L’art, cible oubliée des vents mauvais

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L’époque est au dépeçage des politiques publiques culturelles. Bonjour tristesse.

Il faut parfois se fier aux chiffres : l’Observatoire des politiques culturelles confirme la baisse continue du financement de la culture par les collectivités territoriales. Entre 2024 et 2025, les dépenses culturelles de la moitié des régions, départements et communes ont fortement diminué. Une baisse qui ne tient pas seulement à la conjoncture. À ce niveau, cela révèle un choix politique, dont le baromètre nous apprend qu’il est partagé par la gauche et par la droite. Tristesse.


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Les collectivités financent la culture à hauteur de près de 10 milliards d’euros par an, contre environ 5 milliards pour l’État. En clair, les deux tiers du financement public de la culture repose sur ces institutions locales. C’est donc un pilier essentiel pour la création, la vie artistique et l’accès de toutes et tous à la culture.

Ce pilier est essentiel quand, partout dans le monde, les vents du populisme d’extrême droite soufflent contre les arts et la pensée. De Trump à Meloni, la même séquence se répète : changement des directeurs des institutions, réduction des crédits pour la création contemporaine, attaques contre les artistes jugés trop libres, valorisation du patrimoine, de l’identité nationale. La culture devient vitrine et non vivier.

Laisser le secteur privé décider seul de ce qui doit être montré, produit, entendu, vu ou lu, c’est renoncer à la pluralité des formes et des voix, au profit de ce qui marche, ce qui plaît, ce qui se vend. L’art a besoin de liberté, de soutien public. Il a besoin d’un écosystème protégé. C’est le rôle des politiques publiques.

Partout l’extrême droite au pouvoir attaque la création, les arts vivants, le cinéma, la critique. Car la création, c’est l’imprévisible, le sublime, le « pas regardable », le contradictoire. Tout ce que vomit l’autoritarisme populiste. Elle raille le « politiquement correct » quand elle s’oppose, dans les faits, à la liberté, de ton, de forme et de fond des artistes.

Face à cela, la gauche est silencieuse, ou pire, gênée. Elle se concentre trop souvent sur la défense de l’information dans l’audiovisuel public. Sauf qu’il s’agit aussi de lieux de création, radiophonique, cinématographique, audiovisuelle.

Plus largement, la défense de la culture doit inclure celle des artistes, des théâtres, des festivals, des musées, des ateliers, des écoles, des résidences. Or, dans la bataille de l’imaginaire, les financements sont des armes. Laisser le secteur privé décider seul de ce qui doit être montré, produit, entendu, vu ou lu, c’est renoncer à la pluralité des formes et des voix, au profit de ce qui marche, ce qui plaît, ce qui se vend. L’art a besoin de liberté, de soutien public. Il a besoin d’un écosystème protégé. C’est le rôle des politiques publiques. Le désengagement des collectivités est une alerte grave qui s’ajoute à celui de l’État, aux logiques de marché. Il est une capitulation. Leur désengagement est une reddition.

Alors que les artistes alertent, que les lieux ferment, que leur précarité s’installe, la gauche doit articuler son projet à une ambition culturelle. Laquelle ? La stricte défense de l’existant n’est pas suffisante, ni celle en faveur de davantage d’argent. La culture ne doit pas être « une cerise sur un gâteau de plus en plus mal partagé » (Joseph Confavreux dans Mediapart). Tout cela est vrai, mais une vérité demeure : sans art, sans récit, sans pensée, que reste-t-il à une démocratie ? Une administration de la vie. Triste vie. Donc il faut travailler pour qu’à nouveau l’art devienne un enjeu vital, populaire et politique. On rêverait d’un Clemenceau prêt à provoquer en duel un homme crachant sur un tableau de Manet. Mieux, on regrette les batailles d’Hernani qui posait les vraies questions essentielles : qu’est-ce que l’art qui vaut la peine de se battre pour lui ?

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