Palestine : et Macron fit quelque chose

La lettre du 23 septembre 📨
par Catherine Tricot
Hier soir à la tribune des Nations unies, la France, par la voix de son président, a reconnu l’État Palestinien. En attendant que les Français organisent enfin une manifestation digne de ce nom.
Cette reconnaissance de l’État de Palestine, Emmanuel Macron l’a fondée sur l’histoire, celle qui en 1947 disait le droit des peuples juif et palestinien à un État et à l’autodétermination. Cette « promesse d’un État arabe, elle, reste à ce jour inachevé ». Le président français a su trouver les mots pour parler du peuple palestinien lui-même. « Cette reconnaissance est une manière d’affirmer que le peuple Palestinien n’est pas un peuple en trop. Qu’il est au contraire ce peuple qui ne dit jamais adieu à rien pour parler comme Mahmoud Darwich. Un peuple fort de son histoire, de son enracinement, de sa dignité. »
Ce discours, il le prononçait dans un moment dramatique pour les Palestiniens, celui d’un génocide en cours assorti d’une offensive israélienne pour empêcher jamais l’établissement de leur État : « Le temps de la paix est venu car nous sommes à quelques instants de ne plus pouvoir la saisir […] Nous savons le danger des guerres sans fin. Nous savons que le droit, toujours doit l’emporter sur la force », a dit le chef de l’État.
Ce rappel de la promesse initiale est fondamental pour maintenir un possible futur. Le premier ministre canadien le disait en ces mots : « Alors que la politique déclarée du gouvernement israélien est qu’il n’y aura jamais d’État palestinien […] ce que nous essayons d’accomplir, c’est de garder cette question sur le devant de la scène ».
Nul ne croit que les reconnaissances qui ont eu lieu ces jours, rompant avec la forte unité occidentale, est un aboutissement. Mais alors que la question palestinienne avait disparu de la scène internationale, ensevelie dans le silence et les accords d’Abraham, elle revient au premier plan. La mobilisation des opinions publiques – en particulier arabes – ont forcé leurs États à ne pas entériner ce qui aurait provoqué l’irréversible pour les Palestiniens.
Les opinions publiques européennes aussi se sont mobilisées par centaines de milliers à La Haye, en Espagne, à Londres, en Italie hier, forçant à poser la question des sanctions de l’UE à l’égard d’Israël. Elles sont enfin à l’agenda. Dans ces circonstances, il y a quelque chose de paradoxal dans la faible mobilisation de l’opinion publique française, dans sa division même.
Dans ce pays qui a pratiqué un antisémitisme officiel et qui est rongé par cette honte indélébile, les accusations d’antisémitisme proférées à l’encontre des militants de la cause palestinienne ont été une tâche et un lourd empêchement. Des manifestations ont été interdites pour ce motif. Ironie, c’est Emmanuel Macron lui-même qui doit se défendre et défendre notre pays d’antisémitisme face aux attaques du pouvoir israélien. L’essentialisation de nos concitoyens arabes ou musulmans, leur identification à des antisémites dormants ou militants, est un poison devenu banalité sur les plateaux télé. L’assimilation dégueulasse de La France insoumise à un antisémitisme électoraliste est l’argument brandi pour sa mise à l’écart, alors que le RN est lavé du passé… et du présent de ses élus et militants.
Tout ceci est vrai et a conduit à inhiber les soutiens aux Palestiniens. Mais les militants en France ne sont pas les seuls à avoir connu répression et accusations ignominieuses. En Angleterre, par exemple, une association propalestinienne a été dissoute et des centaines de ses soutiens arrêtés. En France, comme pour d’autres luttes, la division est venue d’insultes, de propos agressifs, blessants. La France insoumise a choisi de faire de ce combat, non un terrain de rassemblement, mais un objet de clivage avec le reste de la gauche. Hélas, cela a été facilité par les autres partis. Ceux qui ont appelé à interdire les manifestations – hein Carole, on n’oublie pas. Ceux qui ont déserté la rue, en particulier la direction communiste qui, historiquement, était aux premières loges des mobilisations. Un jour, on fera les comptes. En attendant, les maires en hissant le drapeau palestinien au fronton des mairies, les supporters du PSG avec leurs banderoles et leurs tifos, sauvent l’honneur. Merci à eux. Il est plus que temps pour la gauche politique de se ressaisir, là aussi.
