Affaire Abad : « La Macronie nous prend pour des idiots »

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Que dit l’affaire Damien Abad de la place des femmes en politique ? Pour en parler, Mathilde Viot, confondatrice de L’Observatoire des violences sexistes et sexuelles en politique et autrice de L’homme politique, moi j’en fais du compost, aux éditions Stock, est l’invitée de #LaMidinale.

UNE MIDINALE À VOIR…

 

ET À LIRE…

Sur l’affaire Damien Abad
« On aborde mal la présomption d’innocence. Elle vise à ne pas jeter quelqu’un en prison sans procès. Il n’est pas question de mettre Damien Abad en prison. La question, c’est est-ce qu’il peut rester ministre dans ces circonstances ? »
« Deux choses très importantes empêchent qu’il continue à être au gouvernement : premièrement, que ce gouvernement décide de faire de la cause des femmes une énième « grande cause du quinquennat » et, pour autant, envoit le message qu’on peut être accusé de viol et rester en place. Ça envoie un message d’impunité à tous les agresseurs de France et un message de danger à toutes les femmes. Deuxièmement, monsieur Abad ne peut pas rester parce qu’il va être empêché dans ses fonctions. Il ne va pas pouvoir continuer à exercer son portefeuille correctement puisqu’il va porter sur ses épaules en permanence ce fardeau. »
« Ils sont prêts, dans leur défense masculiniste, à faire primer l’intérêt de ce mec-là sur l’intérêt général. »

Sur la réaction d’Élisabeth Borne
« Ils gèrent ça comme n’importe quelle crise. La Macronie n’est pas très bonne car elle manque en permanence de sincérité, ils ont une gestion hyper arrogante des choses. Ils prennent les gens pour des idiots. »
« Quand ils disent qu’ils l’ignoraient, ça dénote une forme de mépris qui ne m’étonne pas du tout. »
« Ils sont dans une situation compliqué puisque monsieur Abad n’est pas le seul accusé de viol au sein du gouvernement. C’est le cas de Gérald Darmanin, accusé il y a deux ans. Sa plainte n’a pas été classée sans suite, il y a un délibéré à venir, donc il va y avoir un épisode Darmanin. Ça va, à nouveau, mettre le gouvernement dans une situation compliquée. »
« Ils préfèrent tous se protéger plutôt que d’accepter de reconnaître que les droits des femmes supplantent les intérêts d’Untel ou Untel d’avoir un poste de ministre. »

Sur le fait que 1 à 2% des accusations de viol aboutissent sur une condamnation
« Les agressions sexuelles se déroulent dans des huis clos. On se retrouve souvent parole contre parole. »
« L’affaire PPDA va pouvoir faire avancer les choses : la mise en lien des cas, l’accumulation des cas, la répétition du système de prédation, donnent de la crédibilité et renforcent le témoignage de chacune. »

Sur l’affranchissement du système judiciaire par les femmes
« Les femmes se tournent vers des instances où elles se sentent écoutées, des instances féministes. Ce n’est pas le cas de la justice. »
« Le système judiciaire renverse la culpabilité sur les victimes. »

Sur son livre qui dénonce les violences sexuelles à l’Assemblée nationale
« On ne se pose pas les bonnes questions. On a encore une représentation du pouvoir figée et uniforme. On imagine qu’une personne qui peut dignement représenter les autres, c’est un homme, blanc, hétérosexuel et bourgeois. Par conséquent, toutes les personnes qui s’éloignent de cet archétype sont écartées du pouvoir. »
« Il y a un vrai refus des pouvoirs politiques de laisser les femmes – ou toute autre minorité – s’organiser. On l’a vu avec les attaques de Jean-Michel Blanquer contre le « woke » où il considérait que les réunions non mixtes étaient racistes. »
« Ils ont un logiciel qui est tellement dans l’agressivité, dans la volonté de dominer, que, nécessairement, les personnes en face qui s’organisent vont appliquer les mêmes méthodes. »
« Si on cesse d’être préoccupé, en politique, par de la prédation – une méthode qui se décline, par exemple, sur la destruction du service public –, on va pouvoir s’intéresser à d’autres choses, comme la vulnérabilité. »

Sur la gauche et la France insoumise
« On est encore dans un système où tout le monde considère que cela fait partie du jeu. »
« Les règles du monde politique ont été déterminées par les hommes et il n’y a pas de vraie volonté d’en changer. »
« La plupart des hommes ont une volonté d’incarner les propos qu’ils vont tenir : c’est le cas de François Ruffin – et je ne le cite pas parce qu’il serait pire ou quoi mais j’essaie de faire la démonstration de comment à gauche on essaie de porter un regard différent. Dans ses prises de parole, il essaie de prendre le cas d’Honoraire ou d’Hector et ils les porte à l’Assemblée nationale. Mais cela a des limites parce qu’il ne peut pas incarner une femme noire ou une femme blanche qui parlerait de violences sexistes ou sexuelles. Par conséquent, c’est des sujets desquels ils se détournent tous et toutes parce que cela ne les touche pas. »
« Les lois sont faites par ces hommes-là et donc sont faillibles pour l’ensemble des personnes qui s’écartent de l’archétype. »
« L’objectif de mon livre, c’est qu’ils se rendent compte : si ces hommes minimisent, c’est parce qu’ils ne voient pas, notamment parce que c’est confortable pour eux. »

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