flatter, séduire, isoler, diviser. Il convie toutes les organisations en même temps, ensemble. Pas d’entourloupe possible. Et toutes répéteront d’une même voix leurs exigences : abandon du recul de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans, du doublement des franchises médicales, du gel des prestations sociales, d’une nouvelle réforme de l’assurance chômage, mais aussi conditionnalité sociale et environnementale des aides publiques aux entreprises privées.

Face à cela, le Premier ministre tentera d’incarner l’ouverture et le compromis. Mais sa posture a tout d’un trompe-l’œil. Car si dialogue il y a, personne ne croit vraiment à une issue. Non pas parce que les syndicats seraient enfermés dans une logique de refus, mais parce que les partis politiques, eux, sont déjà happés par la présidentielle à venir. Dans ce contexte électoral, toute idée de compromis est écartée d’emblée : il ne s’agit plus de négocier, mais de préparer le rapport de forces de demain.

Dans l’atmosphère politique des derniers jours, une autre idée a beaucoup circulé : la fameuse « taxe Zucman », cette proposition de taxation exceptionnelle des grandes fortunes qui enthousiasme la gauche. Mais il faut être clair : ce n’est pas le sujet de l’intersyndicale. Les syndicats ne sont pas contre une telle mesure, bien sûr. Simplement, ce n’est pas leur terrain de lutte. Leur mandat porte sur les salaires, les droits sociaux, la protection des travailleurs. Pas sur la fiscalité. Lecornu ne pourra donc pas, ce matin, sortir de son chapeau une concession de ce type pour tenter de désamorcer la colère syndicale.

Et c’est là que le paradoxe éclate. Les syndicats de salariés, eux, se battent pied à pied, rassemblent, tiennent la rue. Mais ils manquent d’une perspective politique à gauche. Or ceux qui, dans l’opinion, apparaissent comme les plus enclins à « trancher » dans la situation de blocage, ceux que les sondages placent en position de force, ce sont hélas les représentants de l’extrême droite. Le patronat, lui, ne s’y trompe pas : il sait qu’une extrême droite néolibérale au pouvoir poursuivrait sans trembler son agenda antisocial.

Ainsi, derrière la réunion de ce matin, se profile une inquiétude plus large : un mouvement syndical puissant, mais isolé ; des partis politiques divisés par la présidentielle ; et en embuscade, un Rassemblement national prêt à engranger les fruits du blocage. La rencontre de Matignon ne changera probablement rien à court terme. Mais elle illustre cruellement le dilemme du moment : un peuple mobilisé qui ne trouve pas de traduction politique à gauche, et un pouvoir qui, faute de compromis possible, joue la montre au risque de nourrir ceux qui se présentent comme les seuls capables de décider.

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