Contribution exceptionnelle des plus riches : quand c’est flou…
Michel Barnier va-t-il taxer les riches ? Il le dit mais, quand on lit attentivement, il ne l’écrit pas dans la loi.
« Le budget Barnier reconnaît notre victoire idéologique, pour nous antilibéraux », claironnait Jean-Luc Mélenchon sur son blog le 14 octobre dernier. Le gouvernement venait récemment de rendre public son projet de loi de finances, dans lequel il était question d’une « contribution exceptionnelle » des Français les plus riches. Il y aurait de quoi se réjouir, en effet. Taxer les riches pour renflouer les caisses, comme si Michel Barnier prenait le contre-pied des sept années de politique macroniste. Mais il y a un loup…
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Déjà sur le nombre de personnes concernées par cet impôt exceptionnel. On nous avait annoncé 65 000 foyers mais nos confrères des Échos se sont montrés tatillon : « Ce sera en réalité près de trois fois moins, selon la documentation budgétaire publiée par Bercy. 24 300 foyers en seraient effectivement redevables. » Heureusement, Michel Barnier est magicien. Avec trois fois moins de foyers imposés, il entend quand même faire « rentrer 2 milliards d’euros dans les caisses publiques chaque année ». Pour cela, l’exécutif a amendé son propre texte, pour un résultat… nul, à lire Les Échos ou l’Opinion.
En effet, que Michel Barnier taxe les riches, aux Échos, on n’y croit pas : « ‘Le chiffrage a été réalisé […] sans tenir compte des effets comportementaux qui ne sont pas chiffrables’, peut-on lire dans les documents publiés par Bercy. Autrement dit, les foyers concernés pourraient très bien revoir la structure de leurs revenus ou leurs méthodes d’optimisation pour éviter d’être surtaxés l’année prochaine ou les suivantes. L’État pourrait alors faire une croix sur ses 2 milliards… » Car de toute façon, il existe tout un panel de mécanismes aux noms plus barbares les uns que les autres pour permettre aux plus riches d’échapper à cette contribution exceptionnelle. « Les milliardaires peuvent dormir tranquille, commente l’économiste Gabriel Zucman, concrètement, la mesure ne va pas les toucher. »
Depuis, les députés d’opposition ont amendé et voté pour que cette contribution soit élargie, pérenne et non exceptionnelle. « Victoire ! », s’emportait la cheffe des députés insoumis Mathilde Panot.
Tout ça pour… finir aux poubelles de l’Assemblée à coups de 49.3.« Peu importe les montants : c’est le raisonnement qui compte », écrivait également Jean-Luc Mélenchon. Cela commence à faire beaucoup de victoires de la gauche qui ont un amer goût de défaites ces temps-ci.
Les petites victoires d’aujourd’hui, quasi symboliques par rapport aux enjeux financiers, pour une fiscalité plus juste pourront construire une base pour des victoires plus conséquentes demain, si la gauche devient majoritaire. Il sera nécessaire, alors, de s’attaquer aux mécanismes qui facilitent l’optimisation fiscale des plus riches, l’évasion fiscale et la fraude fiscale.