🔴 CARTE DU JOUR
50 villes pourraient basculer à l’extrême droite lors des élections municipales

« Une cinquantaine de villes de plus de 20 000 habitant·es ont un risque ‘significatif’ de basculer à l’extrême droite lors des prochaines élections municipales de mars 2026. » Tel est le constat alarmant des projections électorales d’Alessio Motta, chercheur en sciences sociales et docteur en science politique. Nos confrères de StreetPress et Basta ! les ont transposées dans une carte interactive, où l’on peut chercher sa commune et constater son « nutriscore » de menace d’extrême droite. Une menace particulièrement tenace sur la Côte d’Azur et dans le Nord.
L.L.C.
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Le « Green Washing Comedy Club », organisé par nos confrères de Politis et le Baranoux. Pour rire de l’actualité, histoire de changer… Rendez-vous ce mercredi 24 septembre à 19h, au 78 rue Compans (Paris, 19ème). C’est gratuit, mais faut réserver ici.
C’EST CADEAU 🎁🎁🎁
Le groupe palestinien Al Fajer interprète en 1989 le poème Qasamat du poète palestinien Samih Al-Qasim, l’un des plus grands poètes de Palestine, décédé en 2014. N’oubliez pas de mettre les sous-titres si vous ne comprenez pas l’arabe !
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Catherine Tricot,
Il faudrait commencer par ne pas inverser les responsabilités, quoiqu’on pense des positions politiques de La France insoumise. Au lendemain du 7 octobre 2023, un certain nombre de responsables du PS, du PCF, des Ecolos et d’ex-LFI (comme François Ruffin) ont gobé tout cru les mensonges de la propagande israélienne sur ce qui s’était passé à cette occasion. Un certain nombre de ces bobards ont été du reste débusqués par le journal israélien Haaretz. D’où la nécessité d’une enquête internationale – pour faire le point sur les exactions commises par le Hamas (ou des éléments n’y appartenant pas) – enquête qui n’aura probablement jamais lieu, puisqu’elle est empêchée par le gouvernement génocidaire de l’État d’Israël: les institutions de l’ONU (comme l’UNRWA) sont interdites d’entrée en Israël.
Sur les 1200 victimes israéliennes recensées le 7 octobre 2023, 400 étaient des soldats (et des soldates) et des policiers israéliens. Les combattants de la résistance palestinienne (qui ne se limitent pas au Hamas et à sa branche armée) ont commencé par prendre d’assaut les postes d’observation et les postes de police (comme celui de Sderot). A l’occasion de la trêve de janvier 2025 – brisée en mars par Netanyahou -, une garde-frontière et cinq soldates de l’armée israélienne (en très bonne santé) ont été libérées dans le cadre des échanges de prisonnier.es. Parmi les Palestinien.nes libérées, on trouvait Khalida Jarrar, ancienne députée au Conseil législatif palestinien (instance qui ne se réunit plus depuis plusieurs années, en vertu des ukases de Mahmoud Abbas, dirigeant non élu depuis 2006 de la non-autorité palestinienne), sortie de prison les cheveux blanchis et qui a relaté les conditions dans lesquelles elle avait été détenue durant plusieurs mois.
J’ajouterai que l’on ferait bien de se préoccuper des milliers d’otages palestinien.nes détenu.es dans des conditions ignobles – recensées par des organisations de défense des droits humains, comme B’Tselem (Israël) -, par exemple Marwan Barghouti, militant du Fatah, que le fasciste BenGvir est venu insulter dans sa prison, se comportant – et je pèse mes mots – comme Klaus Barbie à l’égard de Jean Moulin.
Salutations solidaires.
Hans-Peter Renk