Le sérieux dérapage de Bruno Le Maire
La bataille budgétaire a commencé. Nul ne doit en minimiser l’importance économique, sociale et politique.
Un coup de force est en cours. Bruno Le Maire y apporte sa contribution en n’ayant pas immédiatement rendu publiques les données en sa possession. Ce n’est qu’à la demande pressante du président de la Commission des finances de l’Assemblée, Éric Coquerel, et de son rapporteur Charles de Courson, que le ministre démissionnaire Bruno Le Maire a rendu public l’évaluation de la situation budgétaire de la France en 2024.
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On serait sur un déficit de 5,6% du PIB – et non de 5,1% comme voté en fin 2023 à grands coups de 49.3 –, soit de l’ordre de 165 milliards au lieu de 150. « Il y a un sérieux dérapage », a proclamé le Ministre.
Normalement, lorsqu’une politique produit des fruits pourris, c’est le signe qu’il faut en changer. En Macronie, c’est le contraire.
L’urgence et la nécessité d’un changement de la politique budgétaire renvoie à un bilan plus global. C’est toute la politique pro-business conduite par Emmanuel Macron et ses prédécesseurs qui est en cause. La pression contre les « coûts » salariaux et les droits du travail, les baisses d’impôts ciblées sur les entreprises et les ménages fortunés (76 milliards depuis 2017), les aides sans contreparties aux entreprises n’ont pas relancé efficacement et durablement l’économie. Elles se payent par un creusement des inégalités, une dégradation des systèmes d’éducation et de santé, le sous-investissement dans la bifurcation écologique… Et par un creusement des déficits et de la dette publique. La France est, après la Roumanie, le pays de l’UE qui a vu sa dette publique augmenter le plus depuis 2017.
Et le gouvernement démissionnaire de commencer par expliquer que le « dérapage » n’est pas de sa faute mais de celle des collectivités locales dont les dépenses auraient dérapé avec un déficit de 10 milliards. En fait, le chiffre est gonflé. Le principal dérapage vient des impôts, inférieurs aux prévisions. Et surtout, les collectivités locales doivent compenser les déficits éventuels de leurs dépenses de fonctionnement l’année suivante. Seules leurs dépenses d’investissements (heureusement assez dynamiques) peuvent être financées par emprunt. Normalement, lorsqu’une politique produit des fruits pourris, c’est le signe qu’il faut en changer. En Macronie, c’est le contraire.